Quantcast
Channel: Royal Artillerie Blog
Viewing all 1224 articles
Browse latest View live

Le Bhoutan a voté

$
0
0
Sauf les moines et les nonnes retranchés des listes électorales par la Constitution de 2008, les Bhoutanais ont voté jeudi dernier pour députer quarante-sept des leurs à l'Assemblée nationale de Thimphou. Contrairement à une opinion répandue dans les médias occidentaux chaque fois qu'une nation nous imite, le régime parlementaire fondé sur le suffrage universel ne fait pas l'unanimité des sujets du roi-dragon, qui sont plus nombreux que partout ailleurs à penser aujourd'hui, avec un recul de dix ans, que le modèle démocratique a surtout apporté des disputes, des discordes, et une effervescence stérile jusque dans les familles, sans même citer une insupportable démagogie des candidats en campagne que ces montagnards détectent de loin.

Qui promet d'asphalter la route, d'agrandir l'école primaire ou d'augmenter le débit de l'eau de ville est vite vu comme celui qui justifiera demain une hausse des impôts afin que les usagers subviennent eux-mêmes aux promesses électorales réalisées. Les deux défis du pays sont la santé avec la carte sanitaire et le sous-emploi qui force à partir. Nul ne comprend vraiment en quoi la transformation de la monarchie absolue antérieure en une monarchie constitutionnelle avec parlement bicaméral accroît les chances d'avancer vers la solution de ces deux vrais problèmes. La surenchère des programmes, le porte à porte des agents électoraux avec du riz, du bétel ou des gâteaux sucrés ne convainc pas ; à dire vrai certains commencent à imaginer qu'on les méprise assez pour les prendre à l'hameçon d'un paquet de clopes !

Une des plus belles reines du monde
C'est le roi Jigme Singye Wangchuck qui décida du bonheur obligatoire, puis de moderniser le régime tout en le bhoutanisant : il expulsa manu militari des communautés népalaises et assamaises qui profitaient sans titres de l'accueil bhoutanais pour déstabiliser leurs pays d'origine. Sur ce, il abdiqua en faveur de son fils (sans attendre le deuil de la nation) lequel fut chargé d'exécuter l'idée. Si on juge le succès de l'entreprise à la participation des inscrits (71,46% cette fois), la phase de choix des représentants fonctionne. Qu'en fait-on ensuite est une autre histoire.

Ce "petit" pays de 760.000 habitants répartis sur un territoire plus grand que notre région PACA n'est pas très riche mais debout. Avait-il besoin d'adopter les simagrées démocratiques pour s'en sortir plus vite ? Il y a des fondamentaux difficiles à ignorer comme la géographie himalayenne, la fertilité des sols ou la force de travail éduquée que le changement paradigme ne transformera pas. Une sortie par le haut semble possible par l'éducation de pointe afin de distinguer ce peuple fier des masses miséreuses de la plaine alluviale du Brahmapoutre ; elle ne convoque en rien un régime plutôt qu'un autre pour y parvenir, sauf à croire, comme moi, qu'un despote éclairé dans la grande tradition frédéricienne a fait ses preuves dans les pires difficultés comme nous l'enseigne l'histoire.
Croire au bonheur par le prince plus que par la foule !




Pour les lecteurs impatients, le résultat des législatives vient de tomber : on peut cliquer ici.



Élections afghanes, un défi aux ténèbres

$
0
0
Jeune fille Nouristanie
Les élections afghanes en cours sont pour Royal-Artillerie une projection de l'analyse du 3 février 2012 quand nous expliquions (ou tentions de...) la remise des clefs du pays aux autorités afghanes, prévue alors pour 2014. Ceux qui ont du temps peuvent retrouver cet article (un peu long) en cliquant ici. Nous terminions jadis sans espoir : « la donne des trois ans qui viennent pourrait être changée même si à la fin les Talibans reprennent les guides, avec l'appui indéfectible de l'ISI pakistanaise et la résignation de la majorité silencieuse afghane usée par 33 ans de guerre. C'est moche pour les femmes et les fillettes, mais nous aurons tout tenté. ».

On ne comprend rien à la situation actuelle si l'on ignore qui était le mollah Omar (↓2013) à l'origine de toutes choses du côté obscur de la Force. Mohammed Omar était un directeur d'école coranique de Sangesar dans le Kandahar, village où naquit la croisade des Talibans. Homme éduqué (il lisait et parlait l'arabe) c'était un chef religieux charismatique, une référence qui sera promue "Commandeur des Croyants" en 1996 par un concile de 1527 oulémas venus de partout, nous dit la Wikipedia.

Peu porté sur les affaires quotidiennes de pouvoir, il montera rarement à Kaboul où l'essentiel des décisions politiques et militaires seront décidées par la choura* traditionnelle, mais il conservera la production du droit (sharia). Le mouvement taliban ne fut rien d'autre qu'une transposition du rigorisme sunnite aux tribus afghanes, comme il en fut du wahhabisme aux tribus d'Arabie heureuse. Lassée par la guerre russe et la guerre civile de partage des dépouilles, la population (pachtoune en majorité) adhéra sans se faire prier pour voir revenir un certain ordre civil qui flattait ses propres superstitions et ses mœurs archaïques. Femmes et filles (physiquement défavorisées depuis Cromagnon) en souffrirent le plus.
(*) Choura : enceinte de concertation, parlement au sens premier

Puis ce fut la guerre américaine consécutive au Onze-Septembre. Mollah Omar s'était allié à Al-Qaïda contre ses propres idées car il jugeait que l'afflux des djihadistes étrangers était une menace pour la purification des mœurs soviétisées. Hélas pour son intégrité morale, le riche Séoudien Oussama Ben Laden apportait du cash, en veux-tu en voilà, et Ayman al-Zawahiri, le Frère musulman égyptien, le manuel de la guerre asymétrique totale. Mollah Omar, fils de petit paysan né du trou du cul du monde, en fut sans doute impressionné pour leur céder le commandement militaire, jusqu'à la "bavure" des tours jumelles de New York qu'il condamna ouvertement dès lors qu'il prévoyait la suite imparable. Il avait raison, mais les circonstances de l'invasion l'enchaîna à al-Qaïda pour le malheur et le pire.

Après le retrait progressif de l'ISAF (OTAN), corrélé à la montée en puissance des autorités afghanes, l'Etat central afghan se déploya et la modernisation du pays progressa à des vitesses différentes selon les provinces, jusqu'à faire croire que l'affaire allait être gagnée, sauf dans la poche de Falaise ou de Saint-Nazaire. Mais, en souvenir des heures les plus sombres, les chefs talibans ne furent pas conviés au gâteau démocratique et ils se retrouvèrent devant un pays partagé sans eux, comme à l'époque de la guerre civile qui opposa Pachtounes, Ouzbeks, Tadkjiks voire Hazaras, guerre civile qu'ils cessèrent par la force en 2000 au milieu des ruines de Kaboul.

Massoud assassiné par des crouilles en 2001
Depuis la fin de la guerre américaine, les Talibans firent des représentations dans les capitales étrangères pour changer leur image de djihadistes frustres. Ils ont été reçus à Djakarta, Moscou, Téhéran, Doha et des émissaires ont tourné en Europe occidentale. Leur argument de base est qu'ils luttent carrément contre l'Etat islamique (Daesh) dont beaucoup d'éléments se sont repliés dans le chaos afghan. L'autre argument est qu'ils accepteront une place à la choura de Kaboul moyennant négociation - on ne peut se rendre comme à Sedan ! Mais en vain, et pour des raisons confuses qui tiennent sans doute au partage définitif des pouvoirs locaux entre les intérêts établis, ils ont été confinés aux montagnes d'où ils ne descendent qu'à la nuit tombé, comme là-bas, dis ! Alors restent les bombes !

Disons pour être juste que la présidence à Kaboul a fait preuve de bonne volonté en prenant langue avec les chefs talibans ; mais les discussions tournèrent court entre marchands de tapis, peu pressés d'aboutir, qui d'un côté devaient laisser un peu de chantilly sur le gâteau, de l'autre, oublier l'arc de triomphe fleuri de la victoire.

Mais la population ne marche plus dans la combine et endure les exactions des fous de Dieu puisque l'Etat peine à s'imposer partout. Les avancées sociétales et une relative prospérité chassent des esprits le recours à une foi incandescente qui n'a rien développé nulle part ailleurs sauf des comptes suisses. Le terrorisme aveugle désagrège ce qu'il restait d'empathie chez les derniers croyants car le pays en a soupé des guerres pour rien !

Que viennent faire les élections dans ce contexte ?

Les élections, parfaitement inutiles dans un pays bouleversé, deviennent un dérivatif à la dureté des temps et reconnaissons un courage certain aux électeurs qui pénètrent dans les bureaux de vote pour concrétiser l'illusion d'une souveraineté populaire. L'avenir de l'Afghanistan passera par les femmes. Moins encrassées dans leur tête que les hommes qui lisent le coran au premier degré (la nouvelle titrée La Statuette de Sylvain Tesson est cruelle et si vraie), elles sont plus résilientes pour employer un terme de métallurgie. Elles ont une vue claire de leur futur pays et s'inscrivent ouvertement dans le XXI° siècle à leurs risques et périls. Elles opposent le droit naturel à la dictature des clercs. Les reportages abondent dans les arts, les sports et la santé où elles brillent.

Construire une vraie société amalgamant plusieurs nations implantées là depuis la nuit des temps, n'est pas une mince affaire, mais c'est le seul défi à remporter. Le reste est vulgaire.




Le Duc d'Anjou à cœur ouvert

$
0
0

Quelle femme au monde a reçu plus belle déclaration d'amour de son époux pour son anniversaire ?




Muchísimas #felicidades @margaraVS, mi #AmorVerdadero, mi #MediaNaranja, mi #PrincipalApoyo, mi #compañera en este #ViajeDeLaVida.
Gracias por quererme, cuidarme, apoyarme, comprenderme y aconsejarme.
Gracias por estos #HijosMaravillosos, que son el fruto de nuestro #amor y el reflejo de los #valores en los que creemos.
Siempre te querré !

Luis Alfonso de Borbón y Margarita Vargas



Le Brexit tuera le Frexit

$
0
0
Il y a la fable des "Animaux malades de la peste" mais ce n'est rien comparé aux réalités du royaume d'Angleterre malade de la politique. Les parlementaires les plus stupides que la terre ait portés - c'est un concours entre nos démocraties occidentales - sont en train de favoriser l'éclatement du Royaume uni de Grande Bretagne et d'Irlande du Nord, si ce n'est la Grande Bretagne elle-même. C'est bien sûr la tragi-comédie du Brexit qui est à l'origine de ce maelström mais on oublie quand même que la chose prend sa source dans la connerie majuscule de David Cameron, premier ministre jadis, qui vendit ce choix inconséquent à sa majorité parlementaire pour durer. Bien plus que Boris Johnson ou Nigel Farage c'est ce politicard bien propre sur lui que les Britanniques ont à blâmer maintenant, quoiqu'ils aient voté.

- Carte des résultats du référendum du 23/06/2016 -
Passons aux cartes. Si le Brexit au Royaume uni a été approuvé par 51,9% des suffrages exprimés, il est loin d'avoir conquis tout l'espace. La carte des résultats du référendum ci-dessous montre le nuage de nuances et le petit tableau de gauche les pourcentages respectifs des refus de sortir. On voit nettement que l'Ecosse ne sortira pas de l'Union européenne mais du Royaume uni, et que l'Irlande du Nord serait dans les mêmes dispositions mais son cas est trompeur. Les bastions catholiques ont voté contre et ont fait basculer le résultat global de la province. Une carte détaillée le montre bien (clic). Le Pays de Galles est partagé entre sa façade maritime qui commerce avec la République d'Irlande et l'intérieur moins favorisé, ancien pays de mines et d'industries. Mais le plus déterminant est le refus du grand Londres et de nombreux comtés de l'ouest. Quels que soient les débats aux Communes, la solution n'existe pas au sol, dans la vraie vie. La loi élémentaire de la démocratie (majorité plus une voix) va se fracasser sur le mur du bon sens ! Nul ne peut ruiner sans réaction l'électeur d'ici par le vote d'un électeur de là. Il ne s'agit pas de choisir un gouvernement entre partis de gouvernement mais de carrément changer de paradigme jusqu'à mettre en péril, outre la couronne mais c'est secondaire, l'économie et partant, le prestige du Royaume uni.

Si les chefs du Brexit n'ont rien préparé ni étudié et ont quelque part floué leurs électeurs (mais c'est la loi du genre aurait dit Charles Pasqua), les études des conséquences du Brexit sortent chaque jour depuis 2016 et aucune n'y est favorable. Reportez-vous à la presse intelligente pour en connaître le détail, ce serait trop long ici.

David Cameron
Nous n'avons pas invité jadis les Britanniques à nous rejoindre ; ils ont frappé à la porte en 1962 puis en 1967, à une époque où ils étaient très malades (épuisés par la Seconde Guerre mondiale), à tel point qu'il fallut leur faire des cadeaux, puis les exempter de bien des contraintes que les continentaux acceptaient. Le pays avait fini par remonter la pente en réformant son modèle social des Unions sacrées et en profitant le plus possible du grand marché commun. Gavés aujourd'hui à tel point que jusqu'au référendum maudit, tous les entrepreneurs européens rêvaient de la Grande Bretagne, ils s'estiment maintenant vassaux de l'empire et défiés dans leurs mœurs nationales. Qu'ils partent donc ! Faisons-leur cadeau (encore un) du solde de tout compte ! Et nous, asseyons-nous pour fumer un Partagas en regardant s'éloigner les falaises blanches de Douvres !

