Il y avait cent raisons de voter Macron, et autant de ne pas le faire mais ce qui a déterminé beaucoup d'électeurs se résume à la maxime gaullienne : au premier tour on choisit, on second tour on élimine. J'ai éliminé le programme crypto-bolivarien de monsieur Philippot, le corneculage sur l'euro et le gudisme rampant. Pour le reste (sécurité, identité, immigration, préférence nationale) je me serais laissé tenter si quelqu'un d'autre que Marine Le Pen m'avait proposé du gâteau. Je n'ai jamais cru ni en ses capacités de rassemblement, ni en son niveau intellectuel, sans parler de sa vulgarité et de son dilettantisme - elle ne bosse pas ses dossiers ! Eut-elle été moins paresseuse qu'elle aurait emporté la région Nord-Picardie. Gagner un malheureux point entre les deux tours des régionales n'a jamais été critiqué, la faiblesse était pourtant prémonitoire.
Le "débat" fut accablant pour tout spectateur et pour sa nièce d'abord (elle n'aurait pas tenu jusqu'au bout, dit-on). Si l'on comparait une campagne électorale à une course hippique, ce serait du trot monté, l'épreuve toute à la main du début à la fin. Sauf qu'à y engager un tocard, on est presque sûr qu'en voyant la ligne droite il va se mettre à courir pour en finir plus vite. C'est ce qui s'est passé avec Marine Le Pen le 3 mai.
La contre-performance - arriver troisième dans une élection à deux ! - est à mettre au crédit du suicide politique de la mégère-en-chef qui va maintenant se cramponner pour encaisser les législatives. Bien sûr la bouillie pour chat du programme Philippot a découragé beaucoup de ceux qui prirent la peine de l'étudier. Racolage et démagogie sur fond de souffrances populaires laissaient voir l'usure de la trame. A partir d'un certain niveau d'instruction, les gens ne se satisfont plus d'entendre pour toute réponse à toute question que c'est la faute à l'Europe, c'est la faute à l'immigré légal et clandestin.
L'affaire aurait été pilotée par Marion sur son propre programme que j'aurais sans doute suivi. Jusqu'à ce matin je pensais qu'avec cinq ans de bonification au Palais Bourbon, l'esprit le plus délié du Bureau politique avait plus que des chances de l'emporter en 2022 avec sa ligne politique carrée et simple à promouvoir. Hélas la sclérose en plaques du parti ondulant sur tous les sujets ne le permettra pas. Ils sont nuls à chier et n'ont pas compris que Marion aurait enfoncé le coin dans les cohortes fillonistes à la seule condition d'oublier cette foutaise moscovite de sortir de l'Eurogroupe. Il fallait poloniser Sapir (lol).
Je partage à 95% les arguments d'Aymeric Chauprade qui expliquait au journal l'Opinion le 4 mai dernier pourquoi il s'était résolu à voter Macron. Si vous souhaitez passer à autre chose ou écouter la radio, cliquez d'abord sur le lien ci-dessous, le Piéton a les mêmes idées :
Chauprade - pourquoi je voterai Macron !
Le bon attelage aurait été Marion Maréchal-Le Pen / Aymeric Chauprade. On sortait complètement des doutes métafachistes, des détails de l'histoire et du Zyklon B ! On n'allait plus à Vienne au bal de la Waffen. On ajoutait une dimension géopolitique sérieuse au programme. Pour Marion, sa position politique "droite libérale et colbertiste si nécessaire" alliée à des convictions catholiques conservatrices ne pouvait que faire un carton. En plus elle a prouvé à la Chambre et en meeting qu'elle est un orateur convaincant, beaucoup d'aisance intellectuelle, de clarté quand elle déroule un raisonnement, d'à-propos, de mordant à l'occasion, et... une plastique naturelle irréprochable, la terreur de l'UMP en PACA ! Ils sont sauvés, elle part, écœurée par la mafia Philippot qui ose se maintenir après le désastre !
Pour la droite nationaliste, le danger est aujourd'hui de se leurrer sur les onze millions de voix obtenues au second tour et croire en la transmutation à l'identique aux législatives du mois de juin. La personnalité des candidats va forcément jouer comme le programme rénové qui ne peut être celui avec lequel fut perdue la présidentielle dans ses exagérations, mensonges et folies douces. C'est basique. On n'élit pas un député de cette façon.
Faudra-t-il encore trouver les cinq cents trente candidats (DLF prendra sa place) car d'eux dépendront aussi les subventions publiques calculées au nombre de suffrages exprimés, ensuite faire l'a priori d'un afflux militant pour la campagne de base, tractages, réunions publiques locales, contrôles des bureaux de vote etc... pour le moment, des pans entiers du territoire sont à jeun d'avoir rencontré des militants bleu-marine impliqués dans la campagne. Message aux investis : le kit de candidature est trois fois moins cher cette année, le coefficient multiplicateur du parti Jeanne ayant été fortement révisé depuis que la brigade financière enquête sur 2012.
FN-DLF sera un accord d'appareils, il m'étonnerait qu'il ruisselle jusqu'au terrain. Certes une bonne quarantaine de circonscriptions se sont déjà données au Front national dimanche dernier et il ne devrait pas être si difficile d'avoir des députés. Il leur reste un mois ! A miser chez le book, je jouerais 30 !
Reste à comprendre comment la droite pourrait se recomposer après la faillite Fillon, sans doute plus facilement au niveau local qu'à Paris. Avec la disparition de la scène politique de Marion Maréchal-Le Pen, il sera plus facile d'accommoder les restes en PACA mais le grand parti de droite qui nous manque redevient une chimère tant les convergences étaient sûres entre Marion, Bompard et les députés pizzaioli du Sud.