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Jeanne 2017

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Marcher dimanche en souvenir de Jeanne d'Arc pour le salut de la France nous rappellera que la fortune sourit aux audacieux (Chinon, Orléans) et qu'aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années ! Jeanne d'Arc n'a pas dix-huit ans quand elle monte à l'échelle de la barbacane des Tourelles. Dunois, le bâtard d'Orléans qui commande à l'armée a 26 ans et déjà des victoires. L'histoire de France est saturée de jeunesse, les rois bien sûr (sauf les derniers au profil de notaires), et bon nombre d'acteurs politiques importants. A titre d'exemple, le 14 juillet 1789, Saint-Just a 21 ans, Danton 29 ans, Robespierre 31 ans, Louis XVI 34 ans, Marie-Antoinette 33 et Louis-Philippe d'Orléans 42 ! Le 10 août 1792, le lieutenant d'artillerie qui devise à la taverne en contemplant l'émeute des Tuileries n'a pas encore 23 ans ! C'est la République embourgeoisée qui nous a apporté la gérontocratie, la République débilitée en soins palliatifs ! Le président Macron marque-t-il l'arrêt ? Là n'est pas la question, il a presque l'âge de Napoléon III.

Cette année pour la Jeanne, Royal-Artillerie fait donner du gros calibre. Pour notre distingué lectorat, voici le fameux discours d'André Malraux donné à Rouen le 30 mai 1964, les plus anciens sauront l'imaginer dans sa voix sépulcrale :


Vous avez bien voulu, Monsieur le Maire, me demander d’assurer ce que le plus grand poète de cette ville,[1] qui fut aussi l’un des plus grands poètes du monde, appelait un triste et fier honneur, celui de reprendre ce que j’ai dit, il y a quelques années, à Orléans, de Jeanne d’Arc victorieuse et de rendre hommage en ce lieu, illustre par le malheur, à Jeanne d’Arc vaincue, à la seule figure de notre histoire sur laquelle se soit faite l’unanimité du respect.

La résurrection de sa légende est antérieure à celle de sa personne, mais, aventure unique ! la tardive découverte de sa personne n’affaiblit pas sa légende, elle lui donne son suprême éclat. Pour la France et pour le monde, la petite sœur de saint Georges devint Jeanne vivante par les textes du procès de condamnation et du procès de réhabilitation : par les réponses qu’elle fit ici, par le rougeoiement sanglant du bûcher.

Nous savons aujourd’hui qu’à Chinon, à Orléans, à Reims, à la guerre et même ici, sauf peut-être pendant une seule et atroce journée, elle est une âme invulnérable. Ce qui vient d’abord de ce qu’elle ne se tient que pour la mandataire de ses voix : « Sans la grâce de Dieu je ne saurai que faire ». On connaît la sublime cantilène de ses témoignages de Rouen : « La première fois, j’eus grand-peur. La voix vint à midi ; c’était l’été, au fond du jardin de mon père… Après l’avoir entendue trois fois, je compris que c’était la voix d’un ange... Elle était belle, douce et humble ; et elle me racontait la grande pitié qui était au royaume de France… Je dis que j’étais une pauvre fille qui ne savait ni aller à cheval ni faire la guerre… Mais la voix disait : « Va, fille de Dieu… »

Certes Jeanne est fémininement humaine. Elle n’en montre pas moins, quand il le faut, une incomparable autorité. Les capitaines sont exaspérés par cette « péronnelle qui veut leur enseigner la guerre » (La guerre ? les batailles qu’ils perdaient, et qu’elle gagne...) Qu’ils l’aiment, qu’ils la haïssent, ils retrouvent dans son langage le « Dieu le veut » des Croisades. Cette fille de dix-sept ans, comment la comprendrions-nous si nous n’entendions pas, sous sa merveilleuse simplicité, l’accent incorruptible avec lequel les prophètes tendaient vers les rois d’Orient leurs mains menaçantes, et leurs mains consolantes vers la grande pitié du royaume d’Israël ?

Avant le temps des combats, on lui demande : « Si Dieu veut le départ des Anglais, qu’a-t-il besoin de vos soldats ? »
- « Les gens de guerre combattront, et Dieu donnera la victoire. »

Ni saint Bernard ni saint Louis n’eussent mieux répondu. Mais ils portaient en eux la chrétienté, non la France.

Et à quelques pas d’ici, seule devant les deux questions meurtrières : « Jeanne êtes-vous en état de grâce ? »
- « Si je n’y suis, Dieu veuille m’y mettre ; si j’y suis, Dieu veuille m’y tenir ! » ;
et surtout la réponse illustre : « Jeanne, lorsque saint Michel vous apparut, était-il nu ? »
- « Croyez-vous Dieu si pauvre, qu’il ne puisse vêtir ses anges ? »

Lorsqu’on l’interroge sur sa soumission à l’Eglise militante, elle répond, troublée mais non hésitante : « Oui, mais Dieu premier servi !». Nulle phrase ne la peint davantage. En face du dauphin, des prélats ou des hommes d’armes, elle combat pour l’essentiel : depuis que le monde est monde, tel est le génie de l’action. Et sans doute lui doit-elle ses succès militaires. Dunois dit qu’elle disposait à merveille les troupes et surtout l’artillerie, ce qui semble surprenant. Mais les Anglais devaient moins leurs victoires à leur tactique qu’à l’absence de toute tactique française, à la seule comédie héritée de Crécy à laquelle Jeanne mit fin. Les batailles de ce temps étaient très lourdes pour les vaincus ; nous oublions trop que l’écrasement de l’armée anglaise à Patay fut de la même nature que celui de l’armée française à Azincourt. Et le témoignage du duc d’Alençon interdit que l’on retire à Jeanne d’Arc la victoire de Patay puisque, sans elle, l’armée française se fût divisée avant le combat, et puisqu’elle seule la rassembla...