Si nous, n'y verrons pas grand changement - ne produisant rien ou si peu, ils sont obligés d'importer tout sauf l'ingénierie financière - eux par contre vont faire le grand bond en arrière et plouf ! Dans l'Atlantique ! Négocier du faible au fort avec l'administration Trump, le Foreign Office n'a jamais su. Du faible au fort avec la Chine, du faible au fort avec le Japon ? Et à la fin, du faible au fort avec Bruxelles ? Boris Johnson, très au fait de ces difficultés, les enjambent en faisant la promotion du génie séculaire du Rosbif qui a tout gagné après Hastings !





Tiens, nos moutons ont avancé vers le bord de la falaise. Si les îles britanniques sont dans l'impossibilité de couper les ponts sans se désagréger, qu'en serait-il de la France ? Des souverainistes appellent au Frexit. Le pays est au cœur même du dispositif européen depuis 1952 et ceux-là imaginent qu'un référendum gagné où le Rassemblement national fait des voix, serait de pleine application dans les vieilles terres d'empire ? Ils se fourrent le doigt dans l'œil. On peut déjà tracer la frontière de notre Ecosse : le vieux duché de Bourgogne partira en bloc, avec la région lyonnaise et le Grand Paris en prime. Comment les en empêcher ? Vous plaisantez j'espère.

La France s'est faite pas à pas. L'hexagone n'est pas tombé du Ciel comme le pigeon sur Clovis ! Elle peut aussi se défaire, se déchirer, notre histoire est emplie de guerres civiles ouvertes ou feutrées. Le Frexit dégagé par la loi stupide du Nombre pourrait aboutir au partage du pays si des territoires refusaient le suicide national. Ne l'oublions pas et redevenons sérieux. On ne débrouillera pas l'écheveau européen de 65 ans d'âge à peine de devenir une simple zone de consommation. Optimisons nos dépendances pour le bien-être de notre peuple et la perpétuation de nos valeurs spécifiques et oublions la grandeur que nous n'avons jamais atteinte depuis la chute du Second Empire.



- Frontières de Charles le Téméraire -

Savoir 125

$
0
0
C'est du trimestriel de l'association Vendée Militaire qu'il s'agit. 125ème livraison, ce n'est pas un perdreau de l'année et si je compte bien (il suffit de diviser par 4), cela fait plus de trente ans que ça dure. Qu'y a-t-il donc de spécial ou de particulier dans ce magazine chouan pour qu'il traverse contre vents et marées les péripéties politiques et sociales de notre beau pays ?

La réponse est dans la question : il ne perd pas de temps dans ce domaine de l'actualité fugace et s'en tient à la mémoire des hommes de son territoire, grands par la foi qui les a brûlés, grands par le sang qu'ils ont donné à défendre leur roi dans la tragédie révolutionnaire. Feuilleter ce numéro du dernier trimestre 2018 aide à respirer ; sans flagornerie, on dirait qu'il participe à sa façon à une élévation de l'âme, ce dont nous avons tous besoin dans notre quotidien "économique" et tristement banal : le prix des mutuelles va augmenter après le Diesel. Royal-Artillerie vous propose de le lire ensemble :


Avant toute chose, je signale aux lecteurs que le papier est bon et glacé, l'iconographie fastueuse (ce qui économise la nôtre ici) et le rédactionnel de meilleure qualité que bien des articles de presse qui mangent sur l'Histoire. Et il y en a cinquante-deux pages !

Le premier article nous présente Patrick Buisson, connu de tous depuis l'affaire de la prise de son dans le bureau de l'Elysée. Bien sûr il ne s'agit que de son travail sur les guerres de Vendée qui produira le film Les Manants du Roi mais la patte de M. de La Douasnerie nous dévoile l'homme autant sinon plus que l'ouvrage, et de cela je suis content, même si la modestie explicitée du président de Vendée Militaire n'était pas nécessaire pour rehausser l'image qu'on se fait de Buisson, puits de science comme nous en avons quelques-uns sur étagères, je pense aussi à Alain de Benoist. Aparté : la photo de La Chabotterie me rappelle qu'il y a de fameux concours de trompe de chasse en ce lieu. La régie me dit dans l'oreillette que "ça fait longtemps qu'on n'a pas entendu de vènerie sur Royal-Artillerie". Ndlr : c'est réparé.

A peine ai-je compris que Patrick Buisson est un chouan de convictions, mais plus performant que beaucoup qui s'en réclament pour parfumer leur vie bien terne, je prends en plein estomac Soljenitsyne aux Lucs-sur-Boulogne, site "emblématique de la Terreur en Vendée". Pour la jeunesse encore naïve d'aujourd'hui, cet épisode vendéen est l'Ouradour-sur-Glane de la Convention. Qui pis est, il n'amoindrit pas par comparaison l'horreur de tout le reste qui exclut à tout jamais ses perpétrateurs des registres de la civilisation. On dit que les guerres de Vendée furent la matrice des répressions les plus sauvages du XX° siècle, en quelque sorte : la Révolution française, sacralisée par le monde marxiste, adouba les monstres à venir ; même si les Ottomans n'eurent rien à en apprendre quand ils décidèrent de rayer le peuple arménien de la surface du globe.

Ne nous privons pas du discours historique prononcé par le Prix Nobel pour le bicentenaire le 25/09/1993 aux Lucs-sur-Boulogne devant vingt mille personnes. Le voici, il n'est pas si long, en cliquant ici.

A peine ai-je tourné la page que l'ancien conseiller général de Vendée, Maurice Bedon, pousse un coup de gueule comme on en lit peu souvent dans les salons feutrés du royalisme cénaculaire. Afin de ne pas incendier la sainte-barbe, il se protège derrière Tocqueville pour une conclusion sans appel qui rejoint notre propre embarras au spectacle des chapelles en lutte fratricide. En Vendée, ce sont les associations chouannes qui se bouffent : « Comme tout le monde le sait depuis Tocqueville, "une situation détestable ne sert les intérêts que des intrigants parce qu'ils évoluent agréablement en eaux troubles" et en profitent pour assurer leurs positions et nuire tout à loisirs. Se donner les moyens de recréer un climat de confiance apparaît donc bien comme un impératif pour favoriser la pérennisation des associations et travailler plus utilement dans la sérénité en faveur de la Mémoire Vendéenne.»

J'allais répondre virtuellement à M. Bedon que les princes pourraient aussi en prendre de la graine et pour certains, même vieillissants, redevenir sérieux avant les derniers adieux, quand je suis happé par le billet d'approbation de Gérard de Villèle à l'endroit du prince Louis de Bourbon. "Moi je trouve cela très bien" conclut-il en parlant du coming out franquiste du duc d'Anjou. Nous serions deux si l'auriculaire des royalistes français, fort occupé à la tasse à thé, était entré en oreille pour la boucher. Le franquisme n'a pas bonne presse en France, et projeter d'amener au roi l'opinion, au-delà du cercle des croyants, devient une gageure derrière le Joug & les Flèches de la Phalange espagnole. Mais à titre personnel et sans intérêt particulier à la restauration qui vient - plus jeune, je me serais bien vu capitaine des gardes gasconnes protégeant notre jolie reine - je serais tenté de préférer le beau prince moulineur de maillet, déclarant avec fracas sa foi en la famille naturelle et en son Dieu, assumant l'héritage temporel en se montrant capable de le faire fructifier sur ses terres, plutôt que le bedeau de Dreux qui passe l'aspirateur dans la nécropole royale et ne convient, quand on lui parle, que de banalités qui défoncent les portes ouvertes. C'est assez triste finalement de ce côté, quand on devrait attendre plutôt du renfort sur un ordre de bataille résolument capétien. Mais bon...

On arrive ensuite au cœur de métier de l'association : l'histoire inédite. C'est au prétexte des brefs Mémoires de la marquise de Bonchamps, sa veuve, que l'on suit la guerre du meilleur général que l'Armée catholique et royale ait jamais eu, même si ce n'est pas son nom qui vient en premier sur les lèvres des chouans d'aujourd'hui. Et pourtant il fut du dernier carré le 10 août aux Tuileries. "Vive le roi, l'Angleterre et Bonchamps !" était alors un cri d'espérance. Mme de Bonchamps, Mme de La Rochejaquelein, deux marquises qui ont fait campagne au milieu des gueux en guerre, de vraies natures, on aimerait en savoir plus. Justement ! Le biographe de la marquise, Alain Gaillard, nous invite, sur encart posté dans la revue, à sa conférence-dédicace du 17 novembre prochain, manifestation précédée d'une virée sur les traces du général et d'un déjeuner-débat au Poisson d'Argent (il suffit de passer le pont d'Ingrandes et à droite). En attendant, le n°125 de Savoir vous en offre neuf pages richement illustrées pour préparer vos questions.

Ce n'est pas fini. Mais non ! Il vous faut découvrir séance tenante Daniel-Thimothée Dubin de Grandmaison (1764-1833). Si ce n'est pas le curé d'Ars, c'est un abbé quand même, et de sacré caractère ! Une notice biographique d'un vicaire de rencontre signale que "M. Dubin a conservé dans ce pays la réputation d'un homme gai, aimant la compagnie, le jeu et la bonne chair". Il n'y a pas de faute d'orthographe. Xavier Maudet se régale à nous narrer les péripéties pastorales et guerrières du bon abbé qui, arguant de ses campagnes, obtiendra une légion d'honneur le 18 mai 1820, preuve qu'il savait terminer une légende. Je signale aux casuistes que la rapacité du chanoine ne contrevient en rien à ses promesses sacerdotales puisqu'ils ne font pas vœu de pauvreté contrairement à une idée reçue hors les murs, les moines si !

J'arrive au bout. Déjà ? Quand on referme la revue Savoir (à feuilleter par ici) on ne peut s'empêcher de penser que ces Chouans de 93 étaient des géants. Qui sommes-nous dans nos petites besognes, nos soucis de retraite, nos taxes foncières, nos princes affairés et la facture du fuel domestique ? Il faut lire le prochain numéro. Absolument ! Pour respirer l'air iodé de la Vendée. La quatrième de couverture nous propose un abonnement d'essai à 25 euros ! C'est donné, je prends.

Envoyez votre adresse et un chèque à :

Vendée Militaire
2 Avenue de la Gare
49123 Ingrandes-sur-Loire




Pour finir, nous nous permettrons de citer l'article "L'Affaire de Quiberon" de Royal-Artillerie publié en 2005 et qui cherchait à éclairer les motivations des acteurs de cette guerre, du moins en zone Bretagne. C'est l'occasion qui se présente. Merci.


Pour une heure de plus...

Brèves du lundi

$
0
0
And the winner is...
Il y a de cela longtemps, un des généraux de la junte brésilienne avait été interpellé par un journaliste français sur l'effervescence inhabituelle des mouvements sociaux, qui lui posait la question de savoir comment ferait-il pour vivre avec un smig. A quoi le général répondit sans hésitation : « Je me ferais sauter le caisson ! ». Sans doute avait-il économisé les cours du soir de la communication politique en lui substituant une denrée rare, la sincérité. C'est ce qu'apporte aux gens le candidat du PSL/17, le franc-parler. Le monde est tellement trituré au politiquement correct que tous les adeptes du parler-cash y retrouvent aujourd'hui leurs chances. Et chez nous aussi.

La caste militaire brésilienne boucle le ceinturon pour acclamer le nouveau Mussolini des plaines à soja. Avec 55,3% Bolsonaro, la coqueluche des bourgeoises décoincées et des latifundières lascives, décroche la timbale en vrai coq perché sur le fumier de la démocratie sud-américaine. Facile ! Il a compris ce que comprend le peuple. Le peuple en a soupé des Cassandre du désordre moral obligatoire et excusé ! Le peuple veut du neuf et qu'on essarte l'ivraie sans mollir, le blé dut-il en souffrir un peu. C'est le programme du capitaine d'artillerie qui connaît bien la cantine politique pour y avoir pris ses repas pendant vingt-sept ans ! Rallumez les arsenaux, on commençait à s'emmerder !

On fait le break sur une danse techno italienne que certains reconnaîtront :


Fiamma nera



Ach du liebe Zeit ! Alternative für Deutschland entre au parlement de Hesse et le Grün Tarek Al-Wazir (mais si!) pourrait former le nouveau gouvernement de Wiesbaden. Les coalisés de Berlin, une main devant, une main derrière, en rabattent de beaucoup, la chancelière est sous Prozac et l'Allemagne, cul par dessus tête, prépare une retraite aux flambeaux vers Nuremberg. Le pronostic est engagé par les éditocrates de la pensée conforme. Askolovitch va nous faire sans doute l'ad hitlerum de la semaine dans l'émission de complaisance d'Élisabeth Quin sur Arte. Ça tombe bien, c'est Halloween !

What next ? France ? Rien ! Zimbabwe ? Rien ! Syrie ? D'aucuns pensent que le vainqueur de la guerre civile devrait se retirer pour faire toute leur place aux vaincus et les laisser décider de la suite, comme par exemple une réforme de la constitution qui barrerait la présidence aux dictateurs. Ce serait une première dans l'histoire, mais notre jeune premier de président ne recule pas devant cette création ubuesque au théâtre du monde. Du haut de mon ermitage perché dans les grands chênes, je n'arrive pas à comprendre une seule injonction de la ligne diplomatique française au Levant. Faut-il rappeler que les Syriens nous ont foutu dehors manu militari à la fin de la Seconde guerre mondiale ?

