Terrible nouvelle dans les cours princières qui se réchauffent à l'âtre des dynastes, le feu s'éteint, les bûches sont trempées, la fumée âcre est irrespirable. Dieu a versé sa tonne d'eau par le conduit de la cheminée ! Et la volaille de décamper emportant à Coblence, faux écus, médailles d'ordres, titres d'attente et courtoisie, marquis poudrés, comtes ossus et gras eunuques. On vient de fracasser la double porte d'entrée à la masse d'armes. Sauve qui peut ! Le Mérovingien revient !
Note liminaire
Combien de fois ai-je écrit dans ma tête l'amorce de ce récit pour traverser mes insomnies ? Et s'il revenait ? L'affaire est de longue mèche pour ce qui concerne le piéton du roi puisque Emma Calvet était une amie de son grand-père, en tout bien tout honneur, la belle cantatrice étant par ailleurs soupçonnée d'indulgences privées envers l'abbé Saunière, curé de Rennes-le-Château (Aude), embringué dans de curieuses histoires de fouilles à la charnière du siècle dernier... Vous suivez ? Non ! Je dois donc vous parler de L'Enigme sacrée, thèses et synthèse de Lincoln, Baigent et Leigh (le Graal) qui donna matière plus tard au Da Vinci Code ? Que ces mecs soient des fondus du New Age et des Druides ne doit pas dissimuler la réalité de l'excavation historique, le reste est attraction :
De tous temps, les natifs du Razès, pays dépendant de Limoux, ont cru que sous la montagne avait été caché un trésor important par les vieux rois. Des procès documentés existent qui attestent de recherches fébriles au XIV°siècle, et même du faux-monnayage en quantité à partir de métal local. L'abbé Saunière exilé à Rennes-le-Château, tout près de son village natal, par l'évêque qui voulait brider sa carrière ecclésiastique en le dotant d'une paroisse misérable pourvue d'un presbytère inhabitable, était comme tous les gens du cru imprégné de cette légende. Venait de paraître en 1880 un ouvrage de référence sur l'histoire locale "le Comté du Razés et le diocèse d'Alet – Notices historiques" par l'historien Louis Fédié qui parle du camp fort monté à Rhedae par la horde wisigothe dès l'invasion de la Narbonaise, verrou militaire qui prendra autant d'importance que Carcassonne au fil des guerres. Or en retapant son église délabrée au milieu de l'ancien oppidum avec l'aide de paroissiens affligés de l'état de décrépitude du lieu, il découvre quelque chose en 1887 en rénovant l'autel sur un don de 700 francs-or de Marie Cavailhé de Coursan. Fondit-il sa trouvaille en bel argent sonnant et trébuchant comme les neveux du pape Benoît XII l'avaient fait en 1340 dans le comté, ou bien y avait-il autre chose ? La réponse est oui.
Des parchemins extraits par les maçons d'un pilier wisigothique et communiqués en calques à la mairie par le curé-archéologue, déroulent la généalogie mérovingienne après le roi Dagobert II, l'un de ceux-ci portant le sceau de Blanche de Castille, princesse de sang wisigothique mêlé au sang noir des Maures, devenue reine de France en 1223. S'y trouve aussi le testament d'un seigneur d'Hautpoul baron de Rennes sur un acte authentique rédigé par un notaire d'Espéraza donnant la suite de la généalogie mérovingienne de 1200 à 1644. Et d'autres papiers disparus depuis dans l'incendie des archives municipales. Ceux-ci¹ continuent-ils la descendance mérovingienne jusqu'à l'époque de Bérenger Saunière ?