C’était en 1429 - le 18 juin !

Dans ce monde où Isabeau de Bavière avait signé à Troyes la mort de la France en notant seulement sur son journal l’achat d’une nouvelle volière, dans ce monde où le dauphin doutait d’être dauphin, la France d’être la France, l’armée d’être une armée, elle refit l’armée, le roi, la France.

Il y avait plus rien : soudain il y eut l’espoir et par elle, les premières victoires qui rétablirent l’armée.

Puis par elle, contre presque tous les chefs militaires, le sacre qui rétablit le roi. Parce que le sacre était pour elle la résurrection de la France, et qu’elle portait la France en elle de la même façon qu’elle portait sa foi.

Après le sacre, elle est écartée, et commande la série des vains combats qui la mèneraient à Compiègne pour rien, si ce n’était pour devenir la première martyre de la France.

Nous connaissons tous son supplice. Mais les mêmes textes qui peu à peu dégagent de la légende son image véritable, son rêve, ses pleurs, l’efficace et affectueuse autorité qu’elle partage avec les fondatrices d’ordres religieux, ces mêmes textes dégagent aussi, de son supplice, deux des moments les plus pathétiques de l’histoire universelle de la douleur.

Le premier est la signature de l’acte d’abjuration qui reste d’ailleurs mystérieux. La comparaison du court texte français avec le très long texte latin qu’on lui faisait signer proclamait l’imposture. Elle signe d’une sorte de rond, bien qu’elle ait appris à signer Jeanne. « Signez d’une croix ! » lui ordonne-t-on. Or, il avait naguère été convenu entre elle et les capitaines du Dauphin, que tous les textes de mensonge, tous les textes imposés, auxquels leurs destinataires ne devaient pas ajouter foi, seraient marqués d’une croix. Alors, devant cet ordre qui semblait dicté par Dieu pour sauver sa mémoire, elle traça la croix de jadis, en éclatant d’un rire insensé...

Le second moment est sans doute celui de sa plus affreuse épreuve. Si, tout au long du procès, elle s’en remit à Dieu, elle semble avoir eu, à maintes reprises, la certitude qu’elle serait délivrée. Et peut-être, à la dernière minute, quand sonnaient des cloches comme celles qui sonnent maintenant, espéra-t-elle qu’elle le serait sur le bûcher. Car la victoire du feu pouvait être la preuve que ses voix l’avaient trompée. Elle attendait, un crucifix fait de deux bouts de bois par un soldat anglais posé sur sa poitrine, le crucifix de l’église voisine élevé en face de son visage au-dessus des premières fumées. (Car nul n’avait osé refuser la croix à cette hérétique et à cette relapse...) Et la première flamme vint, et avec elle le cri atroce qui allait faire écho, dans tous les peuples chrétiens, au cri de la Vierge lorsqu’elle vit monter la croix du Christ sur le ciel livide.

Alors, depuis ce qui avait été la forêt de Brocéliande jusqu’au cimetière de Terre sainte, la vieille chevalerie morte se leva dans ses tombes. Dans le silence de la nuit funèbre, écartant les mains jointes de leurs gisants de pierre, les preux de la Table Ronde et les compagnons de saint Louis, les premiers combattants tombés à la prise de Jérusalem et les derniers fidèles du petit roi lépreux, toute l’assemblée des rêves de la chrétienté regardait, de ses yeux d’ombre, monter les flammes qui allaient traverser les siècles, vers cette forme enfin immobile, qui devenait le corps brûlé de la chevalerie.

Il était plus facile de la brûler que de l’arracher de l’âme de la France. Au temps où le roi l’abandonnait, les villes qu’elle avait délivrées faisaient des processions pour sa délivrance. Puis le royaume, peu à peu, se rétablit. Rouen fut enfin reprise. Et Charles VII, qui ne se souciait pas d’avoir été sacré grâce à une sorcière, ordonna le procès de réhabilitation.

A Notre-Dame de Paris, la mère de Jeanne, petite forme de deuil terrifiée dans l’immense nef, vient présenter le rescrit par lequel le pape autorise la révision. Autour d’elle, ceux de Domrémy qui ont pu venir, et ceux de Vaucouleurs, de Chinon, d’Orléans, de Reims, de Compiègne… Tout le passé revient avec cette voix que le chroniqueur appelle une lugubre plainte : « Bien que ma fille n’ait pensé, ni ourdi, ni rien fait qui ne fût selon la foi, des gens qui lui voulaient du mal lui imputèrent mensongèrement nombre de crimes. Ils la condamnèrent iniquement et… » la voix désespérée se brise. Alors Paris qui ne se souvient plus d’avoir jamais été bourguignonne, Paris, redevenue soudain la ville de saint Louis, pleure avec ceux de Domrémy et de Vaucouleurs, et le rappel du bûcher se perd dans l’immense rumeur de sanglots qui monte au-dessus de la pauvre forme noire.

L’enquête commence.