Corée du Nord ? La nomenklatura communiste a importé tant de biens de luxe qu'il n'est plus resté assez d'argent pour acheter du riz. Si la famine de 1997 qui a tué tant de monde n'est plus d'actualité ("Il n'y avait rien sauf des feuilles de maïs réduites en poudre, qui constipaient, je mangeais des lézards, des serpents, des rats et de l'herbe" disaient les évadés du paradis) le pays profond est dénutri, les enfants rachitiques et la santé mauvaise hors des villes. A tel point que la politique d'ouverture du président sud-coréen est remise en cause par ses contribuables puisqu'à l'évidence, les gras cousins du Nord se foutent royalement de lui. Moix et Depardieu aussi.


Pour le reste, on a voté ce dimanche en Géorgie, les Catalans ont fêté l'écrasement du Real Madrid par le Barça et accessoirement le premier anniversaire de leur indépendance foirée.


Avant-hier soir, j'ai fait l'impasse sur la guitare classique belge Tao. La claque c'est maintenant.
A demain...



Mademoiselle et guitare

$
0
0
Ce soir nous reprenons la guitare à la demande de nombreux lecteurs qui, ma foi, ont aimé "Pour une heure de plus...". Nous avons choisi quatre belles guitaristes dans tous les sens du terme. Il a fallu du temps pour que les filles s'emparent de la guitare, instrument machique s'il en est, espagnol quoi ! Beaucoup d'entre elles ont travaillé le rock commercial à force d'amplis et ont privilégié le sex-appeal et la provocation sensuelle qui rapporte.
D'autres et surtout en Asie ont visé l'excellence et au-delà d'une virtuosité acquise très tôt - les gamines attaquent la guitare à cinq ans - apportent un touché que les hommes n'obtiennent pas si bien. Dans la série proposée ce soir, nous avons privilégié le phrasé du morceau, et pour certains rajouté les paroles qui viennent tout naturellement à l'esprit.
Bonne nuit.


Pour commencer Andrea González Caballero joue le Prélude BWV 1006a de Jean-Sébastien Bach



A suivre Xuefei Yang - Manhã de Carnaval de Luiz Bonfá - Orfeu Negro
Matin, fais lever le soleil
Matin, à l'instant du réveil
Viens tendrement poser
Tes perles de rosée
Sur la nature en fleurs
Chère à mon cœur
Le ciel a choisi mon pays
Pour faire un nouveau paradis
Où loin des tourments
Danse un éternel printemps
Pour les amants

Chante chante mon cœur
La chanson du matin
Dans la joie de la vie qui reviens

Matin, fais lever le soleil
Matin, à l'instant du réveil
Mets dans le cœur battant
De celui que j'attends
Un doux rayon d'amour
Beau comme le jour
Afin que son premier soupir
Réponde à mon premier désir
Oui, l'heure est venue
Où chaque baiser perdu
Ne revient plus...
Oui, l'heure est venue
Où chaque baiser perdu
Ne revient plus.

Chante chante mon cœur
La chanson du matin
Dans la joie de la vie qui reviens


Oblivion de Piazzola par Nadja Kossinskaja
Lourds, soudain semblent lourds
Les draps de velours de ton lit
Quand j'oublie jusqu'à notre amour...

Lourds, soudain semblent lourds
Tes bras qui m'entourent déjà dans la nuit
En bas ton pas en va quelque part
Les gens se séparent, j'oublie, j'oublie...

Tard, on se parle dans un bar d'acajou
Des violons nous rejouent
Notre mélodie, mais j'oublie...

Tard, on se parle dansant joue contre joue
Tout devient flou
Et j'oublie, j'oublie...

Court, le temps semble court
Le compte à rebours d'une nuit
Quand j'oublie jusqu'à notre amour...

Court, le temps semble court
Tes doigts qui parcourent ma ligne de vie
Sans un regard, les amants s'égarent
Sur un quai de gare, j'oublie, j'oublie...


Et nous finissons par l'interprétation la plus délicate d'un morceau composé par Eric Clapton
Tears in Heaven par Kaori Muraji (Si Youtube exige de visionner sur leur site, allez-y, cela vaut la peine).

Would you know my name
If I saw you in heaven?
Would it be the same
If I saw you in heaven?
I must be strong and carry on
'Cause I know I don't belong here in heaven
Would you hold my hand
If I saw you in heaven?
Would you help me stand
If I saw you in heaven?
I'll find my way through night and day
'Cause I know I just can't stay here in heaven
Time can bring you down, time can bend your knees
Time can break your heart, have you begging please, begging please
Beyond the door there's peace I'm sure
And I know there'll be no more tears in heaven
Would you know my name
If I saw you in heaven?
Would it be the same
If I saw you in heaven?
I must be strong and carry on
'Cause I know I don't belong here in heaven
Paroles & musique : Eric Patrick Clapton / Will Jennings



Lou Reed cinq ans déjà !

$
0
0
Le train fantôme dévale à toute vitesse pour Halloween. Rendre un hommage appuyé à Lou Reed (1942-2013) qui est parti un 27 octobre est une gageure, mais nous avons choisi Vanessa Paradis qui est parfaitement "dans le truc"... comme souvent. Je pense que cette version prise au Zénith de Paris en 2001 lui aurait fait plaisir.
Salut aux morts, glissons !

Holly came from Miami F.L.A.
Hitch-hiked her way across the U.S.A.
Plucked her eyebrows on the way
Shaved her legs and then he was a she
She said, hey Babe, take a walk on the wild side,
Said, hey Honey, take a walk on the wild side.

Candy came from out on the island,
In the backroom she was everybody's darling,
But she never lost her head
Even when she was giving head
She says, hey Baby, take a walk on the wild side
Said, hey Babe, take a walk on the wild side
And the colored girls go,
Doo doo doo doo doo doo doo doo doo
Doo doo doo doo doo doo doo doo doo
Doo doo doo doo doo doo doo doo doo
Doo doo doo doo doo doo doo doo doo
Doo doo doo doo doo doo doo doo doo
Doo doo doo doo doo doo doo doo doo
Doo doo doo doo doo doo doo doo doo doo

Little Joe never once gave it away
Everybody had to pay and pay
A hustle here and a hustle there
New York City is the place where they said:
Hey Babe, take a walk on the wild side
I said, hey Joe, take a walk on the wild side.

Sugar Plum Fairy came and hit the streets
Lookin' for soul food and a place to eat
Went to the Apollo
You should have seen him go, go, go
They said, hey Sugar, take a walk on the wild side
I said, hey Babe, take a walk on the wild side, alright, huh

Jackie is just speeding away
Thought she was James Dean for a day
Then I guess she had to crash
Valium would have helped that bash
She said, hey Babe, take a walk on the wild side
I said, hey Honey, take a walk on the wild side
And the colored girls say
Doo doo doo doo doo doo doo doo doo
Doo doo doo doo doo doo doo doo doo
Doo doo doo doo doo doo doo doo doo
Doo doo doo doo doo doo doo doo doo
Doo doo doo doo doo doo doo doo doo
Doo doo doo doo doo doo doo doo doo
Doo doo doo doo doo doo doo doo doo doo

Paroles et musique : Lou Reed


R.I.P.

Sa bio par Nostalgie :
Lou Reed a pour nom de baptême Lewis Alan Reed.
Le musicien et chanteur américain voit le jour le 2 mars 1942 à Freeport, dans la ville de New-York. Ayant débuté dans The Velvet Underground, l'artiste est à l'origine des nombreux tubes à succès dont la renommée perdure encore après l'éclatement du groupe en 1970.
Groupe Mythique des années 1960, celui-ci fut une réelle inspiration pour de nombreux projets musicaux de rock.
Dans ce sens, Lou Reed et ses compagnons de The Velvet Underground sont et resteront des icônes de la musique rock, même si ils n'ont pas produit de réels tubes à l'instar de John Lennon ou Bob Dylan.
Quoiqu'il en soit, Lou Reed connaîtra un véritable succès avec son titre « Walk on the wild side ».

Le jeune Lou Reed
C'est à New-York, sa ville natale que Lou Reed passe son enfance auprès d'un père comptable.
Il apprendra le piano dès l'âge de cinq ans mais se passionnera plus tard pour la guitare. Ses styles musicaux se dessinent déjà avec son penchant pour le rock and roll, le free jazz et le doo wop.
Pour apprendre la guitare, il se servira de son assortiment de disques. En 1958, alors intégré dans les Jades, Lou Reed enregistre « So blue » aux rythmes doo wop.
Pensant le dévier de son inclination homosexuelle, ses parents consentent à le faire subir des séances d'électrochocs alors qu'il n'a que 17 ans. Plus tard, il évoquera cette douloureuse expérience dans le titre « Kill your sons » sorti en 1975.
Les textes radicaux, crus et même choquants de ses chansons témoignent encore du traumatisme subi. Par ailleurs, la noirceur des textes de Lou Reed sera l'empreinte musicale et artistique du chanteur.
Passionné très tôt de littérature, il apprendra l'art de l'écriture inventive avec un poète et professeur de littérature, Delmore Schwartz à l'université de Syracuse.
Les études finies, Lou Reed commence à travailler pour Pickwick en tant que parolier, interprète et compositeur.

The Velvet Underground
John Cale forme avec Lou Reed et Sterling Morrison le groupe Les Warlocks, ainsi que la chanteuse Daryl.
Ajoutant Angus MacLise à la formation, les Warlocks prennent le nom de The Velvet Underground, en 1965. A la fin de l'année, Angus MacLise sera remplacé par Maureen Tucker.
Effectuant quelques concerts, ils se font remarqués par la cinéaste Brigid Polk qui en parle à son ami Andy Warhol. Celui-ci en parle à son tour à son associé Paul Morrissey, le futur manager du groupe.
Les répétitions commencent dès décembre avec comme chanteuse, Nico et Lou Reed et sa bande passent en studio pour enregistrer quelques chansons.
The Velvet Underground se produisent également dans des spectacles. Toutefois, les sujets sulfureux mentionnés par le groupe entraîne la fermeture des boîtes dans lesquelles il se produit.
Poursuivant leur carrière, Lou Reed et The Velvet Underground continue les enregistrements avec Bob Dylan comme réalisateur artistique.
En 1967, « The Velvet Underground and Nico » paraît dans les bacs. L'album contient entre autres les tubes remarquables comme « I'm waiting for the man », « Sunday morning » et « Heroin » écrit par Lou Reed.
Choquant, l'album ne sera pas une réussite. Cependant, sa mauvaise réalisation inspirera le mouvement punk encore naissant.
Le second opus paraît dès la fin de l'année 1967 qui recevra le même accueil que le précédent. « White Light/White Heat » sera ainsi quasiment ignoré sauf d'une poignée d'admirateurs.
Bientôt, John Cale s'en va et Doug Yule intègre The Velvet Underground.
Lou Reed, quant à lui n'attendra pas la sortie du quatrième album du groupe « Loaded », sorti en 1970 pour s'en aller retourner chez ses parents.

Une carrière solo auprès des Anglais
En quittant les Velvet Underground, Lou Reed quitte également l'industrie de la musique. Richard Robinson et Lisa Says tentent pourtant de persuader l'artiste de se remettre à la musique.
Le producteur et son épouse lui propose alors l'enregistrement d'un album au Royaume-Uni avec deux membres des Yes .
En 1972, l'album Lou Reed est dans les bacs. Si ce dernier contient de bons titres tels « I can't stand it » ou « Ocean », l'album n'est pas un succès.
Il n'en sera pas de même avec le second opus « Transformer » qui voit la collaboration de David Bowie ainsi que de Mick Ronson.
Sorti toujours en 1972, l'album est enfin accepté du public et est une réussite. Le titre « Walk on the wild side » est particulièrement prisé.
Le succès accompagnera Lou Reed jusqu'en 1976. Ainsi, l'on peut citer « Berlin » produit en 1973 ou « Coney Island Baby ».
« Metal machine music » sorti en 1975 sera par contre un fiasco. Viennent ensuite des oeuvres, certes importantes mais qui s'avère déroutantes comme « The Blue mask », sorti en 1982.
Lou Reed renoue avec le succès en 1989 grâce à l'opus « New York ». L'année d'après, il publie un bel opus « Songs for Drella » en hommage à son associé d'antan, Andy Warhol et avec la collaboration de John Cale.
Les Velvet Underground se retrouvera d'ailleurs pour une série de spectacles, en 1993.
Entre temps, Lou Reed aura sorti deux albums plutôt réussis artistiquement avec « Magic and loss » paru en 1992 et « Set the twilight reeling », dans les bacs en 1996. « The Raven » est le titre de son dernier album.
Autrement, la discographie de Lou Reed foisonne d'albums live dont le « Live in London » en date de 1998. L'artiste a aussi fait paraître deux volumes photographiques sous les titres de Lou Reed's New York et Emotion in action.

Lou Reed, qui subit une greffe du foie en mai 2013, décède le 27 octobre.