PRESOMPTIONS
De convictions légitimistes mais de mœurs dissolues qui lui vaudront sa suspension a divinis en 1911, Saunière captait des dons de la noblesse ancienne par l'entremise de son frère Alfred bien plus impliqué que lui dans l'agitation royaliste du Languedoc, qui avait ses entrées chez la marquise du Bourg de Bozas et chez le vénérable marquis de Chefdebien qui était lui-même reçu à Frohsdorf. Lors des procès Saunière de 1910 et 1911 à l'officialité de Carcassonne, on avancera une estimation des sommes recueillies par Alfred à cinquante-cinq mille francs-or. On notera un don de trois mille francs-or de la comtesse de Chambord apporté en 1886 à Rennes par l'archiduc d'Autriche-Hongrie Johann de Habsbourg. Que produit-il donc ce petit curé d'un village paumé ignoré du monde pour convaincre quelqu'un d'aussi sérieux que la Princesse de Modène ? Les fouilles à succès confirmaient-elles une hypothèse discrète diffusée antérieurement à la haute société légitimiste, qui dès lors confirmée, allait débonder subitement les bourses de ces messieurs-dames ? La fortune conséquente de Saunière - il n'en finit plus de bâtir (675000 Frs-or de travaux) - ne peut venir seulement d'intentions de messe détournées, de pillage de sépultures dans le cimetière communal, de creusements en rase campagne au su de tous, sauf... sauf s'il était aussi médium et faisait revenir les morts, mais on ne dispose pas d'éléments le prouvant, mises à part des acquointances spirites bien à la mode du temps. Ce temps était aux sociétés secrètes, à l'ésotérisme, aux tarots, à l'occultisme, aux vapeurs d'éther. Emma Calvé fit partie un moment de l'Ordre martiniste qui dégénéra plus tard en Rose-Croix. Elle vint à Rennes. On invoquait les esprits, on croyait aux prophéties et apparitions, on fouillait la gnose en tous sens, on tournait les guéridons. Bien que sincèrement croyant, Bérenger Saunière partit sans les derniers sacrements que son confesseur lui refusa. Ce fait, très grave pour un prêtre, n'est pas souvent relevé. Beaucoup d'argent circulait dans les sphères hermétiques : Saunière parvint-il à détourner le ruisseau de la crédulité humaine vers la roue du moulin par des invocations inappropriées ? Je le crois. Je ne le prouve pas. Quoique !
AU-DELÀ DES ETOILES
A la suite de l'invention des parchemins du pilier, Bérenger Saunière monte à Paris en 1891 pour les faire déchiffrer (certains disent que c'est son frère Alfred qui s'en chargea). C'est d'ailleurs lors de ce voyage qu'il aurait rencontré Emma Calvé et son amant Jules Bois, érudit hermétiste de renom. Lui ou son frère revient de la capitale avec une reproduction du tableau de Nicolas Poussin, Les Bergers d'Arcadie, dans sa seconde facture. La tombe arcadienne porte une inscription énigmatique que Saunière avait déjà trouvée sur une dalle du cimetière couvrant la tombe de la marquise de Blanchefort : ET IN ARCADIA EGO. Ce tableau se déchiffre savamment et dévoile en fait une porte du Ciel dans une topographie précise (voir le complément n°4 en note) si on est capable de situer la tombe du tableau dans le pays. Bérenger est né à Montazels tout à côté et connaît ce pays comme sa poche. Justement, l'emplacement qui correspond le mieux au tableau se situe aux Pontils (près de Serres). Si parfaitement qu'il fut occupé plus tard par un gros cénotaphe de pierre ressemblant à la tombe arcadienne de Poussin, ouvrage construit au début des années 1930 par le propriétaire des lieux, un Américain un peu allumé du nom de Louis Lawrence, sous lequel un caveau creusé en 1903 et libéré ensuite lui permit d'y déposer la momie de sa propre mère faite maison et deux chats. Envahi de curieux venus faire les géomètres-experts et d'égyptologues au petit pied, le successeur des Lawrence rasa l'ouvrage en 1988 et bétonna. Au lieu de ça, j'aurais ouvert une buvette !