Oublions, ah, oublions ! le passage sinistre de ces juges comblés d’honneur, et qui ne se souviennent de rien. D’autres se souviennent. Long cortège, qui sort de la vieillesse comme on sort de la nuit. Un quart de siècle a passé. Les pages de Jeanne sont des hommes mûrs ; ses compagnons de guerre, son confesseur ont les cheveux blancs. Ici débute la mystérieuse justice que l’humanité porte au plus secret de son cœur.

Cette fille, tous l’avaient connue, ou rencontrée, pendant un an. Et ils ont eux aussi oublié beaucoup de choses, mais non la trace qu’elle a laissée en eux. Le duc d’Alençon l’a vue une nuit s’habiller quand, avec beaucoup d’autres, ils couchaient sur la paille : elle était belle, dit-il, mais nul n’eût osé la désirer. Devant le scribe attentif et respectueux, le chef de guerre tristement vainqueur se souvient de cette minute, il y a vingt-sept ans, dans la lumière lunaire... Il se souvient aussi de la première blessure de Jeanne. Elle avait dit : « Demain mon sang coulera, au-dessus du sein ». Il revoit la flèche transperçant l’épaule, sortant du dos, Jeanne continuant le combat jusqu’au soir, emportant enfin la bastille des Tourelles. Revoit-il le sacre ? Avait-elle cru faire sacrer saint Louis ? Hélas ! Mais, pour tous les témoins, elle est la patronne du temps où les hommes ont vécu selon leurs rêves et selon leur cœur, et depuis le duc jusqu’au confesseur et à l’écuyer, tous parlent d’elle comme les rois mages, rentrés dans leurs royaumes, avaient parlé d’une étoile disparue…

De ces centaines de survivants interrogés, depuis Hauviette de Domrémy jusqu’à Dunois, se lève une présence familière et pourtant unique, joie et courage, Notre-Dame la France avec son clocher tout bruissant des oiseaux du surnaturel. Et lorsque le XIXe siècle retrouvera ce nostalgique reportage du temps disparu, commencera, des années avant la béatification, la surprenante aventure : bien qu’elle symbolise la patrie, Jeanne d’Arc, en devenant vivante, accède à l’universalité. Pour les protestants, elle est la plus célèbre figure de notre histoire avec Napoléon ; pour les catholiques, elle sera la plus célèbre sainte française.

Lors de l’inauguration de Brasilia, il y a quatre ans, les enfants représentèrent quelques scènes de l’Histoire de France. Apparut Jeanne d’Arc, une petite fille de quinze ans, sur un joli bûcher de feux de Bengale, avec sa bannière, un grand bouclier tricolore et un bonnet phrygien. J’imaginais devant cette petite République le sourire bouleversé de Michelet ou de Victor Hugo. Dans le grand bruit de forge où se forgeait la ville, Jeanne et la République étaient toutes deux la France, parce qu’elles étaient toutes deux l’incarnation de l’éternel appel à la justice. Comme les déesses antiques, comme toutes les figures qui leur ont succédé, Jeanne incarne et magnifie désormais les grands rêves contradictoires des hommes. Sa touchante image tricolore au pied des gratte-ciel où venaient se percher les rapaces, c’était la sainte de bois dressée sur les routes où les tombes des chevaliers français voisinent avec celles des soldats de l’an II.

Le plus mort des parchemins nous transmet le frémissement stupéfait des juges de Rouen lorsque Jeanne leur répond : « Je n’ai jamais tué personne ». Ils se souviennent du sang ruisselant sur son armure : ils découvrent que c’était le sien. Il y a trois ans, à la reprise d’Antigone, la princesse thébaine avait coupé ses cheveux comme elle et disait avec le petit profil intrépide de Jeanne la phrase immortelle : « Je ne suis pas venue pour partager la haine, mais pour partager l’amour ». Le monde reconnaît la France lorsqu’elle redevient pour tous les hommes une figure secourable, et c’est pourquoi elle ne perd jamais toute confiance en elle. Mais dans la solitude des hauts plateaux brésiliens, Jeanne d’Arc apportait à la République de Fleurus une personne à défaut de visage, et la mystérieuse lumière du sacrifice, plus éclatante encore lorsqu’elle est celle de la bravoure. Ce corps rétracté devant les flammes avait affreusement choisi les flammes ; pour le brûler, le bûcher dut aussi brûler ses blessures. Et depuis que la terre est battue de la marée sans fin de la vie et de la mort, pour tout ceux qui savent qu’ils doivent mourir, seul le sacrifice est l’égal de la mort.

« Comment vous parlaient vos voix ? » lui avait-on demandé quand elle était vivante.
- « Elles me disaient "Va fille de Dieu, va fille au grand cœur…" ». Ce pauvre cœur qui avait battu pour la France comme jamais cœur ne battit, on le retrouva dans les cendres, que le bourreau ne put ou n’osa ranimer. Et l’on décida de le jeter à la Seine, « afin que nul n’en fît des reliques ».

Elle avait passionnément demandé le cimetière chrétien.

Alors naquit la légende.

Le cœur descend le fleuve. Voici le soir. Sur la mer, les saints et les fées de l’arbre-aux-fées de Domrémy l’attendent. Et à l’aube, toutes les fleurs marines remontent la Seine, dont les berges se couvrent de chardons bleus des sables, étoilés par les lys…

La légende n’est pas si fausse. Ce ne sont pas les fleurs marines que ces cendres ont ramenées vers nous, c’est l’image la plus pure et la plus émouvante de France. Ô Jeanne sans sépulcre et sans portrait, toi qui savais que le tombeau des héros est le cœur des vivants, peu importent tes vingt mille statues, sans compter celles des églises : à tout ce pour quoi la France fut aimée, tu as donné ton visage inconnu. Une fois de plus, les fleurs des siècles vont descendre. Au nom de tous ceux qui sont ou qui seront ici, qu’elles te saluent sur la mer, toi qui a donné au monde la seule figure de victoire qui soit aussi une figure de pitié !