Memento Mori

$
0
0
Sarcophage romain dit de la porte entr'ouverte

Bien des façons d'être triste aujourd'hui, mais secouons-nous, ça ne durera pas ! Evidemment : tout finit toujours par s'arranger, même mal  (proverbe cévenol). On pourrait faire l'article des magnifiques sarcophages romains, de leurs intentions voire de leur lecture de la vie du défunt qui y repose, mais nous serions éblouis par la légèreté talentueuse des artistes de l'Antiquité qui ne furent jamais égalés. Ce n'est pas le jour de s'éblouir. La pluie, le vent, les nuages si bas que l'Aigoual fait l'Olympe, nous font revenir au Désert, loin des marbres et des porphyres. Aux Déserts. A la méditation, aux idées noires, aux idées grises... c'est Jour des Morts, de nos morts. D'aucuns partirent à reculons, certains implorèrent, d'autres furent fauchés à l'assaut et certains ont expiré dans leur lit, seuls, en famille, mais nul ne partit en riant ou en chantant, sauf à parler des martyrs car nous en eûmes beaucoup quand même, et je ne parle pas des supplices romains qui voulurent écraser les paléochrétiens des Gaules en les jetant au lion ou au taureau. Non, non, des martyrs languedociens du XIII° siècle qui ne sont inscrits à aucun jour du calendrier, mais ça pourrait changer, un peu comme change la perception du génocide vendéen, dès lors que le temps ne fait rien en l'affaire. Il semblerait que ça commence à bouger puisque l'évêque de Pamiers, Mgr Eychenne, parle du « sort extrêmement cruel réservé à ces croyants que l'on a coutume d'appeler Cathares » en disant une messe pour eux le 16 octobre dernier à Montségur (source).

Cent quarante Parfaits de Minerve, dédaignant l'absoute, montèrent aux bûchers d'une seul pas. Soixante Parfaits des Cassès grimpèrent sur les fagots en pleine sérénité ; Montaigne, écœuré, en parla ! Quatre cents Parfaits de Lavaur se jetèrent dans les flammes dans une commune exhortation. Il y en eu bien d'autres et des deux sexes. Ces hérétiques étaient "triés" par les légats pontificaux qui dans le doute ne s'abstenaient jamais. Si la Croisade des Albigeois tacha de merde les longs manteaux des ecclésiastiques, elle permit de s'assurer dans la méditation des veillées que, sous la menace, le pape se transformerait en tigre. Les Protestants s'en souviendront plus tard, qui ne firent aucun cadeau. Mais pour quoi les Parfaits mouraient-ils ?


Nous sommes au XIII° siècle. Le pape Innocent III a déclaré en 1209 le Languedoc "exposé en proie", ce qui signifie en clair dans l'esprit des croisés que toutes les exactions commises sont absoutes et le butin acquis d'avance, sans méjuger la captation des fiefs. La terre, chrétienne pourtant, doit se régénérer dans le sang des hérétiques. Mais contrairement aux espérances de la papauté, ce n'est pas la guerre totale de Simon de Montfort qui vaincra les Bonshommes mais la sainte Inquisition qui éradiquera ensuite tout le tissu social suspect d'hérésie, simplement suspect, extermination, tabula rasa. Ce qui n'explique pas le détachement des Parfaits devant le supplice, si on ne connaît pas les trois principes de la métaphysique qu'ils reconnaissaient dans l'humanité sans pour autant croire qu'ils puissent se recomposer en substance autonome : l'Esprit, l'âme et le corps. Aucun lien ne réunit les trois principes dans l'unité de l'individu, ils se combattent dans une guerre qui n'a jamais commencé et ne finira pas, celle du Bien et du Mal.

L'Esprit est d'essence divine éternelle et commun à toute la Création. Pour se faire comprendre on pourrait faire aujourd'hui une analogie avec le magnétisme terrestre, combiné aux attractions solaire et lunaire sans lesquelles nous n'aurions jamais pu naître en ce monde. Si le piéton était télévangéliste il vous en ferait dix minutes sans un seul verre d'eau mais en affichant son RIB. L'Esprit éternel est le réceptacle de la vie éternelle de l'âme du croyant. Aujourd'hui ce principe premier qui préexiste à tout est l'obsession de l'agnostique qui ne se satisfait d'aucune explication humaine et nie le hasard du précipité cosmique.

L'âme fonde l'in.di.vi.du ! Elle pense, elle anime, elle est la génératrice personnelle de chacun. Elle immatricule l'homme dans le grand livre céleste des chrétiens. Elle est exposée aux pires tourments, aux exaltations, au mysticisme mais aussi à la colère et la cruauté. Même si elle connaît le bonheur parfois, elle est toute contenue dans la gangue du corps qui l'aliène et dont les pulsions de toute nature lui pourrissent la vie terrestre.

Le corps est démoniaque, le siège de tous les péchés, une tunique qui serre, une prison qui affame, une guenille à la fin ! Le brûler accélérait le "passage" vers une réincarnation au pire, au mieux une libération où l'âme pourrait se recomposer en l'Esprit. Une métaphysique de la fin tout à fait bouddhiste dans ses cycles et tributaire de l'Eveil.

Il faudra attendre saint Thomas d'Aquin pour que cesse la dislocation de l'individu par la refondation de sa substance propre... mais c'est un autre chapitre. Nous retiendrons que les Parfaits avaient assimilé si profondément ces antagonismes en eux-mêmes qu'ils ont vécu la carbonisation des corps comme une véritable libération. Heureusement pour leurs adversaires qu'ils ne furent jamais soldats. La sévérité des Inquisitions qui se sont succédé pendant un siècle pour parvenir à leur destruction, a-t-elle pris en compte ce danger latent de ninjas invincibles semant la guérilla par tout le royaume ? Ce fut plutôt l'apogée de la théocratie absolue qui ne souffrait aucune concurrence ici-bas et là-haut, qui crut tenir son majorat et ses dîmes par la terreur et les excommunications. Elle condamnera plus tard un chevalier de La Barre pour des rumeurs d'impiété, blasphèmes, sacrilèges exécrables et abominables et pour être raccord avec la tradition, fit brûler son corps décapité sur la place publique. Le Premier Ordre en mourra !

Normalement, une chanson de troubadour doit finir ce billet puisque le catharisme, les faydits*, la ménestrandie, la fine amor furent parfaitement liés par l'anticléricalisme occitan. Nous avons choisi pour l'occasion l'Epervier incassable du chevalier faydit Raimon de Miraval (ca. 1159-1218) :

Bel m’es qu’ieu cant e condei
Pois l’aur’es dous’ e-l temps gais
E pels vergiers e pels plais
Aug lo retint e-l gabei
Que fan l’auzelet menut
Entre-l blanc e-l vert e-l vaire
Adonc se deuria traire
Cel que vol qu’Amors l’ajut
Vas captenensa de drut

Ieu non soi drutz mas domnei
Ni no-m sent pena ni fais
Ni-m rancur leu ni m’irais
Ni per orgolh no m’esfrei
Pero temensa-m fait mut
Qu’a la bella de bon aire
Non aus mostar ni retraire
Mon cor qu’ill tenc escondut
Tro qu’aia-l sieu conogut

Ses pregar et ses autrei
Son intratz en greu pantais
Com pogues semblar verais
S’ieu sa gran valor desplei
Qu’enquer non a pretz avut
Domna que nasques de maire
Que contra-l sieu valgues gaire
Et si-n sai maint car tengut
Que-l sieus a-l melhor vencut

Ben vol qu’om gen la cortei
E platz li solatz e jais
E no-ill agrad’om savais
Que s’en dersguis ni-s malmei
Mas li pro son ben vengut
A cui fai tan bel vejaire
Que quascus es sos lauzaire
Quan son d’enan lieis mogut
Meils que s’eran siei vendut

Ja non cre qu’ab lieis parei
Beutatz d’autra dompna mais,
Que flors de rosier quan nais
Non es plus fresca de lei
Cors ben fait e gen cregut
Boqu’et oills del mon esclaire
Que Beutatz plus no-i saup faire
Se-i mes tota sa vertut
Que res no l’es remasut

Ja me domna no-s malei
S’ieu a sa merce m’eslais
Qu’ieu non ai cor que m’abais
Ni vas Amor me desrei
Qu’ades ai del mieils volgut
Defors e dins mon repaire
E de lieis non sui gabaire
Que plus no-i ai entendut
Mas gen m’acolh e-m salut

Cansos, vai me dir al rei
Cui jois guid’è vest e pais
Qu’anc no-l trobei en biais
Qu’aital com ieu volh lo vei
Ab que cobre Montagut
E Carcasson’ el repaire
Pois er de pretz emperaire
E doptaran son escut
Sai Frances e lai Masmut

Domn’ades m’avetz valgut
Tant que per vos sui chantaire
E no-n cugei canso faire
Tro-l fieu vos agues rendut
de Miraval qu’ai perdut

Mas lo rei m’a convengut
Que l’o-m rendra ans de gaire
E mon Audiart Belcaire
Puois poiran dompnas e drut
Cobrar lo joi qu’an perdut
(Traduction ici)

(*) Faydit ou faidit : chevalier ou seigneur SDF après les confiscations des barons français ou de leurs évêques; Raimon de Miraval mourut dans la misère chez les Cisterciennes de Santa María de Les Franqueses au nord de Lérida en Catalogne.




Notes jetées sur la Grande Guerre

$
0
0


Sans doute est-ce l'un des derniers billets Royal-Artillerie sur la guerre de 14-18. Nous avons été fidèle aux rendez-vous du Onze-Novembre avec des évocations que nous jugions moins connues, sur les unités qui nous touchaient de plus près - le 122èRI, le 129èRI, le 7èBCA - ou des billets techniques sur le canon de 75 ou le tank Renault. Ces billets sont libellés "1111" ; il y en a douze avec celui-ci. Nous ferons un article spécial le jour même de l'Armistice. Aujourd'hui nous laissons libre cours à nos pensées qui vagabondent.

Les commémorations officielles s'attachent, pour ce que nous voyons de leurs préparatifs sur Internet, à n'oublier personne. La guerre ne fut pas qu'une affaire entre les Français et les Allemands, dit le général Irastorza, président du Centenaire. Merci de nous prendre pour des idiots. Qui ignore encore que cette guerre fit s'affronter les empires thalassocratiques aux empires centraux sans oublier de nombreux alliés de part et d'autre ? D'où son nom de "Grande Guerre". Sait-on que le Japon nous fournissait des bateaux et qu'une flottille nippone épaulait les Anglais en Méditerranée ? Mais à vouloir n'oublier personne, on minimise de beaucoup la gloire et le respect dus à nos soldats.



La cause de la capitulation allemande fut d'abord et avant tout la tenue au feu des troupes métropolitaines et impériales franco-britanniques lors des épisodes décisifs déclenchés par l'état-major allemand. Que tout le monde ailleurs ait fait son devoir ne doit jamais faire oublier que c'est baïonnette au canon que fut acquise cette victoire, avec deux mains et sur deux pieds.

Aparté : Nous ne parlons pas des fusillés pour désobéissance : 639 exécutions sur 8.194.500 mobilisés, 1.457.000 morts (source) et deux fois et demi autant de blessés, montrent à l'évidence que cette page de la guerre a été instrumentalisée pour servir à des fins de propagande anti-militariste, toujours par les mêmes. Et ce pauvre Hollande de demander qu'on ne les oublie pas !

L'autre point que je voudrais évoquer est la contribution américaine. Nous, Français, les avons formés et équipés quand ils ont débarqué, et ils se sont bien battus. Mais ce n'est pas sur le terrain que leur contribution fut la plus positive même si tout renfort fut bénéfique dans l'offensive. C'est chez eux ! L'enrôlement général des jeunes gens sur la côte Est des Etats-Unis était bien sûr épié par le renseignement allemand. Quand les camps d'instruction étaient pleins, ils se vidaient sur des bateaux en partance pour Brest ou Saint-Nazaire et ils se remplissaient aussitôt pour le prochain convoi. Les états-majors centraux comprirent dès 1917 que retourner la situation sur le front occidental devenait impossible chaque jour un peu plus et les plans de guerre devinrent contradictoires dans les projections des stratèges allemands.

Sammies en 1918

A cet égard, on feint d'ignorer le désordre intérieur à l'empire boche. Les grèves générales sont documentées à Berlin, Hambourg et Kiel, Bochum, Cologne, etc. C'est un soulèvement qui se développa sur les traces de la révolution russe de 1917, jusqu'à Munich. Les nouvelles fusaient jusqu'au front, un monde à l'arrière s'écroulait et bientôt vivres et munitions arrivaient mal. La démoralisation des troupes était enclenchée. Si la vieille discipline germanique faisait encore illusion, les traces laissées par l'ennemi dans sa retraite montraient le découragement des unités au contact et la perte de sens de ces combats. Les marins se mutinèrent dans les ports de la Baltique. L'empereur fut chassé par une révolution qui ne disait pas son nom (à ce moment-là) et qui déboucha sur la capitulation, comme la révolution russe avait abouti à l'armistice de Brest-Litovsk en décembre 1917. En fait, les armées austro-allemandes étaient dans la tenaille des offensives puissantes des alliés sur le front de l'Ouest et des insurrections populaires sur le front intérieur, sans parler bien sûr du capital humain disparu au front.

L'empire allemand sans empereur fut brisé en morceaux. Nous n'avons pas convaincu nos alliés de le démembrer, ce qui aurait sauvé la suite de l'histoire. Ils ont jugé que trop de puissance française en Europe occidentale irait contre leurs intérêts. Le Foreign Office voulut protéger les équilibres traditionnels continentaux afin que dans l'avenir nul ne soit en capacité de lui nuire. Il sut vingt ans plus tard qu'il avait complètement tort et que cette politique allemande aurait pu conduire à la disparition pure et simple de la Grande Bretagne.