A côté de ce mystère, un dessin de Léonard de Vinci, esprit universel et initié s'il en fut, trouvé dans un de ses carnets (Codex Madrid II), donne aussi précisément le même passage entre Ciel et Terre (voir le complément n°6 en note). Ce lieu, marqué d'un trait vertical sur le dessin, est dans la chaîne du Bugarach qui fait face à Rennes-le-Château. C'est le passage des âmes montantes dans un sens, la visite des revenants dans l'autre. Que vous ne le croyiez pas n'est pas important, mais à l'époque citée, les gens y croyaient, autant que jadis le peintre Nicolas Poussin qui multiplie les énigmes sur la toile en jouant par exemple des ombres portées. L'abbé sut-il tirer partie de ses découvertes auprès d'esprits torturés ou simplement malheureux... mais à l'aise ? Le deuil peut rendre fou. C'est encore une piste de sa fortune, même si elle ne nous avance pas dans la quête du roi perdu.
Quoiqu'il en soit, il avait capté, outre quelque magot en numéraire déterré qui permit de signer des traites pour travaux - les ouvriers ont témoigné d'une oule remplie de vieilles pièces d'or dans le sol de l'église - un secret valant très cher, et ce secret avait bien un rapport avec la descendance mérovingienne et l'occultisme contemporain, les monumens précités et ses fréquentations y convergent.
On a pu penser un moment que le parchemin perdu n'était pas autre chose que la Charte d'Alaon de Charles le Chauve qui passait par les femmes le sang de Mérovée chez les ducs d'Aquitaine, les ducs de Vasconie, les princes d'Aragon et deux rois wisigoths d'Espagne, Blanche de Castille remontant ce sang en France. Il s'avéra que la charte était une fabrication du XVII° siècle au bénéfice des ducs d'Aquitaine, dans quel but je l'ignore, mais démontée par l'historien Joseph-François Rabanis sous le Second Empire. Saunière et ses clients s'intéressaient-ils aux vieilles dynasties revenues dans l'actualité ? Chambord, mort en 1883, n'était-il pas né duc de Bordeaux ? "Un signe qui ne trompe pas" ? Etc. Des escrocs comme Plantard ne s'y sont pas trompés eux, qui montèrent l'affaire du Prieuré de Sion en amalgamant le sangreal (ou graal), la famille de Jésus et Marie-Madeleine, l'Arche d'alliance pillée au sac de Rome en 410 et tout ce qui pouvait plaire et intriguer. Ils crurent en vivre grassement ; mais tout ce monde n'a pas eu le génie de l'abbé Saunière ou de Dan Brown.
Marie Dénarnaud, sa jolie bonne et maîtresse analphabète, une fois veuve, accueillit sa famille à la villa Béthania mais partagea l'héritage Saunière² à sa façon en disant à ses paroissiens que "de l'or à Rennes, ils marchaient dessus sans le savoir". Par cette confirmation, on n'imagine pas la fièvre qui s'empara du lieu, à coup de pioches mais aussi de triangulations savantes, déchiffrage d'épithaphes, anamorphose des paysages... Il n'empêche que le Haut Razès fut effectivement une Justice wisigothe d'importance, surplombée par l'oppidum de Rhedae, l'actuelle Rennes-le-Château (voir dans le complément n°8 en note), où l'on pouvait défendre des biens de valeur enfouis à dessein. Emma Calvet n'eut rien, qui mourut dans le dénuement à Millau (Aveyron) dans les bras de mon grand-père - ce qui n'est pas vrai mais aurait fait drôlement bien dans cet article. Revenons à nos moutons dynastiques.
SYNTHESE
Quand on prend de la hauteur, en gravissant le Pech de Bugarach pour s'aérer l'esprit par exemple, on peut partir de l'hypothèse crédible (et que les parchemins perdus allaient vérifier) que la dynastie mérovingienne aurait perduré jusqu'à la fin du Second Empire assez visiblement pour un œil exercé jusqu'à pouvoir dresser une généalogie acceptable, ce qui expliquerait l'engouement légitimiste pour Rennes-le-Château dès 1886 et le don important cette année-là de la comtesse de Chambord (l'invention du trésor et de la preuveétant de 1887). Chambord n'ayant pas eu d'enfant, la veine légitimiste renaissait à côté de l'usurpation latente des D'Orléans. Allons-y, Saunière vendait des espérances³ comme d'autres avant lui le firent en indulgences. Mais quelles sont-elles ? Et pourquoi les Mérovingiens ?
