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Retour à Rancho Mirage

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Un billet paru dans l'Action française 2000 du 20 juin 2013 (n°2865) sous le titre Méfiance cordiale et archivé sur Royal-Artillerie sous le mot-clé AF2000 (37 entrées).

Le G2 californien qui a réuni près de Palm Springs les présidents Barack Obama et Xi Jingpin n'a pas accru sensiblement la température ambiante de leur diplomatie, sauf les 40°C à l'ombre. C'était pourtant le but, malgré le nom équivoque de l'endroit, Rancho Mirage. Les sujets techniques mis au programme ont été débattus certes librement, mais les stratégies se sont avérées irréconciliables, repoussant aux calendes ce qu'un diplomate présent appelait l'étincelle de confiance. En attendant l'étincelle, les départements concurrents de chacun des pays se contenteront d'honnêteté dans l'interprétation des faits, au seuil du vœu pieux.



Deux conceptions se heurtent à découvert, le légalisme international des Etats-Unis¹ qui, en matière de droit maritime, droit de la propriété, droits de l'homme, affronte l'imperium imprescriptible et quadrimillénaire de la Chine ; à découvert, depuis que le nouveau président l'a formellement revendiqué en promouvant son fameux China Dream : l'Empire du Milieu revient sur ses marches géographiques et culturelles historiques et rien ne lui résistera. La polémique ne cesse d'étonner quand on sait le concert de louanges qui précéda l'avènement du nouvel homme fort de la Chine, que l'on disait "dégrossi à l'étranger", accommodant et simple d'allure. C'est oublier qu'il est Fils d'Immortel², nourri au lait de la revanche et missionné pour effacer les humiliations occidentales et japonaises du passé, le tout dans la plus parfaite bonhomie. C'est bien pour cela que le Standing Committee du Politburo l'a choisi, après l'apparatchik amidonné Hu Jintao qui n'a fait que défendre.

Corée
Malgré cette béance entre deux conceptions du monde, la diplomatie américaine est allée au plus loin possible et a marqué un point inattendu. Elle a su enrôler le président chinois dans sa vision du risque coréen au cœur même de sa zone de responsabilité. Pour mesurer l'enjeu il faut se souvenir que la Corée est le seul pays de la région à avoir pour mère-patrie la Chine éternelle. Cet attachement culturel existe de part et d'autre de la ligne de démarcation et il est impensable de voir se dresser aucune Corée contre la Chine, jusqu'à sans doute s'en faire l'avocat bénévole en cas d'extrême tension. Cette allégeance pourrait être comparée à celle d'un dominion britannique vis à vis de la couronne anglaise. Or, c'est le protégé officiel de Pékin, Kim Jong-un, qui vient lui-même de contrevenir au serment de suzeraineté en dilapidant l'aide structurelle chinoise dans la production d'armes nucléaires, par définition inutile sous le parapluie nucléaire chinois. L'injure est double, foi et hommage sont parjurés. Il était dès lors facile d'amener la délégation chinoise à collaborer, ce qui fut fait en finesse.

Hacking
L'autre point pratique débattu au soleil torride de Californie fut la guerre cybernétique. Match nul ! Si les attaques chinoises sont prouvées malgré les dénégations gouvernementales, les attaques américains le sont aussi, et qui pis est, instruites sur la base de la XXè Directive présidentielle du mois d'octobre 2012 qui organise l'offensive informatique tous azimuts (OCEO - Offensive Cyber Effects Operations). Difficile aux diplomates les plus talentueux de se dépêtrer de ce dossier surtout quand un service au contact avoue avoir fait dérailler les centrifugeuses d'un centre d'enrichissement d'uranium en Iran, par exemple (Stuxnet). Comme en Mer de Chine méridionale, la confiance n'étant pas encore acquise, on s'en tiendra à l'honnêteté des rapports et à la lisibilité des signaux optiques de bord à bord.

Extradition
Une mesure collatérale est passée inaperçue. Les services de l'Institut chinois d'enquête et surveillance disciplinaires (China Discipline Inspection and Supervision Institute) viennent d'ouvrir des discussions avec l'Immigration américaine pour le rapatriement de fonctionnaires corrompus cherchant asile aux Etats-Unis. La seule contrainte dans le dossier est de prouver de manière irréfutable les faits de corruption.


Le G2 de Rancho Mirage n'a pas amoindri le risque de guerre future dans le Pacifique Nord, les Etats-Unis ayant poliment refusé de se retirer derrière le méridien de Pearl Harbor - mais il l'a raisonnablement retardé, au grand soulagement du Japon qui craignait la naissance d'une certaine familiarité entre deux conceptions du monde qui le prennent en étau. Pendant les travaux diplomatiques, la vente continue, et Monsieur Hollande est venu prendre des cours.



(1): Ce légalisme est patent par le simple refus de Washington de signer certaines conventions internationales car elles engageraient leur application, alors que Pékin signe tout et n'applique pas.
(2): Les huit Immortels sont tous morts comme nous en assure la Wikipedia.



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