Il faudrait maintenant évoquer ces "militaires" qui furent par la suite oubliés bien qu'ils aient payé le prix fort dans ce conflit : nos chevaux, nos mulets et nos chiens. Il est mort sur le front de France presque autant d'équidés que de soldats ! Sauf dans les troupes britanniques où le rapport au cheval était celui de partenaire à partenaire, la monture était considérée comme un vecteur d'arme comme un autre, et la cavalerie française n'était pas la mieux disposée envers ses effectifs. Dans les échanges interalliés de 1914 on s'aperçut que le dos des chevaux français étaient en très mauvais état car nos cavaliers de si belle prestance ne daignaient pas mettre pied à terre quand le service n'exigeait pas d'être monté. Ils crevaient leur chevaux sous eux et comptaient sur la remonte. Cela dépendait aussi des armes et de leurs traditions différentes, cuirassiers, hussards, dragons, chasseurs...

Quand les Anglais débarquèrent dans les Flandres, les unités françaises furent surprises de voir arriver avec eux tant de vétérinaires et des infirmeries de campagne dédiées aux chevaux. Les archives du War Office signalent que le corps médical britannique traita 725216 chevaux pendant toute la guerre pour blessures, gazages et maladies et qu'il en sauva 529064 (c'est beau l'administration). Les chevaux réformés furent retirés du front par tous moyens adaptés à leur état et même par train, péniches et barges aménagées, ce dernier moyen étant le plus commode pour les chevaux blessés par l'artillerie.

S'il est beaucoup de monuments commémorant la cavalerie, il en est peu, sauf dans l'empire britannique, à commémorer le cheval en guerre, à l'exception du monument aux morts de la 2ème Division de Cavalerie de Luneville qui a recensé les chevaux en garnison morts pour la France en même temps que les hommes :

Morts au Champ d'honneur : INSOLENT MERCREDI COMIC TAPAGEUR GIL BLAS LE ROUDIEN NAUDET BUFFALO LAGARDE GERMINAL ALLEGRO FERNANDEZ ISOLA NINIVE FRANC-TIREUR CARDINAL FERNANDEZ BOBY KALIF LATTE BEAUSÉJOUR ST BRICE MANON BOYARD FRIPON II ATTILA COQUETTE XIX VIGILANTE YVETTE BAMBEZ JOUG LETTES IMPOSANTE DEMEMONT FOKENNY KLAUSSE DUCHESSE GALANTE ISOLA MYLORD EPINETTE MISTINGUETTE MONTMIRAIL COMMEGNE IMPOSTEUR JIL ST FORT KALIPSO KETTANNNE ATTENDU REVEIL REINUS COCO III MARGOT DECOUSSE BLANC-BEC VAPEUR AMITIE INDICIBLE PIMPOLETTE AGARETTO MAROC FAUVETTE PIROUETTE LEDA LA ROCHELLE FAISAN MIKADO CARDINAL JAVELINE BELRET FERNANDEZ - Blessés au Champ d'honneur : ALLEGRO MORGAN DEMOISELLE JULIETTE LA FROUSSE SAPAJOU MILARD BANDIT IV PNEU


Tout en camion !

$
0
0
Latil TAR 4x4 1915
La guerre ouverte fut déclarée à pied, à cheval et en train. C'est sur voie ferrée que les régiments furent remontés à la ligne bleue des Vosges, l'approche de l'ennemi (sous la menace de son artillerie) se faisant à pied. L'armée française avait un charroi automobile symbolique et si le général Galliéni retourna la situation de Joffre sur la Marne ce fut en enrôlant les compagnies de taxis parisiens. De même vit-on des autobus urbains monter des renforts au front, s'y maintenir le temps d'évaluer la situation... et revenir pleins de blessés vers l'arrière.

Rapidement un grand charroi militaire devint nécessaire pour déplacer rapidement l'artillerie et obtenir une meilleure mobilité des unités en soutien. L'industrie française répondit avec ses meilleures productions. Aujourd'hui nous faisons un billet mécanique du camion Berliet à partir des photos d'époque et des planches de la Fondation Marius Berliet. A l'entrée en guerre, la marque lyonnaise était le premier fabricant de camions au monde. Il est intéressant de comprendre les choix techniques d'un camion de guerre dont la doctrine d'emploi n'est pas celle d'un poids lourd civil.

Le cahier des charges demande un porteur solide, économique et simple d'entretien à l'échelon compagnie. La maison Berliet y répondra magnifiquement, comme il en sera souvent dans le futur. Ce camion à tout faire sera un châssis-cabine de 3T5 capable d'emporter une charge utile de 4 tonnes et jusqu'à 10 tonnes avec sa remorque. Dans la limite de poids autorisée tous les composants de fatigue seront surdimensionnés à commencer par le moteur.


Le châssis BERLIET CBA



C'est un châssis échelle riveté avec tous ses ancillaires boulonnés, supports, berceaux, etc... La traverse accueillant le pédalier et les commandes par levier (rapports de vitesse, frein sur roues) est en aluminium. Elle se démonte d'un bloc.
Le châssis est posé sur quatre ressorts à lames.


Le moteur Z



Quatre cylindres en ligne bi-bloc à soupapes latérales du même côté, d'une cylindrée de 4400cm³ (réalésé ensuite à 5300cm³), bridé à 1200 t/mn par un régulateur ferroviaire à masselottes agissant sur le papillon du carburateur. Graissage sous pression et non par barbotage. Vilebrequin, paliers, bielles, arbre à cames sont plus gros que ceux des modèles civils.
Le moteur délivre 22 HP et emporte la bête à 25 km/h jusqu'au bout du monde.


La cinématique



Technique transaxle avant la date (Porsche 928, Alfa Romeo Alfetta):
Moteur et embrayage à l'avant envoyant le couple à une boîte-pont au niveau des paliers de chaînes arrière.
La boîte est une 4-vitesses (prise en 4ème) et marche arrière. Ses engrenages surdimensionnés sont en acier nickel-chrome.

La traction par chaînes Berliet est préférée à la technique Cardan plus fragile, en plus de la facilité de réparation d'un maillon de chaîne sans faire retour à l'échelon.
Le différentiel peut-être freiné (au pied) et joue un rôle de ralentisseur.

Les roues à bandage sont du modèle artillerie en 940x130 devant et jumelées en 1000x130 derrière.



Même si le CBA fut proclamé "camion de la victoire" d'autres constructeurs français livreront de bons camions militaires, Renault, De Dion, Ariès, le puissant Latil à quatre roues motrices et directrices, et on vit même des camions américains. Mais la moitié du trafic de la Voie Sacrée sera du Berliet CBA. Le modèle sera amélioré constamment pour les services publics après-guerre jusque dans les années 30. La maison Berliet en produira 40000 !

Ecrivains-combattants de 14-18

$
0
0
La Grande Guerre a nourri des écrivains qui par elle devinrent grands à leur tour. Nous évoquons aujourd'hui les récits célèbres que la littérature a produit dès la fin des hostilités. On les trouve encore en bouquinerie ou sur des sites spécialisés dans les vieux livres. Achetez-les, c'est de première main. Mais on ne peut faire cet article sans signaler que la guerre a tué plus de cinq cent écrivains français derrière Charles Péguy, Alain Fournier, Guillaume Apollinaire, Léon de Montesquiou, Victor Ségalen, Ernest Psichari, Augustin Cochin etc. Ils ont une plaque au Panthéon.

A l'intention des jeunes lecteurs, il ne faut pas lire trop tôt cette production littéraire qui peut mettre en tête des cauchemars tenaces. Rares sont ceux qui mobilisés ou engagés en 14 en sont ressortis indemnes, ils ont aussi passé à la postérité l'horreur et la terreur en même temps que les qualités guerrières et la gloire. Le premier écrivain-combattant qui vient à l'esprit est Roland Dorgelès avec Les Croix de Bois. Ce "roman" est une succession de nouvelles qui campent soit une situation particulière, soit un caractère de soldat. Il fut reçu à l'époque par les anciens combattants comme parfaitement cadré et juste.

Le volontaire Henri Barbusse de tempérament cévenol (réfractaire) transmit son expérience des tranchées (à 40 ans) dans Le Feu, journal d'une escouade. Il s'agit de la mise en forme de son carnet de marche, gratté en 1915 et 1916, rédigée dans son lit d'hôpital à Chartres. Admirateur de la Révolution russe, mort à Moscou, bien des communes de la couronne rouge parisienne donnèrent son nom à des rues. Ce qui n'enlève rien à la qualité de l'œuvre et le niveau d'effroi qui s'en dégage.
Le pacifisme de Jean Giono se fondera sur sa traversée de la guerre qu'il relate dans Le grand troupeau. Sans aucun esprit belliqueux mais discipliné, il sera de tous les coups qui évoquent la dureté des temps, Les Eparges, Verdun, Noyon, Saint-Quentin, la Somme, l'offensive Nivelle au Chemin des Dames. Il a le droit de dire ce qu'il veut !


Le volontaire suisse de la Légion étrangère Blaise Cendrasécrira La main coupée qu'il a perdue lors de la grande offensive de Champagne en 1915. Jean Paulhan pour Le Guerrier appliqué au 9è Zouaves est incontournable. Le style en plus.

Le capitaine Emilio Lussu est le plus connu des écrivains-combattants italiens. Mobilisé dans la Brigade sarde Sassari, il participe au Verdun italien, le Mont Zebio, qui lui inspirera son chef d'œuvre Un anno sull'Altipiano. Tempérament affirmé, il affrontera les chemises noires l'arme au poing et s'évadera de sa bastille des îles Lipari. L'autre italien est le volontaire lombard Carlo Emilio Gadda. Fait prisonnier à Caporetto, il racontera sa guerre et sa captivité au Hanovre dans son Giornale di guerra e di prigionia. Mais c'est son œuvre "civile" d'un style si spécial qui le fera entrer ensuite dans la légende, à côté de pointures comme Proust.

On sait que les Anglais ont beaucoup "donné" à la Grande Guerre, chez nous sur la Somme où tant disparurent, aux Dardanelles et au Proche Orient. S'il faut un jour lire Les Sept piliers de la sagesse du colonel Lawrence dit d'Arabie, on doit citer un auteur-combattant qui fit carrière, Alan Alexander Milne, le créateur de Winnie L'ourson. Enrôlé en 1915 comme sous-lieutenant au 4th Battalion du Royal Warwickshire, il est grièvement blessé en 1916 à l'offensive anglaise sur la Somme. Rétabli mais fragile, il entrera au contrespionnage et y rédigera la propagande du Mi7 au War Office. La Somme lui fera publier Peace with Honour, un brûlot pacifiste qui ne l'empêchera pas de rempiler comme capitaine dans la British Home Guard, chez lui à Hartfield, demandant à ses subordonnés de l'appeler Mister Milne.

On ne peut faire l'économie d'Orages d'acier d'Ernst Jünger, lieutenant dans les troupes d'assaut, peut-être le plus technique des récits, qui laisse peu de place à la dramatisation. C'est aussi un amoureux de la France et des Français.
Reste à signaler pour finir le fameux roman pacifiste de l'abbéErich Maria RemarqueA l'ouest, rien de nouveau que les nazis brûleront comme décadent. On en fera des films !

La liste des écrivains combattants est longue, à la hauteur du retentissement de cette première guerre mondiale. la Wikipedia donne une liste d'auteurs que vous pouvez consulter en cliquant ici, sinon le site éponyme en cliquant là.

Un livre hors de la tranchée littéraire mais difficile à trouver donne un éclairage saisissant de la guerre de l'ombre. C'est l'ouvrage posthume Mes souvenirs du Commandant Ladoux, recueillis par Marcel Berger. Patron du 5è Bureau à Paris puis du 2è Bureau au GQG, il dénichera Mata-Hari et bien d'autres espions qu'il fera fusiller, en particulier ceux basés au pays basque espagnol. Selon sa veuve, il a été liquidé à distance à Cannes en 1933 par l'Abwehr ou par le Sicherheitsdienst nazi, au moyen d'un paquet de photos toxiques que lui envoyait une "vieille connaissance allemande", Mademoiselle Doktor, mais dont les encadrements avaient été sans doute traités aux streptocoques ou une autre saloperie qui se logea dans les sinus. Peut-être s'était-il moqué exagérément de l'adversaire dans trois romans d'espionnage qu'il avait fait paraître au Masque après la guerre ? Il agonisa cinq jours. On ne connaissait pas le polonium à l'époque.


Nous ne pouvons pas nous quitter sans évoquer celui dont on parle le plus ces jours-ci. Maurice Genevoix. Mobilisé comme sous-lieutenant de réserve au 106è RI de Châlons, il est rapidement sur la Marne puis remonte sous Verdun. Ce sera d'ailleurs le titre du premier volume de la série de cinq qui composera sa contribution majeure à l'histoire de la Grande Guerre Ceux de 14. Une prose linéaire, précise, chirurgicale. pas d'emphase, la réalité suffit amplement ! Blessé grièvement aux Éparges en 1915, il perdra l'usage de sa main gauche.


En conclusion, s'il en faut une, la mobilisation générale des hommes de ce pays en août 14 incluait toutes les professions, charges et dignités. S'y ajoutèrent des volontaires, en nombre. Souvenons-nous de tous les francophiles étrangers qui individuellement n'hésitèrent pas une minute à nous rejoindre. Les empires centraux, agresseurs venus du côté obscur de la civilisation européenne, ne connurent pas ces ralliements.
Parmi les professions mobilisées, celle d'écrivain fut bien représentée et paya le prix fort quelque soit le pays. Si la masse de manœuvre mérite d'entrer tout entière dans la grande histoire des hommes, cet article particulier est un modeste hommage au talent et au courage des soldats de la plume au bout du fusil ! Ce sont eux d'abord qui, disposant de la facilité d'écriture purent saisir la matière du récit, eux qui mirent en perspective cette tragédie que nous pouvons mieux comprendre aujourd'hui. Merci.