Cette première race des rois fut toujours à son époque reliée à la dynastie du roi David pour des raisons qu'il serait trop long d'expliquer ici ; ses princes portaient les cheveux longs comme l'Absalom de l'Ancien Testament. Seule cette race apparaît dans les fouilles de l'abbé Saunière et si l'oppidum est bien loin du pays franc, il en est ainsi relativement protégé. La connexion est très possible, et il y a la pierre tombale dont nous parlons ensuite. Les Mérovingiens comme d'autres familles régnantes ont eu un grand nombre d'enfants légitimes ou pas - la distinction n'était importante que pour la loi d'héritage - et il est plus que probable que leurs descendants soient nombreux encore aujourd'hui, même si le sang s'est considérablement dilué. Jusqu'à l'avènement des Capétiens, le sang des rois chevelus réputé davidique fut soigneusement préservé en faisant épouser leurs femmes par les puissants de la cour. Hugues Capet a du sang mérovingien par les deux voies : son ancêtre Robert le Fort a lui-même pour ascendant établi un référendaire du roi Dagobert de Neustrie au VIIe siècle du nom de Lambert.
Jusqu'aux Capétiens c'est donc limpide : Clovis 1er -> Clotaire 1er -> Chilpéric 1er -> Clotaire II -> Dagobert 1er -> Clovis II -> Thierry III -> Berthe, épouse Caribert, comte de Laon -> Caribert de Laon -> Berthe de Laon, épouse Pépin le Bref -> Carloman II -> Cunégonde, épouse Guillaume de Géllonnne -> Cunégonde, épouse Bernard 1er, Roi d'Italie -> Pépin le Bref -> Herbert 1er, comte de Vermandois -> Béatrice de Vermandois, épouse le roi de France Robert 1er -> Hugues le Grand -> Hugues Capet...
On voit que la déviation n'attend pas la déposition de Childéric III et son fils Thierry disparu et tondu, dit-on, par saint Wandon au monastère de Fontenelle (plus tard Saint-Wandrille, Basse Seine). La Providence ou le Hasard aurait-elle sauvé la lignée mâle des rois chevelus bien avant que Pépin le Bref ne l'éteigne. Peut-être la dalle des chevaliers que l'abbé Saunière retourna devant l'autel, transcrit-elle pour les générations futures ce sauvetage d'un enfant mérovingien apporté au Razès par deux cavaliers chevauchant le même destrier, comme le firent plus tard les Templiers au combat... On ne voit aucun motif à transporter l'enfant d'aucune autre race non éteinte à l'époque carolingienne (celle de la dalle). Alors que Thierry de Childéric III est réputé le dernier scion de la dynastie perdue, il est possible qu'une branche antérieure se soit échappée des palais dangereux du Nord. Les descendances ducales entrent aussi en ligne de compte et les possibilités sont infinies. Toute prétention actuelle de l'un des descendants devrait être raccord avec une généalogie confirmée dans le codex salique (le vrai), ce qui n'est pas du domaine de l'impossible, d'autant que les Carolingiens s'en prévalaient par leurs épousailles et ne détruisaient pas ces preuves. Donc le Mérovingien-qui-vient est une possibilité parmi les rois cachés de légende qui voudraient bien se laisser découvrir. Il s'appellera Thierry V puisque depuis la séquestration du fils de Childéric III à Fontenelle ils se passent ce nom ainsi que le font les papes d'Avignon depuis le concile de Constance en s'appelant tous Benoît, si Jean Raspail a bien compris le grand schisme d'occident. Peut-être ce roi souterrain est-il l'un des lecteurs de Royal-Artillerie. Les lois de la généalogie (3,5 générations par siècle et 2 enfants procréant par génération en progression arithmétique) donnent une multitude de Mérovingiens et comme le dicton nous l'assure : nous descendons chacun d'un roi et d'un pendu.