André Malraux

[1] Corneille : « Ce triste et fier honneur m’émeut sans m’ébranler »

Rétro Flash !!!

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Treize-mai !

Ce jour restera pour les gens de ma génération celui du coup d'Etat d'Alger pour sauver l'Algérie alors française. Que n'avons-nous réussi ! Quelque soit son statut aujourd'hui, l'Algérie serait à parité avec l'Espagne. Au lieu de quoi elle a perdu soixante ans dans le non-développement et l'assèchement de la rente saharienne, pour finir maintenant fracturée en tous sens par une ploutocratie de parvenus sans aveu.

Dans mon entourage, à l'école, dans ma ville, les réactions étaient favorables au putsch, le régime ultra-parlementaire ayant montré une usure rapide au seuil de la supercherie démocratique : plus personne ne faisait confiance à la classe politique, suppléée heureusement par la haute administration qui avait ramassé le pouvoir dans le ruisseau ! L'opinion ne se divisa que lorsque apparut le général De Gaulle dont on se souvenait non pas du rôle historique à Londres mais de la remise aux communistes de pans entiers de l'Etat à la Libération. L'affaire ressembla alors à un 18-Brumaire, mais bon, s'il fallait en passer par là pour sortir toute cette merde des Chambres... la population embraya.

Les gens de la rue ignoraient les problèmes que les analyses des événements d'Algérie dévoilèrent plus tard. On ignorait la répression de Sétif le même jour que la Victoire sur l'Allemagne. L'important était de pacifier de force nos trois départements et de donner la citoyenneté française à tous les habitants du territoire. Il y eut beaucoup de générosité à ce moment-là. Les gens en métropole encaissaient le concept d'une Algérie française intégrée, une métropole symétrique de la rive sud à parité de niveau de vie bientôt. Cela ne dura pas. L'Etat français était assez pourri pour que les gaullistes en prennent toutes les manettes et obéissent aux visions du Général.

Plus tard, j'aurais l'honneur de manœuvrer avec des anciens du 7è RTA passés par l'indigénat, et recevrais la confirmation qu'une Algérie française eut été possible. Dans ma vie professionnelle aussi, j'ai eu à faire confiance à des Algériens sans jamais m'en plaindre. Au lieu de quoi, les jeunes générations d'aujourd'hui n'ont pour projet indépassable que l'émeute ou l'exil alors que les ressources sont bien là !

C'est l'occasion de rééditer quelques commentaires d'Algériens sur cette période, réactions collectées il y a neuf ans par Jacques Guillemain pour le site 33.royaliste (clic) :

- « S’il est en Algérie, un domaine où l’effort de la France ne se discute pas, c’est bien le domaine de l’enseignement. On peut et on doit dire que l’école a été un succès certain. Les vieux maîtres, les premiers instituteurs ont apporté toute leur foi pédagogique sans arrière pensée et leur influence a été extrêmement heureuse » (Abderhamane Fares, instituteur)
- « La scolarisation française en Algérie, a fait faire aux Arabes un bond de mille ans » (Belkacem Ibazizen, conseiller d’Etat)
- « Trente ans après l’indépendance nous voilà ruinés avec plus de nostalgiques que le pays comptait d’habitants et plus de rapetoux qu’il n’abritait de colons »…
- « Beaucoup d’Algériens regrettent le départ des pieds-noirs, s’ils étaient restés, nous aurions peut-être évité cette tragédie » (Boualam Sansal, écrivain)
- « En un siècle, à force de bras, les colons ont, d’un marécage infernal, mitonné un paradis lumineux. Seul l’amour pouvait oser pareil défi… Quarante ans est un temps honnête, ce que nous semble, pour reconnaître que ces foutus colons ont plus chéri cette terre que nous qui sommes ses enfants » (Boualam Salam)
- « Dire que du temps des Français, ici c’était un jardin » (Aït Ahmed, ex-leader FLN)
- « L’œuvre de la France est admirable ! Si la France était restée 20 ans de plus elle aurait fait de l’Algérie l’équivalent d’un pays européen » (un ministre syrien à Ferhat Abbas au cours d’une visite à Alger)
- « Je ne pardonnerai jamais à la France d’avoir quitté l’Algérie » (une Algérienne à Chirac lors d’un bain de foule)
- « Si les pieds-noirs n’étaient pas partis en masse, l’Algérie ne serait peut-être pas dans l’état désastreux dans lequel elle se trouve… Franchement on pourrait presque leur en vouloir » (Malika Boussouf, journaliste)
- « A son indépendance, nul pays extérieur au monde occidental, Japon et Afrique du Sud exceptés, ne disposait d’une infrastructure aussi développée que celle de l’Algérie » (Bechir Ben Yahmed, directeur de Jeune Afrique)
- « La France a commis un crime. Elle a livré le peuple algérien aux tueurs et assassins ». (Ferhat Abbas, maurrassien, à la fin président sans pouvoir du GPRA), et un dernier entendu par le Piéton du roi lors de la visite précitée de Chirac venant d'un gamin de la Casbah d'Alger interviewé par FR2 :
- « Mais pourquoi De Gaulle, il nous a abandonnés ? »

Macron royaliste ?

