Les squatts ont été cassés hier. Le bétonnage du bocage se fera, ainsi l'a proclamé M. Normal du haut de ses hésitations définitives, au motif de la virilité bafouée du Premier ministre en charge et conjointement promoteur de cette connerie majuscule : l'aéroport Notre Dame des Landes. Notre distingué lectorat, rebuté sans doute par le détail des chicayas d'aménagement technocratique du territoire qui datent de cinquante ans déjà (1965), mérite une synthèse : Les 1650 hectares, condamnés à flatter l'orgueil de M. Ayrault pour les deux générations qui viennent, permettent d'abord de libérer 600 hectares de promotion immobilière en périphérie immédiate de la grande ville de Nantes, occupés par l'aéroport actuel sous-utilisé : Gatwick¹ trafique dix fois plus d'avions sur la même emprise au sol ! Mais qu'importe ! Les élus de terrain vont y gagner deux fois, sur les travaux du nouvel aéroport et ses accès, sur les travaux d'urbanisation. Dans "urbanisation" il y a "urba", un savoir-faire certain.
Le Grenelle de l'environnement avait décidé le gel de tous aéroports en France, ce qui se justifiait entre autres considérations écologiques par une anticipation de croissance faible dans un pays saigné à blanc par la mondialisation qu'il n'a jamais su affronter. Dont acte, à l'exception notable de la dérogation que M. Fillon, prédécesseur de M. Ayrault à Matignon, avait donné à ce dernier par solidarité régionale puisque le morne et le triste sont tous deux des Pays de Loire. Place dès lors aux bulldozers ! Et qu'on ne vienne pas dire que les crédits pour les infrastructures d'approche n'existent pas, et n'existeront sans doute pas si l'on compte sur un soutien européen à budget fixe, parce que ce n'est pas le sujet. Ne pas tout mélanger non plus !
Dans un pays très décrié pour sa politique sociale, on tire d'abord les routes, les trains et les bus vers le grand chantier de la ville nouvelle, après avoir enfoui les câbles d'énergie et de communications, ce qui en permet l'accès facile aux ouvriers, aux camions et tous engins pendant les travaux, puis aux habitants qui vont y venir ! C'est la Chine, beurk ! ND des Landes est un projet de 580 millions d'euros au départ (source Le Figaro). Les approches (voie rapide à grand débit, train-tram et/ou LGV vers Rennes) coûteraient dans les trois milliards en plus. Les génies de la Loire n'en ont pas la queue d'un.
Il est proprement sidérant de voir des infrastructures de développement lourd et pérenne comme le canal Seine-Nord et le port logistique au confluent de l'Oise (clic), annulées au profit d'un sursaut d'orgueil dans un cul-de-sac. L'avenir est sur l'eau, plus besoin de transporter la viande qui contient les idées comme avant, il y a maintenant Internet pour échanger intelligence et sympathie, même si la chaleur humaine n'est pas encore électronique. Le monde est en révolution et donc en désordre ; il faut privilégier la cohérence d'une politique nationale, et ce gouvernement à juste titre veut ré-industrialiser notre pays d'ingénieurs. Alors faisons-le avec les moyens disponibles et cessons les dépenses somptuaires à la gloire d'édiles sous-calibrés. Apparemment notre petit prof d'allemand n'est pas branché au bon voltage ; mais de ça nous n'avions plus de doutes au bout de six mois d'une besogne laborieuse et stérile à la fin.
(1) Que dire de Kai Tak, l'ancien aéroport de Hong Kong sur 350ha (mais avec la piste réclamée en plus sur la baie, d'accord) qui deux ans avant son transfert à Chek Lap Kok (6/7/98) passait 29,5 millions de passagers et 1,56 millions de tonnes de fret commercial. Certes, ce n'étaient pas des miquets dans la tour de contrôle et tout au sol s'évacuait à grand débit faute d'espace de stockage. Avec seulement 3246112 passagers (2011), Nantes-Atlantique a encore de la marge si on veut bien travailler plus.