Mais la royauté n'est pas un haras. Si la monarchie héréditaire encadrée de lois spécifiques de succession est le meilleur modèle à long terme en France, le redémarrage du logiciel convoque plus que la force au tournoi de chevalerie, l'intelligence, l'éducation, la formation à l'emploi et un doigt de grâce divine. Ce qui laisse ouvertes toutes les opportunités, même non-LOF.
BOURBONS
On ne peut conclure un article survivantiste sans évoquer la survie hypothétique du fils de Louis XVI qui aurait été exfiltré du Temple à Paris pour servir de gage à ses ravisseurs. L'énigme de Rennes-le-Château ne croise pas celle du petit dauphin. De nombreuses études ont été consacrées aux traces de cette survivance, dont la plus sûre est celle de Charles Barbanes* ; mais aucune n'a abouti à la production d'une preuve irréfutable même si les faisceaux de présomptions sont étayés. Ce qui est finalement mineur pour la raison suivante :
Si l'on veut bien resserrer l'hypothèse autour de son intérêt dynastique et oublier la révélation historique qui ferait gagner beaucoup d'argent aux inventeurs, la branche bourbonienne de Louis XVII n'a pas d'utilité pour le moment et ce pour trois raisons :
Epilogue
En l'an 966, l'abbé Maynard quitte Saint-Wandrille de Fontenelle pour prendre ses fonctions de premier abbé au Mont-Saint-Michel. Ce signe ne trompe pas. Le roi Thierry V devrait y être normalement sacré comme nous le proposait Rodolphe Crevelle** dans un de ses délires fameux, et y résider sans doute si la monarchie se départissait de son caractère héréditaire familial au bénéfice d'une monarchie thaumaturgique élective et cloîtrée. Mais nous n'y sommes pas rendus. Reste que le Mérovingien caché serait le plus sûr élan vers une restauration puisqu'il n'aurait pas à nous vendre le bilan contesté d'une dynastie déposée par son propre peuple, trois fois en France, deux fois en Espagne.
Note liminaire
Combien de fois ai-je écrit dans ma tête l'amorce de ce récit pour traverser mes insomnies ? Et s'il revenait ? L'affaire est de longue mèche pour ce qui concerne le piéton du roi puisque Emma Calvet était une amie de son grand-père, en tout bien tout honneur, la belle cantatrice étant par ailleurs soupçonnée d'indulgences privées envers l'abbé Saunière, curé de Rennes-le-Château (Aude), embringué dans de curieuses histoires de fouilles à la charnière du siècle dernier... Vous suivez ? Non ! Je dois donc vous parler de L'Enigme sacrée, thèses et synthèse de Lincoln, Baigent et Leigh (le Graal) qui donna matière plus tard au Da Vinci Code ? Que ces mecs soient des fondus du New Age et des Druides ne doit pas dissimuler la réalité de l'excavation historique, le reste est attraction :
De tous temps, les natifs du Razès, pays dépendant de Limoux, ont cru que sous la montagne avait été caché un trésor important par les vieux rois. Des procès documentés existent qui attestent de recherches fébriles au XIV°siècle, et même du faux-monnayage en quantité à partir de métal local. L'abbé Saunière exilé à Rennes-le-Château, tout près de son village natal, par l'évêque qui voulait brider sa carrière ecclésiastique en le dotant d'une paroisse misérable pourvue d'un presbytère inhabitable, était comme tous les gens du cru imprégné de cette légende. Venait de paraître en 1880 un ouvrage de référence sur l'histoire locale "le Comté du Razés et le diocèse d'Alet – Notices historiques" par l'historien Louis Fédié qui parle du camp fort monté à Rhedae par la horde wisigothe dès l'invasion de la Narbonaise, verrou militaire qui prendra autant d'importance que Carcassonne au fil des guerres. Or en retapant son église délabrée au milieu de l'ancien oppidum avec l'aide de paroissiens affligés de l'état de décrépitude du lieu, il découvre quelque chose en 1887 en rénovant l'autel sur un don de 700 francs-or de Marie Cavailhé de Coursan. Fondit-il sa trouvaille en bel argent sonnant et trébuchant comme les neveux du pape Benoît XII l'avaient fait en 1340 dans le comté, ou bien y avait-il autre chose ? La réponse est oui.