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Emmanuel Macron n'est pas royaliste mais il n'a pas la haine des rois comme on la croise souvent dans la mouvance de gauche. Par trois fois, il a inscrit son action politique dans une continuité que tous ses prédécesseurs limitaient au quatorze juillet 1789.

saint Louis IX
Dans le droit fil d'une idée exprimée jadis par Jack Lang qui n'objectait pas à l'incarnation de l'Etat par un roi au lieu d'un président élu, Emmanuel Macron relevait en juillet 2015 dans un entretien au journal d'Eric Fottorino et Henry Hermand, Le 1, l'absence du roi en des termes explicites :
« La démocratie comporte toujours une forme d'incomplétude, car elle ne se suffit pas à elle-même. Il y a dans le processus démocratique et dans son fonctionnement un absent. Dans la politique française, cet absent est la figure du roi, dont je pense fondamentalement que le peuple français n'a pas voulu la mort. La Terreur a creusé un vide émotionnel, imaginaire, collectif : le roi n'est plus là ! On a essayé ensuite de réinvestir ce vide, d'y placer d'autres figures : ce sont les moments napoléonien et gaulliste, notamment. Le reste du temps, la démocratie française ne remplit pas l'espace. On le voit bien avec l'interrogation permanente sur la figure présidentielle, qui vaut depuis le départ du général de Gaulle. Après lui, la normalisation de la figure présidentielle a réinstallé un siège vide au cœur de la vie politique. Pourtant, ce qu'on attend du président de la République, c'est qu'il occupe cette fonction. Tout s'est construit sur ce malentendu.»

Quant à savoir, comme il le suggère, si les Français ne voulait pas décapiter le roi Louis XVI, c'est une toute autre affaire. Le Piéton du roi ose imaginer que l'exercice fut autant de "tuer Dieu et ses prêtres" que de raccourcir son lieutenant sur terre, d'où la damnation qui semble nous poursuivre éternellement (cf. Léon Bloy). L'histoire a jugé que le peuple français sidéré ne s'était pas soulevé au lendemain du 21 janvier 1793, acceptant que le sang du roi retombe sur sa tête.


La deuxième fois est relatée dans Challenges par Bruno Roger-Petit :

« Après sa déclaration de candidature, de retour vers Paris, Emmanuel Macron a fait une halte là où les pierres parlent. Loin des caméras et des micros, le néo-candidat à l'élection présidentielle s'est arrêté en la Basilique de Saint-Denis, tombeau des Rois de France. Seul en son destin face aux Transis. Qu'est-il venu chercher là, dans ce grand silence de marbre où dort l'âme de la France ? Conviction. Onction. Transmission. Inscription. Tout cela à la fois sans doute. Les voies qui mènent aux Forces de l'esprit sont impénétrables. Le geste de Macron rappelle qu'il est deux catégories de candidat à l'élection présidentielle: ceux qui hantent les lieux de mémoire, en quête d'encens, et ceux qui occupent les plateaux de télévision, en perte de sens.» (BRP)


La troisième fois se situe dimanche 7 mai à la grande cour (Napoléon) du Louvre dans le discours du nouveau président aux électeurs. Le Louvre de Paris est un peu la Cité interdite française, le cœur du pouvoir royal dans sa phase de construction patiente, Versailles étant la jouissance du projet accompli. Nul à gauche ni à droite n'aurait osé inclure le nom du passé tabou dans son allocution officielle. Les "vieux rois" dont parlait Sarkozy sans trop les connaître, ne furent jamais invités au banquet républicain où l'on célèbre les hommes de la Liberté, entendez les Révolutionnaires de 89. Avant la prise de la Bastille, la France vivait dans la nuit. Voici le passage que nous avons relevé et qu'aucun média ne reprend d'ailleurs dans ce qu'il faut retenir du discours d'Emmanuel Macron :

« ...ce soir, il n'y a que les Françaises et les Français, le peuple de France réuni, et ce que vous représentez ce soir ici au Louvre, c'est une ferveur, un enthousiasme, c'est l'énergie du peuple de France, et ce lieu dans lequel nous nous retrouvons dit cela, il est parcouru par notre histoire, de l'Ancien régime à la Libération de Paris, de la Révolution française à l'audace de cette pyramide, c'est le lieu de tous les Français, de toutes les France, ce lieu c'est celui de la France que le monde regarde.......»

Pyramide Pingeot

Alors quoi ?

Rattacher la fonction présidentielle à l'histoire des rois de France augure une certaine retenue dans l'exercice de la fonction, une dignité retrouvée, sans doute plus de classe que chez les deux derniers titulaires, mais Macron n'est pas Monck ! Même s'il a pu s'abandonner un jour à une évaluation des compétences actuelles des princes disponibles, il en conclu apparemment que lui-même porterait plus efficacement le combat de rénovation du vieux pays et le gagnerait. Il n'est pas désobligeant de voir aussi qu'il a la gnaque et l'audace alexandrine à saisir l'impossible que nos princes n'ont pas, se satisfaisant, eux, de la rente dynastique et des révérences mondaines qui vont avec.

Certaines officines royalistes déversent une haine incompréhensible contre Emmanuel Macron au seul motif qu'il aurait barré la route à la candidate de la régénérescence, Marine Le Pen. C'est vite oublier que les mots ne suffisent pas à guérir et que la candidate parvenue au sommet de la démagogie n'avait pas sa place dans le fauteuil du débat d'entre-deux-tours où elle a suicidé sa démarche personnelle en direct.