©La Grande Guerre en dessins

Centenaire de l'Armistice

$
0
0
C'est aujourd'hui à 11h. L'Europe commémore la fin de la guerre civile de 14-18 appelée autrement guerre européenne de suprématie. Il y en avait eues d'autres sous les rois, sous l'Empire mais aucune encore n'avait été gagnée acier contre acier. C'est l'occasion pour tous de réfléchir aux causes de l'affrontement franco-allemand qui dura trois quarts de siècle (1870-1945): le militarisme prussien repoussant les frontières de son "espace vital" trouva suffisamment d'écho dans les certitudes de l'état-major français, qu'il devenait plus qu'urgent de vérifier sur le terrain qui des deux avait trouvé la formule gagnante, et chez nous, la revanche sur l'humiliation de 1870. De grands penseurs sur l'art et la manière de s'entretuer convainquirent les politiques que des nuées de paysans formés hâtivement à l'ordre serré écraseraient les Huns avec une consommation raisonnable des effectifs. La théorie s'appelait l'offensive à outrance, elle fut développée et appliquée par le général Robert Nivelle et les généraux anglais qu'il avait séduits, avec les résultats que l'on sait : la guerre se fit toute entière chez nous et les consommations furent décuplées. C'est à la fin l'acier français et la qualité de l'ingénierie française dont les usines étaient protégées par une armée de terre franco-anglaise pétrie de courage et bien commandée, qui vainquirent, on ne le dira jamais assez. La levée en masse ne vint à bout de l'invasion qu'à la fin d'une guerre mécanique terrible.

La presse bruisse d'une commémoration low cost décidée par le Château où seront glorifiés les soldats de première ligne quel que soit leur camp. Les généraux et maréchaux seront cités incidemment mais sans appuyer car il faudrait sinon "revaloriser" les casques à pointe de la Prusse vaincue où naquit Angela Merkel. Quant aux soldats, ils auraient été victimes des contraintes et menaces afin de se maintenir dans les tranchées sous l'orage. A ces explicateurs "petite bite" on devrait poser la question simple : « Pourquoi lorsque un chef d'unité demandait des volontaires vers l'avant, il y avait la plupart du temps malgré le péril plus de doigts levés que de postes à pourvoir ?» Ayant eu le privilège de parler à de véritables poilus et pas à des chercheurs de l'université, j'en ai retiré une histoire de peur et de gloire, de pleurs et de rires, de morts et de crasse, de gueules cassées et surtout de ce courage mâtiné de bonne humeur qui faisait accepter l'impossible, l'indicible. On insulterait leur mémoire à les considérer comme des veaux partant à l'abattoir. On ne peut pas les rapetisser à la toise qui les ferait ressembler à ce que nous sommes devenus, nous : des moutons !

Ceci étant dit, nous commencerons cet ultime billet du Centenaire par un hommage aux cadres des unités de combat, sergents, adjudants et officiers qui commandaient à la voix des gens qu'ils connaissaient par leur nom. La guerre en consomma beaucoup et on ne parle que rarement des postes très difficiles qu'ils ont occupés. Garder la tête froide, l'autorité, la capacité d'analyse sous la mitraille, dans le vacarme des bombes et les gaz, entre les geysers de cailloux et de boue jusqu'à l'élan d'un assaut libérateur. Tous les jours ! Ils assumaient deux responsabilités, celle de leurs hommes qu'il fallait "gérer" au quotidien et soutenir moralement, celle de la mission dans une bataille de mêlée où tout fléchissement pouvait être fatal à la ligne de front. Sans eux, les unités élémentaires se transformeraient en troupeau de chats, la combativité disparaitrait avec le relâchement de la discipline, la défaite serait sûre. Les cadres étaient le principe catalyseur d'une section, d'une compagnie qu'ils transformaient en unité combattante. Rien sans eux n'aurait été possible. Parmi eux figurent des célébrités. Si chacun connaît les écrivains et les artistes morts pour la France, moins nombreux sont ceux qui savent que des députés (assez peu finalement) ont combattu. Parmi eux nous choisirons un royaliste (normal!) : le duc de Rohan.

Né le 4 avril 1879 à Paris, Josselin de Rohan-Chabot, douzième duc de Rohan (en photo), embrasse la carrière militaire dès ses dix-huit ans et part en 1900 combattre en Chine les Boxers avec le 6è Dragons. Conservateur, catholique et anti-maçons, il succède naturellement à son père comme député du Morbihan en 1914. Mobilisé dès la déclaration de guerre comme lieutenant de réserve, cet officier de cavalerie est versé au 27è Dragons puis après la Marne, il est promu capitaine au 15è Dragons en 1915. Le régiment devant tirer à la courte-paille un officier qui rejoindra l'infanterie pour y commander une compagnie de combat, le capitaine de Rohan refuse de faire tirer au sort ses lieutenants, estimant qu’à lui seul revenait cet honneur périlleux. Il rejoindra le 4è Bataillon de Chasseurs à pied, jusqu'à Verdun. Blessé à deux reprises, il rejoint chaque fois le front. Dans la nuit du 13 au 14 juillet 1916, le capitaine de Rohan part avec son ordonnance en reconnaissance sur le terrain de chasse de son château de Manancourt dans la Somme, vers le calvaire d'Hardecourt-aux-Bois où une semaine auparavant le capitaine Augustin Cochin du 146e RI a été tué devant sa compagnie alors qu'il contre-attaquait. Son ouïe affaiblie par une blessure aux tympans du mois de mars, il tombe, à deux heures du matin, sous les balles d'une mitrailleuse du 182/16.Royal-Saxon qui ne dormait pas. Il est enterré le 15 juillet dans le cimetière militaire de Cerisy-Gailly. Il avait 37 ans.






Les émissions commémoratives du centenaire vous en apprendront bien plus sur la "fin de l'histoire" qu'un modeste blogue comme celui-ci. Pour vous offrir un épisode inédit comme ce blogue aime le faire, nous allons parler aujourd'hui des renforts océaniens au sein de l'Empire français, et particulièrement de ceux levés en Nouvelle Calédonie, territoire d'outremer qui a renouvelé ses vœux français dimanche dernier. Précisons que dans les territoires du Pacifique seuls les citoyens français étaient mobilisables dans les mêmes classes d'âge que les métropolitains. Les sujets sous statut de l'indigénat n'étaient pas incorporables. Mais la consommation de troupes sur le front de l'Est obligea le gouverneur Jules Repiquet (1874-1960) à contourner la règle en proposant le volontariat. Ces recrues passeront par la même filière que les Français, conseil de révision, vaccinations, instruction militaire, aguerrissement, versement en division combattante mais sans dispersion. A l'époque, toute la guerre était conduite par divisions: pour le Bataillon mixte du Pacifique ce fut la 72è du général Ferrandini.


La grande majorité du contingent océanien sera incorporé au BMP formé à Nouméa puis basé à Marseille sous l'autorité du capitaine Montagne pour incorporer les autres recrues d'Océanie comme les Tahitiens. Il fit une belle guerre, d'abord sous les ordres du chef de bataillon Trouilh en Champagne, puis fut remonté au front sous les ordres du chef de bataillon Gondy, et toujours au contact dans les pires moments ; ce n'était pas une unité supplétive ou de coolies charriant du ballast même s'ils participèrent comme tout le monde à l'entretien des ouvrages militaires, mais des soldats dans la bonne moyenne à l'issue de leur formation. Ces troupes qui passèrent au Chemin des Dames, terminèrent la guerre dans l'honneur et le bataillon fut cité à l'ordre de la Xème Armée le 10 décembre 1918 (voir l'historique du BMP en cliquant ici ou bien en original sur le document de Vincennes, en cliquant là). Les pertes furent d'un cinquième des effectifs français (et créoles) et un tiers des effectifs canaques. Eh quand même !

La motivation des Canaques qui s'enrôlèrent reste en débat d'autant qu'une révolte éclata en 1917 sur la grande île. Si on comprend que la pression des autorités indigènes et des missions ait pu pousser le jeune Canaque à signer, on sait par des témoignages que la double curiosité de découvrir et la France et la guerre moderne en décida beaucoup. Il n'est pas correct de dire que la vie tribale pouvait être chiante à mourir pour certains esprits aventureux, mais on peut le penser très fort. Quoiqu'il en soit, la bonne tenue au feu de ces troupes coloniales primitives créa pour la première fois chez les autochtones une véritable identité dépassant le maillage tribal par le sentiment d'une fierté acquise chèrement sur le territoire même du colonisateur. Cette conscience collective valut aux indigènes une nouvelle politique d'assimilation mise en œuvre par le gouverneur Guyon dès 1925. Elle n'aboutira quand même pas à faire du Canaque un citoyen français. Dommage ! Mais les anciens tirailleurs à qui fut proposé la citoyenneté en 1925, la refusèrent majoritairement, ce qui signalait la solidité de leur attachement à leur terre ancestrale.


Pour mémoire, les possessions océaniennes engagées furent, outre la Nouvelle Calédonie et les Nouvelles Hébrides sous condominium franco-anglais, les archipels polynésiens (Société surtout, les quatre autres étant vides) et les protectorats de Wallis et Futuna. Les indigènes de ces territoires étaient considérés avant-guerre comme peu employables dans les affaires militaires voire inaptes à l'instruction nécessaire à la formation d'un soldat. Les pertes au front firent reconsidérer les talents sans doute cachés de cette ressource dès 1915. Pour bien cadrer l'histoire, au plus fort de son engagement, le BMP comptait 1222 rationnaires, 91 chevaux et 44 voitures répartis en un état-major de bataillon, une section hors-rang, quatre compagnies de combat et une compagnie de mitrailleuses. D'autres Océaniens français s'engagèrent dans les troupes impériales de l'ANZAC (Australian and New Zealand Army Corps).






Terminons ce centenaire en saluant la dernière composante de l'histoire de 14-18 : l'arrière qui a "tenu", comme on disait alors ; nos usines ont tourné à fond tout au long de la guerre grâce aux femmes. Les femmes de France furent admirables dans les hôpitaux, les fermes, les ateliers. L'économie de guerre leur doit beaucoup.
Tant les combats dantesques que l'ampleur des dévastations constatées partout ont fait crier « Plus jamais ça !» aux survivants de l'apocalypse. Hélas, la dureté des circonstances avait pour le moins affaibli leur perception de l'avenir même si leur connaissance de l'espèce humaine avait terriblement progressé. Le pire nous était promis, il l'est encore ! Après plusieurs ouvrages relatant ses campagnes, l'ancien chef d'état-major général allemand, Erich Ludendorff, publiera en 1935 Der totale Krieg, une doctrine mobilisant toutes les forces matérielles et morales de l'empire disparu pour l'éradication de l'ennemi, doctrine qui annonçait une guerre plus effroyable encore !


Voilà ! C'est terminé. La Grande Guerre, en ressortant des commémorations de son centenaire, entre dans la nuit de l'histoire. Royal-Artillerie pourrait s'arrêter maintenant, nous en avons beaucoup fait. Ce billet est le quinzième de la série "14-18". Merci aux lecteurs fidèles. A plus !



Postscriptum :
Outre les études de Jacques Frémeaux sur l'empire colonial, nous signalons qu'une étude sur la Nouvelle Calédonie en guerre a été publiée en ligne par Mme Boubin-Boyer, dont on peut lire le travail en cliquant ici.



Tous les billets Royal-Artillerie du Onze-Novembre sont libellés "1111"






Buona notte amore
Ti vedro nei miei sogni
Buona notte a te che sei lontano


Une défense européenne intégrée ?

$
0
0
On signale en vigie l'émergence du serpent de mer de la défense européenne. Ce sont les célébrations du centenaire de l'Armistice qui ont offert au président de la République l'occasion de se démarquer du consensus transatlantique en pressant le pas d'une intégration de nos forces militaires. Sauf que... nous sommes seuls de chez Seul dans ce registre, nul autre que nous ne croit en une armée européenne, y croyons-nous nous-mêmes ?

Certes il y a déjà des coopérations quasi-permanentes, toutes dans le cadre atlantique et ses codes d'emploi, et aussi des gesticulations comme la Brigade franco-allemande parfaitement inutilisable mais dont le financement était toléré parce qu'elle représentait les prémices d'une "prochaine" force européenne combinée. La BFA est le test-même que ça ne marche pas sauf pour les prises d'armes. Il y a coexistence, parfois cohabitation, mais les règles d'emploi restent différentes, les systèmes d'acquisition et de combat également, jusqu'à la doctrine qui interdit d'engager la brigade au complet dans un conflit impliquant une seule des deux nations participantes. Seule la logistique ou les missions de gendarmerie, neutres par définition, sont envisageables comme on le vit en Bosnie-Herzégovine lors des guerres de Yougoslavie, et un peu à Kaboul au sein de l'ISAF, mais c'était surtout pour entraîner l'état-major de Müllheim en lui faisant respirer la fine poussière afghane qui traverse les filtres des climatiseurs.


Ce n'est pas l'arrogance récente du président Macron à l'endroit de nos voisins qui mine son projet de force européenne. C'est intrinsèque aux nations auxquelles il s'adresse. Nul n'achète ! Eliminons de l'épure les orientaux. Aucun ne se fait prier pour abonder au T.E.D. NATO aussitôt que Mons le demande, et même en dehors de l'Alliance, ils ont répondu présent aux anglo-américains lors de l'affaire d'Irak. Ils n'ont aucune envie de distendre la ligne de vie qui les relient au Pentagone. Avec un voisin aussi agressif que Vladimir Poutine, ils estiment ne pas pouvoir se le permettre ; les Européens de l'Est ne diront jamais oui à une CED sauf si elle est montée par les Américains eux-mêmes. Et puis Munich 38 n'est pas si loin dans leurs esprits.

