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Macron royaliste ?

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Emmanuel Macron n'est pas royaliste mais il n'a pas la haine des rois comme on la croise souvent dans la mouvance de gauche. Par trois fois, il a inscrit son action politique dans une continuité que tous ses prédécesseurs limitaient au quatorze juillet 1789.

saint Louis IX
Dans le droit fil d'une idée exprimée jadis par Jack Lang qui n'objectait pas à l'incarnation de l'Etat par un roi au lieu d'un président élu, Emmanuel Macron relevait en juillet 2015 dans un entretien au journal d'Eric Fottorino et Henry Hermand, Le 1, l'absence du roi en des termes explicites :
« La démocratie comporte toujours une forme d'incomplétude, car elle ne se suffit pas à elle-même. Il y a dans le processus démocratique et dans son fonctionnement un absent. Dans la politique française, cet absent est la figure du roi, dont je pense fondamentalement que le peuple français n'a pas voulu la mort. La Terreur a creusé un vide émotionnel, imaginaire, collectif : le roi n'est plus là ! On a essayé ensuite de réinvestir ce vide, d'y placer d'autres figures : ce sont les moments napoléonien et gaulliste, notamment. Le reste du temps, la démocratie française ne remplit pas l'espace. On le voit bien avec l'interrogation permanente sur la figure présidentielle, qui vaut depuis le départ du général de Gaulle. Après lui, la normalisation de la figure présidentielle a réinstallé un siège vide au cœur de la vie politique. Pourtant, ce qu'on attend du président de la République, c'est qu'il occupe cette fonction. Tout s'est construit sur ce malentendu.»

Quant à savoir, comme il le suggère, si les Français ne voulait pas décapiter le roi Louis XVI, c'est une toute autre affaire. Le Piéton du roi ose imaginer que l'exercice fut autant de "tuer Dieu et ses prêtres" que de raccourcir son lieutenant sur terre, d'où la damnation qui semble nous poursuivre éternellement (cf. Léon Bloy). L'histoire a jugé que le peuple français sidéré ne s'était pas soulevé au lendemain du 21 janvier 1793, acceptant que le sang du roi retombe sur sa tête.


La deuxième fois est relatée dans Challenges par Bruno Roger-Petit :

« Après sa déclaration de candidature, de retour vers Paris, Emmanuel Macron a fait une halte là où les pierres parlent. Loin des caméras et des micros, le néo-candidat à l'élection présidentielle s'est arrêté en la Basilique de Saint-Denis, tombeau des Rois de France. Seul en son destin face aux Transis. Qu'est-il venu chercher là, dans ce grand silence de marbre où dort l'âme de la France ? Conviction. Onction. Transmission. Inscription. Tout cela à la fois sans doute. Les voies qui mènent aux Forces de l'esprit sont impénétrables. Le geste de Macron rappelle qu'il est deux catégories de candidat à l'élection présidentielle: ceux qui hantent les lieux de mémoire, en quête d'encens, et ceux qui occupent les plateaux de télévision, en perte de sens.» (BRP)


La troisième fois se situe dimanche 7 mai à la grande cour (Napoléon) du Louvre dans le discours du nouveau président aux électeurs. Le Louvre de Paris est un peu la Cité interdite française, le cœur du pouvoir royal dans sa phase de construction patiente, Versailles étant la jouissance du projet accompli. Nul à gauche ni à droite n'aurait osé inclure le nom du passé tabou dans son allocution officielle. Les "vieux rois" dont parlait Sarkozy sans trop les connaître, ne furent jamais invités au banquet républicain où l'on célèbre les hommes de la Liberté, entendez les Révolutionnaires de 89. Avant la prise de la Bastille, la France vivait dans la nuit. Voici le passage que nous avons relevé et qu'aucun média ne reprend d'ailleurs dans ce qu'il faut retenir du discours d'Emmanuel Macron :

« ...ce soir, il n'y a que les Françaises et les Français, le peuple de France réuni, et ce que vous représentez ce soir ici au Louvre, c'est une ferveur, un enthousiasme, c'est l'énergie du peuple de France, et ce lieu dans lequel nous nous retrouvons dit cela, il est parcouru par notre histoire, de l'Ancien régime à la Libération de Paris, de la Révolution française à l'audace de cette pyramide, c'est le lieu de tous les Français, de toutes les France, ce lieu c'est celui de la France que le monde regarde.......»

Pyramide Pingeot

Alors quoi ?

Rattacher la fonction présidentielle à l'histoire des rois de France augure une certaine retenue dans l'exercice de la fonction, une dignité retrouvée, sans doute plus de classe que chez les deux derniers titulaires, mais Macron n'est pas Monck ! Même s'il a pu s'abandonner un jour à une évaluation des compétences actuelles des princes disponibles, il en conclu apparemment que lui-même porterait plus efficacement le combat de rénovation du vieux pays et le gagnerait. Il n'est pas désobligeant de voir aussi qu'il a la gnaque et l'audace alexandrine à saisir l'impossible que nos princes n'ont pas, se satisfaisant, eux, de la rente dynastique et des révérences mondaines qui vont avec.

Certaines officines royalistes déversent une haine incompréhensible contre Emmanuel Macron au seul motif qu'il aurait barré la route à la candidate de la régénérescence, Marine Le Pen. C'est vite oublier que les mots ne suffisent pas à guérir et que la candidate parvenue au sommet de la démagogie n'avait pas sa place dans le fauteuil du débat d'entre-deux-tours où elle a suicidé sa démarche personnelle en direct.

Sur les sites royalistes anti-Macron (ils se reconnaîtront), il est affligeant de constater que le matériau critique est arraché aux intentions supposées du démon-président - tous les verbes sont conjugués au futur - et que si peu concerne le vécu, le palmarès, ni le score des 2/3 (et 89,68% à Paris); le passé concret est avalé en bloc à la sauce mélenchonnienne jusqu'à reprendre les slogans éculés du marxisme de trottoir ! Quelle misère intellectuelle d'en arriver là ! Une fois encore la roycosphère s'abandonne au pilonnage du produit républicain sans voir cette fois qu'il ne lui est pas hostile. Demander à Philippe de Villiers pour s'en convaincre. C'est très contre-productif pour diffuser l'offre monarchiste, mais compréhensible chez des emmurés.

Terminons sur un clin d'œil. Lors d'un entretien dans une émission littéraire à l'occasion de la sortie de son roman Soumission, Michel Houellebecq, au critique qui lui demandait quelle époque de l'histoire il préférait, répondit : « l'Ancien régime ; je me sentirais bien vivre sous l'Ancien régime !».

Tous les royalistes ne sont pas chez les royalistes. Sans doute là, naît l'espérance.


Le président Macron remonte les Champs en ALM


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