Sur les sites royalistes anti-Macron (ils se reconnaîtront), il est affligeant de constater que le matériau critique est arraché aux intentions supposées du démon-président - tous les verbes sont conjugués au futur - et que si peu concerne le vécu, le palmarès, ni le score des 2/3 (et 89,68% à Paris); le passé concret est avalé en bloc à la sauce mélenchonnienne jusqu'à reprendre les slogans éculés du marxisme de trottoir ! Quelle misère intellectuelle d'en arriver là ! Une fois encore la roycosphère s'abandonne au pilonnage du produit républicain sans voir cette fois qu'il ne lui est pas hostile. Demander à Philippe de Villiers pour s'en convaincre. C'est très contre-productif pour diffuser l'offre monarchiste, mais compréhensible chez des emmurés.

Terminons sur un clin d'œil. Lors d'un entretien dans une émission littéraire à l'occasion de la sortie de son roman Soumission, Michel Houellebecq, au critique qui lui demandait quelle époque de l'histoire il préférait, répondit : « l'Ancien régime ; je me sentirais bien vivre sous l'Ancien régime !».

Tous les royalistes ne sont pas chez les royalistes. Sans doute là, naît l'espérance.


Le président Macron remonte les Champs en ALM

Goulard, une européiste aux Armées

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Le ministre des armées parle allemand. Conseiller de Romano Prodi à la Commission européenne, chargée du suivi des travaux constitutionnels de Valéry Giscard d'Estaing, l'énarque fut avant cela et pendant dix ans dans la direction des affaires juridiques du Quai d'Orsay, au sein d'une cellule chargée de suivre la réunification allemande d'Helmut Kohl. A ces titres divers, elle a la Bundesverdienstkreuz (Croix du Mérite fédéral). Elle est ce qu'il est convenu d'appeler une pointure. Son mari étant conseiller d'Etat, elle fait partie de la noblesse républicaine. Entre deux rapports et trois bouquins, elle publia un pamphlet assez corrosif Le Grand Turc et la République de Venise signalant son peu d'engouement pour les ambitions européennes de la Sublime Porte.

Sylvie Goulard et Jean-Yves Le Driant sont les deux poids lourds de ce gouvernement Philippe I. Il n'est pas innocent qu'ils prennent deux domaines réputés appartenir au domaine réservé gaullien, signalant par là que le président Macron va s'appuyer au dossier du fauteuil et laisser gouverner - mais on peut se tromper et soutenir aussi que le combat politique étant porté d'abord sur le Code du Travail, il sera utile que les deux ministères régaliens tournent comme une montre autonome. Goulard étant plutôt typée "Quai", il y aura une bonne entente entre les affaires étrangères et la défense.

Mettre une européiste décorée de la croix de ferà la tête de la défense nationale induit-il que l'axe de progression de nos affaires militaires puisse aller vers cette défense franco-allemande voire européenne qui fait chanter et sauter les cabris ? Nous allons partir de cette hypothèse très plausible.

Les difficultés soulevées par la construction d'une défense commune sont bien connues :

(i)- réticences des pays de l'Est à prendre leurs distances avec le commandement intégré NATO ;

(ii)- budget : personne ne veut payer deux fois, une fois pour l'OTAN, une fois pour la CED, d'autant que la cible des 2% du pib doit être atteinte ;

(iii)- peu d'enthousiasme des peuples à voir revenir dans la géostratégie européenne la France (qui s'est battue pendant des siècles contre tous ses voisins) et/ou l'Allemagne même fédérale (?!) ;

(iv)- place et utilité de la Grande Bretagne dans la configuration continentale ;

(v)- enfin la question qui tue : qui commande ?

Nous allons développer brièvement chaque item.

(I)- A la chute du Mur, tous les pays libérés du glacis soviétique ont candidaté à l'OTAN avant même d'ouvrir des négociations avec le Marché commun. Le déplacement d'une brigade américaine complète en Courlande pour faire baisser le ton du Kremlin comparé à l'impassibilité atlantique dans l'affaire de Géorgie (non-membre) leur a bien fait comprendre la différence entre le in et le out ! A l'heure où nous écrivons, il n'existe aucun pays de l'Est réclamant une défense européenne, d'autant que les élections françaises ont montré une forte hostilité à l'égard de l'OTAN et une compréhension tout à fait étonnante de certains partis à l'égard de la Russie. Des parlementaires français sont même allés en Crimée célébrer l'annexion russe. Or, qu'on le veuille ou non, c'est la France, puissance nucléaire du continent, qui a le majorat de cette défense européenne. Alors risquer le commandement futur d'idiots utiles du FSB n'emballe pas les anciens du Pacte de Varsovie.

(II)- Si tous les pays aujourd'hui dans l'OTAN ont bien compris la nécessité d'accroître les dotations, dans le cas d'un budget européen se posera le problème de la contribution hybride française dans l'enveloppe des 2%. Que vaut la force de dissuasion française dans la défense commune ? Les Français veulent la compter dans les 2% et même la sortir du déficit budgétaire (les 3% de l'Eurozone), les autres pensent déjà que c'est un choix franco-français, un parapluie franco-français, presque un caprice gaullien. A suivre.