Mettons de côté la Scandinavie qui a une géographie spéciale et ses propres problèmes de cohésion avec trois pays dans l'Alliance (Norvège, Danemark et Estonie) et deux (Suède et Finlande) qui réactivent leur neutralité armée, au point de participer aux exercices OTAN en zone atlantique.

Le Benelux est un cas à part : c'est le carrefour chaque fois dévasté par la guerre et il ne lâchera pas la proie pour l'ombre ; outre les plus grands ports du monde au nord du tropique, il abrite en plus des commandements OTAN majeurs à Mons et à Brunssum. Donc ils renouvellent leur système d'arme aérienne par du F35 américain sans états d'âme.

Restent cinq pays, pas un de plus : l'Allemagne, le Royaume-Uni, la France, l'Italie avec le commandement naval de Naples et la Turquie qu'on oublie toujours. Le reste, c'est peanuts !
S'il fallait concrétiser l'ambition d'une force européenne active, nous devrions convaincre ces quatre pays. Oui, les quatre ! Voulez-vous les passer en revue ?

L'Allemagne héberge le commandement atlantique aérien à Ramstein et accueille pratiquement tous les stocks matériels des brigades américaines programmées pour l'Europe et stationnées aux Etats-Unis, en plus de la logistique de transport et sanitaire (Landstuhl). Après une période de transferts budgétaires vers la réforme sociale et le développement industriel, elle commence à reconstruire ses armées, ce qui lui est facile puisqu'elle dispose outre l'argent, d'usines d'armement si performantes qu'elle a ses clients dans le monde entier ; et jusqu'en France qui a choisi Heckler & Koch pour armer son infanterie. Les poilus de 14 ne le croiraient pas.

Le problème n'est pas dans ses capacités mais dans ses intentions. La fibre pacifiste vibre très bien dans l'opinion germanique qui garde encore la mémoire d'un pays complètement rasé par la dernière guerre mondiale. D'ailleurs le chancelier Schröder n'eut aucun mal à refuser d'entrer dans la querelle GW Bush-Sadam Hussein. Il n'eut pas même besoin d'invoquer la constitution fédérale qui l'empêchait alors d'exporter des troupes ; ce fut Nein !, ce qui mit en rage Condoleezza Rice, on s'en souvient. Mais tous les accès aux facilités atlantiques en Allemagne furent ouverts et sûrs, pour le plus grand bien de nos blackwaters français qui allèrent s'y faire recoudre.

Leopard 2 à gué

Que la Chancellerie ou le Bendlerblock planchent sur des coopérations industrielles en Europe n'augure pas d'un progrès quelconque vers une force commune avec les quatre autres pays précités. Si l'Allemagne est le moteur économique de l'Union européenne, elle a une zone de chalandise qui va très loin vers l'Est et maintenant jusqu'en Chine par la nouvelle route de la Soie. Les pays est-européens sont ses clients obligés, ses sous-traitants, et la mise en valeur de la Russie post-Poutine n'attend qu'elle avec peut-être le Japon à l'autre bout.
S'impliquer dans une défense européenne puissante doit s'inscrire dans sa stratégie fondamentale qui n'est pas du tout belliqueuse. Donc, malgré les sourires et les poignées de main, le point d'interrogation est très gros ! Bien sûr si la défense intégrée faisait tourner à fond ses usines, on pourrait en rediscuter.

L'Italie héberge à Naples la 6è Flotte américaine et le commandement OTAN interarmées qui va avec. Elle est l'acteur incontournable en Méditerranée parce qu'elle y dispose d'une flotte performante et moderne et surtout de chantiers navals technologiques de grande capacité qui travaillent bien. Les armées de l'air et de terre sont au niveau OTAN depuis toujours, parfaitement réglées et intégrables rapidement dans tout dispositif. C'est l'allié sur qui compter à la mer, et c'est aussi la bévue de Sarkozy que de l'avoir méprisé dans l'affaire de Libye. Aujourd'hui encore il sera très difficile au gouvernement français d'appeler l'Italie à collaborer sur une maquette de défense européenne, surtout après les insultes de Macron et de Lemaire vis à vis de la coalition au pouvoir à Rome.

Disons que l'Italie sera à convaincre quand nous en aurons fini avec tous les autres. Mais de but en blanc, ils vont nous envoyer "siffler là-haut sur la colline"... ! On terminera par le Royaume-Uni.

La Turquie d'Erdogan est le mouton noir de l'Alliance, mais outre que le sultan n'est pas éternel, la fondation stratégique de la coopération turco-américaine est solide. Les armées turques doivent tout aux Américains qui leur ont appris la guerre moderne et leur ont donné accès aux états-majors les plus avancés au monde. Même si Donald Trump a fait fuiter le retrait des soixante ogives nucléaires de la base d'Incirlik près d'Adana pour menacer de débrancher la Turquie du poumon d'acier américain si elle exagérait en Syrie, les relations restent normales car le Pentagone, sur site depuis 2003, sait combien est ingérable la situation régionale et comprend les obsessions d'Ankara. Il se souvient aussi que la chasse turque a descendu un Soukhoï russe en 2015 pour préciser de quel côté se battaient les Turcs. Rappelons aux étourdis que la Turquie contrôle le Bosphore et les détroits des Dardanelles et de ce fait la sortie de la flotte russe de la Mer noire sous le régime de la Convention de Montreux de 1936. Elle tient en plus deux milles kilomètres de côte face au nord, autant dire qu'elle partage avec la Russie à Sébastopol le contrôle de la mer.

Si l'adversaire à surveiller avant qu'il ne devienne un ennemi en vrai est la Russie - qui d'autre sinon pour l'instant - une défense européenne ne peut faire l'économie de la Turquie qui tiendrait le sas de protection du front sud d'Europe occidentale. Avec les deux riverains européens (Roumanie et Bulgarie) elle boucle l'arc d'écoute et de renseignement, le dispositif d'alerte. Qu'il y ait des questions à résoudre avant que de l'inviter à rejoindre n'étonnera personne mais est-ce indispensable d'être dans l'Union européenne pour participer à la défense européenne ? La Norvège et demain le Royaume-Uni nous prouveront un jour le contraire. Quant à ceux de nos stratèges qui pensent qu'inclure la Turquie est mettre un pied dans l'Orient compliqué, nous leur signalerons que nous n'avons eu besoin d'elle pour nous mettre dans la m... déjà.

Le Royaume-Uni après avoir été l'ennemi héréditaire est devenu l'allié héréditaire. Son format équivaut le nôtre tant dans les capacités d'armement que dans celles d'entrer en premier sur un théâtre désigné. Elle est l'alliée privilégiée des Etats-Unis pour qui elle contrôle la mer de Norvège et le détroit de Danemark. Sa force nucléaire est sous double clé, elle met en œuvre une missilerie américaine et maintenant des avions américains. S'il n'est pas question de la détacher des liens spéciaux anglo-américains, le Royaume Uni peut être un renfort de poids comme l'élément atlantique le plus avancé des Etats-Unis vers l'Est. Sans mouiller l'Oncle Sam, elle peut réaliser ses vues en participant à des actions militaires ou de guerre avec nous. C'est une vieille nation guerrière invaincue depuis 1781 (Yorktown).

Elle dispose d'une industrie d'armement performante qui collabore déjà avec les missiliers français et reste très forte en aéronautique et en sous-marins. Au sol c'est un renfort apprécié, tellement qu'il lui échoit souvent la partie difficile des opérations (le Chatt-el-Arab en Irak, le Helmand en Afghanistan). Si une défense européenne intégrée n'exige pas de rompre avec les Etats-Unis - pourquoi le faudrait-il - le Royaume Uni est le contributeur décisif, mais à ses conditions bien sûr, comme toujours.

Groupe naval de la Royal Navy

On voit bien jusqu'ici les atouts des pays composant une hypothétique défense intégrée mais on ne sent pas l'élan ni l'écho du projet français chez aucun d'eux. Tout le monde a la coopération en tête mais les interdits et arrière-pensées sont nombreux, et finalement la convergence est faible. Alors que faire pour défendre l'Europe ?

Commençons par le plus évident, le plus simple à définir, le plus petit dénominateur commun : REARMONS !

Un état-major intégré, comme il est très facile d'en monter un, c'est prouvé, ne servira pas à grand chose s'il faut téléphoner chaque jour aux Etats-Unis pour enrôler des moyens de logistique, communications, cyberguerre, couverture aérienne ou satellitaire etc...

Le président Trump a les idées simples et favorisera le réarmement européen dès lors qu'il allège le fardeau transatlantique américain et évite de traverser l'océan au moindre pet de travers de l'ours russe. Exemple concret: la déstabilisation des Etats baltes et de la Pologne aurait dû être contrée par les armées résidentes en Europe et ne pas appeler la 3è Brigade blindée américaine stationnée à Fort Bliss (Texas). Profitons-en pour grandir en force et courage, en dépassant le plafond des deux pourcent du PIB pour les dépenses militaires. Bien sûr il nous faudrait des comptes publics à peu près en ordre pour y atteindre. Alors commençons par réparer nos finances et "en même temps" dressons les plans d'un réarmement d'ensemble avec des collaborations industrielles européennes - l'Allemagne discute avec nous du futur char de combat sous sa direction* - et la liberté de défense autonome nous sera donnée de surcroît le jour venu, même s'il est pour l'instant éloigné.
(*) à Eurosatory 2018, KNDS (Krauss Maffei Wegmann & Nexter Systems) a présenté un prototype d'Euro Main Battle Tank franco-allemand, conçu sur le châssis du Leopard 2A7 portant la tourelle du Leclerc, destiné à tenir son rang avec le M1A2 contre l'Armata

Pratiquement, pour ce qui concerne la France, il faut rénover et muscler le corps de bataille destiné à combler notre béance du nord-est en dépassant l'échantillonnage actuel, renforcer les brigades de spécialités, ajouter un second groupe naval du format CDG sur la Manche, la Mer d'Iroise et le golfe de Gascogne, écrire les plans de réactivation des missiles Hadès Nouvelle Génération tant que la Russie déploiera les mêmes dirigés vers nous (c'est l'histoire du traité abandonné récemment par Donald Trump) et mutualiser les moyens de cyberguerre sur tout le continent, ce qui logiquement pourrait être le premier état-major européen intégré sans froisser les susceptibilités. Mais il n'y aura pas ce faisant de grandes inaugurations, de grandes conférences, de grands forums médiatiques et le bénéfice politique sera au départ très mince, sinon même négatif puisqu'il faudra compter avec les agents d'influence du Kremlin que ce mouvement dévoilera, juste avant de les déporter derrière l'Oural ! Hi hi ! Royal-Artillerie tient la liste en archives :)


Projet d'avion multi-rôle franco-allemand


Reste la question de la guerre asymétrique. Elle ne sera pas affrontée par un commandement intégré classique mais par un renseignement co-opéré en continu, couplé à des unités de réaction rapide et définitive. En fait c'est d'un système classique anti-aérien qu'il s'agit: le radar de veille détecte, le radar d'acquisition et poursuite envoie la trajectoire du mobile et déclenche la contre-batterie. Ainsi tous les services européens de détection doivent être inter-opérés et les réactions appliquées par des forces mobilisées en permanence sous délai zéro. Ça se fait déjà mais on gagnerait à systématiser le procédé et à déterminer une fois pour toutes la queue de trajectoire par défaut. Dans le doute ne t'abstiens pas ! Faudra-t-il sous-traiter la question à l'intelligence artificielle et ses robots ? C'est déjà en partie le cas.

Faut-il ajouter que tout projet d'intégration devrait éviter les couloirs de Bruxelles pour avoir une chance de se réaliser sans gaver de crédits une bureaucratie insatiable ? En espérant que cet article éclairera vos discussions dans les dîners en ville... veuillez agréer, chers lecteurs, l'assurance de mon remerciement pour la distraction apportée à établir les punchlines qui feront mouche :

- La réticence historique des évadés du Pacte de Varsovie
- Le raidissement scandinave aux gesticulations russes
- L'absence d'alternative au Bénélux
- Le pacifisme allemand vs. la santé insolente de leur industrie d'armement
- La marine italienne décisive en Méditerranée
- Les 60 ogives atomiques d'Adana
- La double-clé de la dissuasion nucléaire anglaise
- La sous-traitance de la guerre asymétrique aux robots



Pablo de Almocita

$
0
0
Le répertoire royaliste est fourni de chansons de tradition mais il est plutôt rare de le voir s'enrichir de "nouveautés" puisque le but de l'exercice est plus souvent d'exalter le passé et ce qui fut composé jadis. Aussi je mâche mon plaisir à fredonner Espoir légitime avec le duo Adamanta, en attendant que sonnent les cuivres sous la canonnade de la restauration qui vient :



Luis-Alfonso de Borbón y Martinez-Bordiu, un prince monté sur boules qui se bat !


Paul Prieto est un vieux routard de la musique traditionnelle qui a écumé le répertoire latino-américain au gré de ses rencontres pour faire partout des tournées très courues. Assagi, il est revenu sur le filon français du folklore français avec un bonheur certain pour son public (son press book est assez impressionnant).
Comme nous le montrent ci-dessous ses Confidences musicales d'une exquise finesse, il explore une transcendance de la musique que d'autres appellent "inspiration" mais qu'il décèle comme un souffle de l'Esprit.