Des parchemins extraits par les maçons d'un pilier wisigothique et communiqués en calques à la mairie par le curé-archéologue, déroulent la généalogie mérovingienne après le roi Dagobert II, l'un de ceux-ci portant le sceau de Blanche de Castille, princesse de sang wisigothique mêlé au sang noir des Maures, devenue reine de France en 1223. S'y trouve aussi le testament d'un seigneur d'Hautpoul baron de Rennes sur un acte authentique rédigé par un notaire d'Espéraza donnant la suite de la généalogie mérovingienne de 1200 à 1644. Et d'autres papiers disparus depuis dans l'incendie des archives municipales. Ceux-ci¹ continuent-ils la descendance mérovingienne jusqu'à l'époque de Bérenger Saunière ?
PRESOMPTIONS
L'abbé Saunière |
AU-DELÀ DES ETOILES
Rhedae - Rennes-le-Château |
A côté de ce mystère, un dessin de Léonard de Vinci, esprit universel et initié s'il en fut, trouvé dans un de ses carnets (Codex Madrid II), donne aussi précisément le même passage entre Ciel et Terre (voir le complément n°6 en note). Ce lieu, marqué d'un trait vertical sur le dessin, est dans la chaîne du Bugarach qui fait face à Rennes-le-Château. C'est le passage des âmes montantes dans un sens, la visite des revenants dans l'autre. Que vous ne le croyiez pas n'est pas important, mais à l'époque citée, les gens y croyaient, autant que jadis le peintre Nicolas Poussin qui multiplie les énigmes sur la toile en jouant par exemple des ombres portées. L'abbé sut-il tirer partie de ses découvertes auprès d'esprits torturés ou simplement malheureux... mais à l'aise ? Le deuil peut rendre fou. C'est encore une piste de sa fortune, même si elle ne nous avance pas dans la quête du roi perdu.
La jolie bonne du curé |
On a pu penser un moment que le parchemin perdu n'était pas autre chose que la Charte d'Alaon de Charles le Chauve qui passait par les femmes le sang de Mérovée chez les ducs d'Aquitaine, les ducs de Vasconie, les princes d'Aragon et deux rois wisigoths d'Espagne, Blanche de Castille remontant ce sang en France. Il s'avéra que la charte était une fabrication du XVII° siècle au bénéfice des ducs d'Aquitaine, dans quel but je l'ignore, mais démontée par l'historien Joseph-François Rabanis sous le Second Empire. Saunière et ses clients s'intéressaient-ils aux vieilles dynasties revenues dans l'actualité ? Chambord, mort en 1883, n'était-il pas né duc de Bordeaux ? "Un signe qui ne trompe pas" ? Etc. Des escrocs comme Plantard ne s'y sont pas trompés eux, qui montèrent l'affaire du Prieuré de Sion en amalgamant le sangreal (ou graal), la famille de Jésus et Marie-Madeleine, l'Arche d'alliance pillée au sac de Rome en 410 et tout ce qui pouvait plaire et intriguer. Ils crurent en vivre grassement ; mais tout ce monde n'a pas eu le génie de l'abbé Saunière ou de Dan Brown.