(III)- La différence de puissance militaire entre la France, l'Allemagne et les pays de second rang est grande. Il peut y avoir une perception d'écrasement, surtout chez les Etats à palmarès militaires comme la Hollande, le Danemark, la Suède, l'Espagne et dans une moindre mesure la Pologne et l'Italie. Ecouter et adopter les préconisations normalisées, les standards opératoires voire les matériels de guerre de la première puissance du monde ne se transposera pas facilement à des puissances militaires moyennes comme la France ou l'Allemagne. La Grande Bretagne apportait jusqu'ici un point d'équilibre au triangle de puissance par la réputation de son escadre, la technicité exemplaire de son corps d'armée et la retenue en tous temps de son état-major. C'est le point suivant.

(IV)- Outre la qualité des moyens offerts, la Grande Bretagne est aussi un partenaire important dans les moteurs d'avions, les turbines et les missiles aéronautiques. Nous avons des programmes en commun qui nous sont indispensables et on n'a jamais rien fait de mieux que l'Amirauté pour tenir le flanc atlantique de l'Europe. C'est elle qui actuellement repousse les provocations aériennes russes.

(V)- La question du commandement ne se posera pas au début puisque le projet de défense européenne va avancer masqué derrière un commandement provisoire multinational qualifié d'état-major ou tout autre mot-valise, sinon même enchâssé dans le commandement intégré atlantique - plus c'est compliqué, plus ça plaît aux technocrates. Mais à la première crise, dans quelques années, la question arrivera sur la table ou la caisse à sable ! Quel pays prendra le leadership ? La France croit le faire, les autres le redoutent.


M51 français


En conclusion, nous avons toujours soutenu que le critère premier d'une alliance organisée pour la guerre doit être l'efficacité du dispositif bien avant les questions de souveraineté. On ne peut donc qu'attendre ce que vont aligner les quatre ou cinq pays capables de faire manœuvrer des corps d'armée. Et disons-le tout net, rien ne sera redoutable sans la participation de la Grande Bretagne.
Et la dernière pour la route : une alliance de guerre doit aussi faire peur, c'est même primordial et c'est ce que l'OTAN a réussi.

On peut comprendre que la Russie puisse s'inquiéter de cette perspective européenne, et on s'amusera à lire les mises en garde et autres dénonciations/révélations des agents d'influence du Kremlin à Paris, vent debout contre l'Europe organisée. Mais avec Emmanuel Macron, cela risque bien de ne pas suffire. Il a l'air d'en vouloir, le salaud !


Les licornes de fer de l'empire céleste

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OBOR, c'est le grand projet impérial du China Dream de XI Jinping, One Belt, One Road, appelé à structurer la diplomatie chinoise sur toute l'Eurasie en structurant des axes de développement lourd : on parle infrastructures logistiques, centrales électriques, urbanisation... Des variantes plus ambitieuses encore sont diffusées par les agences d'influence pour ajouter un peu de "romantisme" au projet mais aujourd'hui nous nous en tiendrons aux segments parfaitement concrets. Les acquis chinois sont déjà nombreux sur la zone d'effort et formatent les relations diplomatiques avec les deux autres empires, Fédération de Russie et par ricochet les Etats-Unis. Une carte d'abord, prêtée par le MERICS de Berlin (The Mercator Institute for China Studies) pour cerner le projet.


Le pivot historique de la Route de la Soie est en Iran. Les échanges entre le Cathay et la Perse remontent à l'époque des Parthes et il y a du respect mutuel entre les deux nations. Placé jadis au cœur du dispositif commercial est-ouest, l'Iran retrouve naturellement ses marques dans l'OBOR. C'est dans l'ombre de cette influence que s'inscrit la revitalisation du couloir de l'Indus jusqu'au nouveau port pakistanais de Gwadar au débouché du Golfe persique sur le détroit d'Ormuz, qui permet aussi d'accéder à l'Océan indien, zone commerciale la plus prometteuse dans l'avenir. Au nord, les républiques turcophones s'emboîtent les unes dans les autres, chacune ne valant que ce que vaut ses voisins. Elles permettent en bout de course d'atteindre la Méditerranée en passant au nord de la Caspienne. Elles sont alliées à la Chine pour deux raisons : le marché chinois de consommation d'hydrocarbures et de coton d'une part, de l'autre, la résistance opiniâtre de Pékin à l'irrédentisme ouighour qui menace les autocraties régionales par ses fermentations islamistes. Le débouché naturel occidental de la Route de la Soie est la Turquie, ou la Syrie ! On comprend qu'Erdogan ait fait le voyage.

Mais l'OBOR est plus avancé qu'un "projet". Empruntant les infrastructures soviétiques, la Route de la Soie est déjà ouverte dans sa partie froide. Ainsi le trafic ferroviaire par train-bloc vers le soleil couchant fut inauguré le 5 juillet 2015. Un test de 80 conteneurs sur wagons fut lancé au départ de Kunming (Yunnan) pour remonter à Zabaïkalsk sur la frontière russe, traverser la Sibérie puis la Biélorussie jusqu'à Brest et enfin Malaszewicze en Pologne pour transborder les boîtes sur des wagons à l'écartement anglais. Puis Rotterdam. Le trajet dura 19 jours. Les porte-conteneurs de la conférence font Ningbo-R'dam (container yard à container yard) en 50 jours (source). Un test ponctuel fut fait en 2014 entre Yiwu et Madrid. Donc la logistique ferroviaire n'est pas complètement ringarde, d'autant que les Chinois ont montré leurs capacité à lancer des trains de 200 conteneurs sur la taïga. En janvier 2017 ils ont fait un Yiwu-Barking (Londres) en 18 jours. Et le 10 avril dernier (en photo ci-dessous) un train de whisky est parti de Corringham pour Yiwu (Shanghaï).