On notera la mise page par incrustations dans ce petit concert de vingt minutes. Sa vie, son œuvre comme on dit, sont reprises sur un site perso que je vous engage à découvrir à la fin de ce billet. Notez qu'il diffuse sa production sur CDs, même en période de fêtes.




D'ascendance andalouse, Prieto ne se quitte pas sans une contribution flamenca, et c'est une buleria que nous avons choisie en version acoustique :




Compléments

Mais comme chacun sait sur ce blogue, le Piéton du roi a ses préférences et ne les cache pas. Le tempo lent du répertoire médiéval peut se discuter. Pourquoi tous les chants de troubadours et tous ceux de la ménestrandie sont-ils lents aujourd'hui, languibouls, dirait-on chez moi. Quelles sont les bases d'interprétation ? la longueur de la note ? Langue au chat !

On sait d'expérience que lorsqu'un air est dansé il est plus rapide que simplement chanté, surtout dans les danses piquées comme la polka ou la bourrée. Mais cela touche aussi la grande musique, jusqu'à ce que l'on découvre dans des archives royales les chorégraphies jouées à Versailles chez Louis XIV : le morceau joué à la vitesse d'exécution classique actuelle obligeait les danseurs à stationner en l'air en attendant la note. Dans le répertoire régional (je ne connais vraiment que celui du Rouergue) tous les airs sont chantés par la plupart des groupes comme des complaintes - le comble est de chanter "Au Pont de Mirabel" en polyphonie bigourdane alors que c'est un air de lavandière et diantre pas l'évanouissement d'une damoiselle languissant au donjon de ne jamais voir la clef ; ou comme Le grand Pierrou qui se hâte de bon matin pour aller voir son béguin et qu'on fait marcher au pas de la Légion ! Sauf à bourrée, tous les airs sont ralentis et mêmes des chant à tuer comme l'hymne du Rouergue*, où s'entendent nettement les coups de talon dans la mélodie, ce qui est regrettable pour la transmission.

Si on revient au Moyen Âge, il est utile de rappeler que le tempérament des gens de l'époque diffère énormément du nôtre. On les représente enténébrés et désespérés, balancés entre l'hystérie de la violence (canalisée par la guerre) et les conditions sanitaires précaires qui abrégeaient les vies et les amours, mais les chroniques qui narrent la bravoure et la sauvagerie des assauts ne s'accommodent pas de soirées lancinantes à entendre de la musique ennuyeuse. On y mangeait, buvait, dansait et faisait tourner les femmes au son de tous ces instruments que l'on a retrouvés. Alors pourquoi chanter lent ?

(*) Premier couplet avec talons :
Du Rouergue nous sommes
Et nous nous en vantons,
Car nous sommes des hommes
Qu'ont du poil au menton,
Qui s'y frotte s'y pique,
Le Maure ou le Sarrazin
...

Pour finir, nous allons écouter trois versions d'un chant argentin que j'ai chanté dans mon jeune temps, la Arribeña de Atahualpa_Yupanqui, et ces trois interprétations font référence :

- celle de Leda Valladares & María Elena Walsh en 1955 (mp3 sur Archive.org)
- celle de Mercedes Sosa en 1977 (page de Musicme)
- celle du duo Talvikki (Prieto) dans les années 80 en vidéo ci-dessous :


C'est la troisième qui est la meilleure, pas seulement pour le tempo juste mais aussi parce qu'une émotion trop débordante de l'interprète peut gâcher le plaisir ; l'interprétation cristalline des Talvikki séduit.
Zambita arribeña,
¿De dónde vendrás?
Quién sabe qué ausencias
Y qué nostalgias llorarás
Quién sabe qué ausencias
Y qué nostalgias llorarás.

Allá en las quebradas
Y en el pajonal
Se estira tu canto
Como un lamento del piedral
Se estira tu canto
Como un lamento del piedral.

Por esos cerros se llevan los vientos
Los tristes acentos de mi soledad.
Y a veces el llanto se vuelve canto
En el andar
Y a veces el llanto se vuelve canto
En el andar.

Zambita arribeña,
Tal vez un amor
Te dio la tristeza
Que en estos tiempos sufro yo
Te dio la tristeza
Que en estos tiempos sufro yo.

Caminos andando
quién sabe por qué,
Igual que la zamba,
Con un recuerdo viviré
Igual que la zamba,
Con un recuerdo viviré.

Por esos cerros se llevan los vientos
Los tristes acentos de mi soledad.
Y a veces el llanto se vuelve canto
En el andar
Y a veces el llanto se vuelve canto
En el andar.


Paul Prieto

Epilogue

Ayant soumis par courtoisie le présent billet au nihil obstat de l'auteur, j'en ai reçu l'imprimatur et divers commentaires dont voici un extrait ciblé :
« Pour développer un peu sur cette observation exacte que vous avez faite sur la lenteur de certaines pièces anciennes réinterprétées par la plupart des groupes, j'ajouterai que bien souvent le problème est lié à plusieurs éléments :

- L'idée d'une longue note bourdon avec une mélodie éthérée et planante est liée à une sorte d'irréel médiéval influencé entre autre par l'utilisation outrancière du synthétiseur dans des films « médiévalisants » plus surnaturels qu'historiques.
- L'utilisation par les producteurs de disques de chanteurs ou chanteuses qui sortent d'une formation classique où la voix est traitée très différemment de ce qui pouvait exister dans le passé.
- Le fait que le musicien et le chanteur dans le temps étaient bien souvent la même personne et le rythme des instruments d'accompagnement entraînait le chanteur qui s'accompagnait lui même tandis que les chanteurs actuels ont tendance à étaler leur voix et le musicien leur fabrique un lit musical qui devient en quelque sorte comme le lit des fumeurs d'opium où l'on est invité à des rêves hallucinatoires plus qu'à des réalités dansantes. Il est amusant de noter qu'à notre époque on appelle chanteur lyrique le chanteur d'opéra qui ne s'accompagne jamais de la lyre ou d'un autre instrument à cordes alors que le chanteur lyrique était par définition à l'origine un chanteur qui s'accompagnait lui même à la lyre.
- Enfin les chorales suivent en général le même chemin que leur chef de chœur sorti d'une école de chant académique et qui va forcément avoir tendance à tout « classiciser », transformant la voix naturelle en ce lyrique Wagnérien qui a succédé au style Rossinien tellement plus fluide, mettant les piano-forte du classique là où ils n'ont rien à y faire, comme dans les chansons anciennes et transformant des airs médiévaux en une espèce invertébrée mutante qui comme vous le remarquez fort justement provoque un inévitable ennui.

Il est intéressant de remarquer que même une pièce lente qui conserve une base rythmique solide peut être fort agréable à l'écoute et ne pas lasser. Puisque vous semblez être un connaisseur de la musique d'Argentine, vous devez connaître les Vidalas, qui bien que possédant un tempo lent ont une vigueur poignante en plus de leur paroles poétiques sur le thème de la vie et la mort.»

Une colère désenchantée

$
0
0
Le charme est rompu. Cellezéceux qui ont suivi le discours du porte-avions se sont surpris à vagabonder en esprit, à décoller, voire à bailler, le petit moulin à paroles ne moulait plus le grain de la rhétorique macronnienne, on entendait Canteloup !
La charge présidentielle ayant été rabaissée à sa fonction de communication, celle-ci compte plus que tout mais ne supporte pas l'à-peu-près. Puisque le titulaire "doit" vendre sa politique aux sondeurs et aux éditocrates qui font l'opinion, autant que ce soit un professionnel de la publicité. Ce qui n'est pas le cas. Bévues et embarras ont été nombreux au nom de la transparence, les hésitations "meurtrières" parfois. Comme on dit dans l'arme blindée - cavalerie : « si tu fais une connerie, fais-la vite !» Or M. Macron n'a pas fait de service militaire.

Nous pourrions faire cent lignes de reproches à hauteur de la déception, mais ce qu'il reste de neutralité ou plus rarement d'approbation dans le peuple tient uniquement à l'incurie voire au ridicule en posture de ses adversaires politiques. Pour une fois on va les citer. A tout seigneur...
Marine Le Pen est sur les rails de la doxa frontiste dont "la colonne vertébrale idéologique est faible" comme le dit le politologue Jean-Yves Camus dans Le Bien Commun de novembre (p.15), et sortie de trois thèmes populaires, elle ne montre aucune capacité à gouverner, ses adjoints pas plus !

Laurent Vauquiez n'est pas audible, ou bien n'est pas même écouté. Sans doute est-ce facile de simplifier sa pensée au maximum pour la faire avaler par les moins intelligents de nos concitoyens mais à la fin, c'est la classe moyenne qui te prend pour un con. D'accord, et il bénéficie du renfort d'Eric Ciotti !

François Bayrou - ne vous étonnez pas de le trouver ici - commence à évaluer l'action du chouchou légèrement en-dessous de ses propres capacités réflexives. Il pourrait faire mieux. La statue figée du sage palois va devenir le reproche permanent du Commandeur de Dom Juan. Le soutien des centres va se déliter à l'approche des Européennes sans pour autant que le château soit pris d'assaut.

Olivier Faure n'imprime pas. C'est une question de personnalité et une conséquence du syndrome Hollande. Le succès d'icelui a convaincu que le plus fade ou le plus foireux avait ses chances pour décoller, ce qui convoqua bien du monde socialiste sur le pont d'envol. Il n'existe plus de socialiste en capacité d'accéder.

Jean-Luc Mélenchon a usé son registre clownesque jusqu'à la corde mais tout le monde en rit encore chez les humoristes, ce qui ne va pas arranger ses affaires au sein du parti de La France Insoumise. Sans majuscules, la France insoumise sera dans la rue le 17 novembre en dehors de lui et de ses aboiements. Le capital de sympathie populaire a coulé entre ses doigts comme le sable du garde-temps. Il ne le sait pas bien sûr !

C'est bien le désamour des Français pour le fringant président qui le met en péril. Certes argue-t-il : il n'est pas comme Donald Trump arrimé à des élections de mi-mandat et il se sent élu pour cinq ans sans que cela ne se discute, sauf outrage constitutionnel... mais si le putsch est improbable, il y a pire.

J'explique. La France bénéficie d'un régime de faveur des agences de notation parmi les grands débiteurs de l'OCDE parce que c'est un pays de fiscalité facile et que le patrimoine public et privé couvre largement la dette souveraine. L'impôt, très lourd en terme de PIB, rentre. On le dit partout dans la galaxie financière.

Justement et tout est là : la révolte des gilets jaunes brise le consentement général à l'impôt. Les gens moins favorisés ont parfaitement compris que leur travail, leurs pensions sont une ressource puisable sans limite pour continuer un Etat obèse et une classe bourgeoise qui en profite. Les calculs savants du bulletin de salaire ne parlent pas. Les primes à la casse des vieux Diesel n'intéressent que ceux qui n'en ont pas besoin et profiteront de l'aubaine pour acheter une seconde voiture pour le gosse. Les gens voit des taxes partout comme Blanche-Neige des nains !

Depuis le temps que la manifestation des gilets jaunes est annoncée, le gouvernement aurait dû se souvenir de la jacquerie bretonne des Bonnets Rouges qui avait enrôlé tout le monde jusqu'aux conseillers municipaux de bien des villes. Au lieu de quoi, le gouvernement menace, ce qu'il n'a jamais su faire contre les blocages agricoles, les poids-lourds escargots, les manifestations en tout genre qui emmerdent le monde ; parce qu'il y a des syndicats impliqués. Mais les gilets jaunes vomissent les syndicats qui, pour eux, font partie du problème puisqu'ils sont insatiables et vampirisent les travailleurs, salariés ou indépendants, dans leur défense du dernier modèle soviétisé d'Europe occidentale, à peu d'effet puisque le chômage semble incompressible !

Il est trop tôt pour pronostiquer une suite à la manifestation du 17 novembre, mais si le gouvernement la fait déraper par des coercitions inutiles, c'est une jacquerie nationale qui pourrait bien se déclencher sur tout le territoire en dehors de quelques grandes métropoles. Il sera trop tard pour raisonner cellezéceux qui auront franchi le Rubicon de la désobéissance civile. Il y a analogie avec le Vaffanculo-Day italien !

Badawi, l'autre blogueur en danger

$
0
0
Après le démontage vivant de Jamal Khashoggi sur la table du consulat séoudien d'Istamboul, le Québec s'inquiète du sort d'un blogueur emprisonné au royaume d'Arabie pour avoir appelé à la liberté de conscience. Son épouse Ensaf et leurs trois enfants étant réfugiés à Sherbrooke, c'est le gouvernement provincial qui a rallumé le mouvement d'opinion en faveur de la libération de Raef Badaoui, prix

En attendant l'oracle...

$
0
0
Si j'étais président de la république j'aurais pris le temps de lire notre Constitution et compris à la fin du 5è article que tous les problèmes de mes prédécesseurs venaient justement d'une forfaiture qui a consisté à réunir tous les pouvoirs, même les plus triviaux, dans les mains du titulaire. La Constitution dispose que « Le Président de la République veille au respect de la Constitution. Il

Islam en France, LE rapport

$
0
0
Prologue Al-Mawlid an-nabaoui ou Naissance du Prophète est célébrée le 12 rabîʿ al awal (3è mois du calendrier musulman) et ça tombe aujourd'hui. Christophe Castaner, ministre des cultes, lance le travail d'une réforme des lois anti-cléricales de 1905 à destination de l'islam (et des évangéliques aussi), une occasion comme une autre de faire le point sur la controverse qui enfle chaque jour un
Viewing all 1224 articles
Browse latest View live