Marie Dénarnaud, sa jolie bonne et maîtresse analphabète, une fois veuve, accueillit sa famille à la villa Béthania mais partagea l'héritage Saunière² à sa façon en disant à ses paroissiens que "de l'or à Rennes, ils marchaient dessus sans le savoir". Par cette confirmation, on n'imagine pas la fièvre qui s'empara du lieu, à coup de pioches mais aussi de triangulations savantes, déchiffrage d'épithaphes, anamorphose des paysages... Il n'empêche que le Haut Razès fut effectivement une Justice wisigothe d'importance, surplombée par l'oppidum de Rhedae, l'actuelle Rennes-le-Château (voir dans le complément n°8 en note), où l'on pouvait défendre des biens de valeur enfouis à dessein. Emma Calvet n'eut rien, qui mourut dans le dénuement à Millau (Aveyron) dans les bras de mon grand-père - ce qui n'est pas vrai mais aurait fait drôlement bien dans cet article. Revenons à nos moutons dynastiques.
SYNTHESE
Terribilis Est Locus Iste |
Cette première race des rois fut toujours à son époque reliée à la dynastie du roi David pour des raisons qu'il serait trop long d'expliquer ici ; ses princes portaient les cheveux longs comme l'Absalom de l'Ancien Testament. Seule cette race apparaît dans les fouilles de l'abbé Saunière et si l'oppidum est bien loin du pays franc, il en est ainsi relativement protégé. La connexion est très possible, et il y a la pierre tombale dont nous parlons ensuite. Les Mérovingiens comme d'autres familles régnantes ont eu un grand nombre d'enfants légitimes ou pas - la distinction n'était importante que pour la loi d'héritage - et il est plus que probable que leurs descendants soient nombreux encore aujourd'hui, même si le sang s'est considérablement dilué. Jusqu'à l'avènement des Capétiens, le sang des rois chevelus réputé davidique fut soigneusement préservé en faisant épouser leurs femmes par les puissants de la cour. Hugues Capet a du sang mérovingien par les deux voies : son ancêtre Robert le Fort a lui-même pour ascendant établi un référendaire du roi Dagobert de Neustrie au VIIe siècle du nom de Lambert.
Jusqu'aux Capétiens c'est donc limpide : Clovis 1er -> Clotaire 1er -> Chilpéric 1er -> Clotaire II -> Dagobert 1er -> Clovis II -> Thierry III -> Berthe, épouse Caribert, comte de Laon -> Caribert de Laon -> Berthe de Laon, épouse Pépin le Bref -> Carloman II -> Cunégonde, épouse Guillaume de Géllonnne -> Cunégonde, épouse Bernard 1er, Roi d'Italie -> Pépin le Bref -> Herbert 1er, comte de Vermandois -> Béatrice de Vermandois, épouse le roi de France Robert 1er -> Hugues le Grand -> Hugues Capet...
On voit que la déviation n'attend pas la déposition de Childéric III et son fils Thierry disparu et tondu, dit-on, par saint Wandon au monastère de Fontenelle (plus tard Saint-Wandrille, Basse Seine). La Providence ou le Hasard aurait-elle sauvé la lignée mâle des rois chevelus bien avant que Pépin le Bref ne l'éteigne. Peut-être la dalle des chevaliers que l'abbé Saunière retourna devant l'autel, transcrit-elle pour les générations futures ce sauvetage d'un enfant mérovingien apporté au Razès par deux cavaliers chevauchant le même destrier, comme le firent plus tard les Templiers au combat... On ne voit aucun motif à transporter l'enfant d'aucune autre race non éteinte à l'époque carolingienne (celle de la dalle). Alors que Thierry de Childéric III est réputé le dernier scion de la dynastie perdue, il est possible qu'une branche antérieure se soit échappée des palais dangereux du Nord. Les descendances ducales entrent aussi en ligne de compte et les possibilités sont infinies. Toute prétention actuelle de l'un des descendants devrait être raccord avec une généalogie confirmée dans le codex salique (le vrai), ce qui n'est pas du domaine de l'impossible, d'autant que les Carolingiens s'en prévalaient par leurs épousailles et ne détruisaient pas ces preuves. Donc le Mérovingien-qui-vient est une possibilité parmi les rois cachés de légende qui voudraient bien se laisser découvrir. Il s'appellera Thierry V puisque depuis la séquestration du fils de Childéric III à Fontenelle ils se passent ce nom ainsi que le font les papes d'Avignon depuis le concile de Constance en s'appelant tous Benoît, si Jean Raspail a bien compris le grand schisme d'occident. Peut-être ce roi souterrain est-il l'un des lecteurs de Royal-Artillerie. Les lois de la généalogie (3,5 générations par siècle et 2 enfants procréant par génération en progression arithmétique) donnent une multitude de Mérovingiens et comme le dicton nous l'assure : nous descendons chacun d'un roi et d'un pendu.
