Les Français connaissent peu Luttwak, Edward Nicolae Luttwak, géostratège américain du CSIS (centre d'études internationales et stratégiques) de Washington, d'origine roumaine. Ils ont tort car, outre ses compétences universellement reconnues, c'est un parfait francophone avec un accent à couper à la scie circulaire certes, mais qui n'hésite jamais ni en vocabulaire ni en syntaxe ! Il est publié en France chez Odile Jacob.
A l'occasion du XVIII° Congrès du Peuple du Parti communiste chinois qui s'est ouvert aujourd'hui à Pékin, il publie « La Montée en puissance de la Chine» et en a fait la présentation à Virginie Herz chez France 24. Commençons par là (12 minutes) nous apprendrons des choses, à la fois sur le principe impérial du tribut et la sinisation historique de l'espace et du glacis l'entourant. Quand MM. Giscard d'Estaing et Raffarin sont allés à Pékin expliquer les rodomontades de Nicolas Sarkozy avant les JO de 2008, ils n'avaient rien lu de Luttwak et ne pouvaient donc savoir qu'ils partaient faire kowtow :
La Chine communiste est donc bien sur un projet d'empire depuis toujours recommencé. Royal-Artillerie a explicité cette thèse à de nombreuses reprises et l'actualité du pouvoir chinois ne l'a jamais démentie. L'éditeur de Luttwak dramatise sa quatrième de couverture, c'est de bonne guerre mais pas si faux :
A l'occasion du XVIII° Congrès du Peuple du Parti communiste chinois qui s'est ouvert aujourd'hui à Pékin, il publie « La Montée en puissance de la Chine» et en a fait la présentation à Virginie Herz chez France 24. Commençons par là (12 minutes) nous apprendrons des choses, à la fois sur le principe impérial du tribut et la sinisation historique de l'espace et du glacis l'entourant. Quand MM. Giscard d'Estaing et Raffarin sont allés à Pékin expliquer les rodomontades de Nicolas Sarkozy avant les JO de 2008, ils n'avaient rien lu de Luttwak et ne pouvaient donc savoir qu'ils partaient faire kowtow :
La Chine communiste est donc bien sur un projet d'empire depuis toujours recommencé. Royal-Artillerie a explicité cette thèse à de nombreuses reprises et l'actualité du pouvoir chinois ne l'a jamais démentie. L'éditeur de Luttwak dramatise sa quatrième de couverture, c'est de bonne guerre mais pas si faux :
« Si elle poursuit toujours plus dans la voie du développement économique, on peut craindre que la Chine n’en vienne aussi à se doter d’une puissance militaire réellement mondiale et ne cherche à peser davantage sur l’échiquier international. Ce scénario d’une Chine hégémonique déclenchant par réaction un vaste conflit est-il vraiment probable ? La logique même de la stratégie n’impose-t-elle pas aux dirigeants chinois d’opter pour une autre voie ? Sauront-ils le comprendre ? Et que faire, partout, pour endiguer cette dangereuse montée en puissance qui pourrait de nouveau faire basculer le monde dans le chaos et la guerre ?»
C'est plutôt l'usure du vecteur PCC qui est en cause pour l'empire du milieu. Ses dirigeants n'ont plus l'autorité morale et naturelle nécessaire à gérer un peuple d'un milliard et trois cent millions de citoyens. Les immenses défilés de limousines de grand luxe qui convergent vers le Palais du peuple n'impressionnent pas les pékinois, assez proches du titi parisien. La corruption fait des ravages et les réseaux sociaux comme Weibo s'en donnent à coeur joie. Le président Hu Jintao en ouvrant le Congrès n'a parlé presque que de corruption, un vrai tsunami de merde qui leur arrive dessus. A tel point que le Global Times officiel s'essayait cet été au contre-feu, en soutenant que le pays le plus peuplé du globe devait, à son stade actuel de développement, vivre avec un certain de degré de corruption ! A côté de milliers de cas, trois caciques sont au pilori médiatique : Li Zhijun (Mister TGV) vautré dans le stupre et les milliards, Bo Xilai de Chongqing, ennemi de la clique en place, dont l'épouse a fait trucider un agent du MI6, et maintenant Wen Jiabao, le premier ministre, qui va être mis en examen de manière informelle grâce aux révélations du New York Times dont nous nous sommes fait l'écho. Le nouveau Secrétaire général du Parti est déjà réputé "riche". Xi Jinping est un "fils de...", et ça la fout mal au parti des travailleurs. Sa soeur Qi Qiaoqiao est à la tête de 2 milliards de dollars selon Bloomberg. M. Hu Jintao a fait arrêter des gens qui lui demandaient de publier son patrimoine. Qu'en pense M. Mélenchon dont le thuriférage est publié par Xinhua à l'occasion du Congrès ?
Les dirigeants communistes locaux sont quasiment partout reçus comme des prédateurs avides, et les administrations publiques pillent littéralement leurs administrés ! Hong bao (ou lì xì à Canton) sont des étrennes obligatoires tous les mois. Six cent soixante mille cas de corruption ont été traités en 5 ans aux dires de la Commission de discipline du PCC. De ceci résulte un transfert de prestige - c'est important la face en Chine - du Parti vers l'Armée, réputée propre (à tort ou à raison). L'Armée chinoise est une institution autonome et riche. Elle a ses propres réseaux de fournitures et même ses propres unités de production, des fermes, des usines, ses propres transports, ses quais sous douane... Elle commande chez elle si ses intérêts sont en cause. Lors de la Révolution culturelle, les Gardes rouges n'ont pu monter au Yunnan, ils auraient été éradiqués à la mitrailleuse. En cas d'effondrement du régime communiste aussi vermoulu que l'Ancien régime français, elle restera seul maître à bord pendant un certain temps. Elle pousse donc les chaudières de son domaine en attisant les risques de conflits partout. L'évidence des réactions provoquées chez tous les voisins, sauf la Fédération de Russie nous dit Luttwak, motive un accroissement continu des crédits budgétaires arrachés au gouvernement central ; tant et si bien que les dépenses militaires sont sur une pente ascendante de 9% que le PIB actuel n'atteint même pas.
La dispute des Senkaku qui semble très artificielle - il suffirait d'un accord sino-nippon de pêche - participe de cette tactique de braises rougeoyantes à usage interne. On sait ce que deviennent les empires quand le grand état-major remplace le gouvernement civil. Les généraux montent en gamme dans la menace, déclenchent des guerres qu'ils ne savent pas limiter, ruinent le pays par la mobilisation de ressources utiles au nécessaire, puis finissent par mourir dans l'honneur comme des cons. La Prusse a disparu sous le casque à pointe de ses maréchaux, le Japon aurait connu le même sort si McArthur n'avait misé sur une renaissance pacifique contenue par la menace d'une vitrification. Dans l'histoire, nous connaissons l'empire napoléonien. C'est donc un chauvinisme populaire bien encadré qui peut suppléer la pulvérisation de la charpente communiste dont les élans généreux ont de longtemps disparu. Méfions-nous, même si le beau porte-avions Liaoning n'a ni avions ni catapultes.