Mais la royauté n'est pas un haras. Si la monarchie héréditaire encadrée de lois spécifiques de succession est le meilleur modèle à long terme en France, le redémarrage du logiciel convoque plus que la force au tournoi de chevalerie, l'intelligence, l'éducation, la formation à l'emploi et un doigt de grâce divine. Ce qui laisse ouvertes toutes les opportunités, même non-LOF.
BOURBONS
Chou d'Amour |
Si l'on veut bien resserrer l'hypothèse autour de son intérêt dynastique et oublier la révélation historique qui ferait gagner beaucoup d'argent aux inventeurs, la branche bourbonienne de Louis XVII n'a pas d'utilité pour le moment et ce pour trois raisons :
- soit ces gens existent bien, mais ne savent pas qui ils sont ;
- soit ils ne désirent aucunement manifester leur état depuis deux siècles pour diverses raisons personnelles ;
- soit leur branche est maintenant éteinte (la génétique très consanguine antérieure n'aurait pas favorisé leur perpétuation).
Epilogue
En l'an 966, l'abbé Maynard quitte Saint-Wandrille de Fontenelle pour prendre ses fonctions de premier abbé au Mont-Saint-Michel. Ce signe ne trompe pas. Le roi Thierry V devrait y être normalement sacré comme nous le proposait Rodolphe Crevelle** dans un de ses délires fameux, et y résider sans doute si la monarchie se départissait de son caractère héréditaire familial au bénéfice d'une monarchie thaumaturgique élective et cloîtrée. Mais nous n'y sommes pas rendus. Reste que le Mérovingien caché serait le plus sûr élan vers une restauration puisqu'il n'aurait pas à nous vendre le bilan contesté d'une dynastie déposée par son propre peuple, trois fois en France, deux fois en Espagne.
Suffira-t-il d'y croire ?
Pour creuser la question en passant un bon moment, nous suggérons les liens suivants (mais il y en a cent autres):
1.- La vie extraordinaire de l'abbé Saunière
2.- La bibliothèque de Béranger Saunière dans la Tour Magdala
3.- Alfred Saunière et Chefdebien de la Société Perillos
4.- Les bergers d'Arcadie de Nicolas Poussin(tableau acheté par Louis XIV pour être placé dans sa chambre)
5.- Vrais et faux mystères de Rennes-le-Château
6.- Le site "gothique" de la légende RLC qu'il faut cribler
7.- Le voyage caché de Vinci au Pech de Bugarach
8.- Rennes-le-Château, une affaire paradoxale, l'analyse ultime
Avertissement : Ce billet a été rédigé par amitié pour nos lecteurs survivantistes qui pourraient résoudre bien des tracas en enterrant la Querelle dynastique si leurs travaux aboutissaient. Ce n'est pas un travail d'historien et il ne sera donc pas développé plus en détails parce qu'il n'est pas dans la ligne de propagande monarchiste du blogue Royal-Artillerie, et que le temps nous est compté. À eux de prendre ce billet comme il vient. Merci.
Notes :
(1) On cite souvent le "grand parchemin" et le "petit parchemin" rédigés en langue cryptée
(2) Marie Ménarnaud disposa à son gré de la succession Saunière que la famille de l'abbé avait refusée
(3) Les Bourbons d'Espagne régnaient alors à Madrid et y étaient contenus par la Paix d'Utrecht
(*) Louis XVII - Autopsie d'une fausse vérité par Charles Barbanes, chez Chiré 2017
(**) Lys Noir n°13, page 16 sinon texte en secours (clic)