L'intérêt est de s'affranchir des aléas maritimes et géopolitiques dans une solution quand même rentable en participant au développement local de l'Asie centrale. C'est un peu la philosophie d'aménagement de l'Ouest sauvage américain par les fameuses lignes transcontinentales. Les cadences ne sont limitées que par les capacités de transbordement à l'écartement large ou normal. Les programmes sont établis vers des chantiers classiques de manutention comme Duisburg, Hambourg, Rotterdam... La Deutsche Bahn, opérateur majeur de ce trafic signale que 40000 conteneurs ont été acheminé sur le fuseau Chine-Europe avec des délais compris entre 12 et 16 jours. Un trafic annuel de 100000 conteneurs sera atteint en 2020 (source). Les opérateurs majeurs sont pour l'instant hollandais, allemand et suisse. Le temps est la moitié du transit time maritime, la masse transportée plus rapidement est bien moindre certes et le prix à la tonne moins avantageux (un porte-container océanique prend de 5 à 10000 boîtes de 40 pieds) mais le prix par fer est beaucoup moins cher que par avion pour un délai acceptable. Le transport ferroviaire est auto-financé ; inimaginable en France où l'on chercherait partout des subventions publiques pour construire l'usine à gaz qui va bien !

Il est probable que ce volet ferroviaire sera pour longtemps l'axe majeur de l'OBOR, entre deux puissances économiques (UE et Chine) écrasant toutes les autres sur le continent eurasien. Les ateliers de Dalian ou Datong produisent des locomotives "grand froid" qu'ils vendent facilement en Asie centrale. Par chance les opérateurs européens sont habitués à gérer la complexité de ce type de trafic sur le réseau dense européen, et le dispositif nous apporte de la valeur ajoutée. Le projet est typique du gagnant-gagnant. Il nous reste maintenant à charger des trains vers la Chine :) Notons pour les archives historiques que Calberson France avait lancé un projet de train-bloc régulier entre Gennevilliers et Pékin à la fin des années 80, en raccrochant le Transsibérien en Pologne. Comme souvent en France, les autres acteurs sont restés assis pour voir ce qu'il adviendrait du projet, bien qu'il soit soutenu officiellement par les opérateurs chinois. C'était l'époque où toute l'équipe Calberson Chine parlait couramment le mandarin, mais pas sa haute direction. L'entreprise (GEODIS) appartient maintenant au pôle fret de la SNCF.

Train-bloc chinois vers Riga (Estonie)

On gardera pour une prochaine fois l'étude de la concurrence ainsi créée avec le Passage du Nord-est qui est en cours d'exploration. Il s'agit de passer des navires de commerce entre la Mer du Nord et la Mer jaune par l'Océan arctique en profitant du réchauffement climatique. On peut anticiper que cette route sera empruntée par les vraquiers plutôt que par les porte-conteneurs qui ont besoin de régularité et de ports d'escale rapides, ce qui n'est pas le cas sur toute la côte russe.

Le volet maritime de l'OBOR est moins évident. Les routes existent et sont exploitées par trois alliances maritimes dans lesquelles sont déjà les grands transporteurs chinois : l'Ocean Alliance regroupe CMA-CGM (FRA), COSCO (RPC), Evergreen (ROC) et OOCL (HKSAR). L'inclusion de l'Afrique anglaise dans un courant d'échanges risque d'être décevante, au moins au départ. Il n'y a pas de réels volumes et les acteurs locaux laissent encore à désirer, sauf à recoloniser les ports comme au Pirée. Plus surprenant est le projet de contournement de la Mer de Chine méridionale par les trois fuseaux terrestres : l'un traverse la Malaisie en direction de l'Indonésie par le hub de Singapour, l'autre passe le Triangle d'Or birman (l'ancienne Tea Horse Road) depuis le Yunnan en direction de Calcutta, le troisième descend du Cachemire, longe l'Indus puis franchit le Balouchistan vers le port "chinois" de Gwadar (voir la carte ci-dessus). Les deux derniers fuseaux posent problème à l'Inde qui, accablée de neuf cents millions de pauvres, n'a pas les moyens de suivre, encore moins de concurrencer le projet de Pékin par le sien propre. Mais le but à atteindre n'est peut-être pas si désintéressé pour Pékin.


La masse de crédits d'investissements déversée sur les fuseaux terrestres de la One Belt sera en renminbi yuans. A partir d'un trillion de dollars en RMB en circulation hors de la zone d'intérêts chinois (Asie du Sud-Est), la monnaie céleste devient une devise internationale et monnaie de réserve, et on parle déjà au pluriel, en trillions ! Paul Chan Mo-Po, Secrétaire au Trésor de Hong Kong, ne s'y est pas trompé qui veut mettre au pot de l'Asian Infrastructure Investment Bank et faire prendre par les banques de la place les opérations quotidiennes de l'OBOR. D'aucuns doutent que les tycoons honkongais suivent le risque pris par l'Administration en surenchérissant sur l'OBOR, leurs affaires locales rapportant bien plus et sans risques majeurs ni souverains. Il n'en reste pas moins que le savoir-faire inimitable de la place de Hong Kong et ses connexions privilégiées au sein de la galaxie Nylonkong (clic) sont un atout pour le projet de Xi Jinping.

Plus généralement, le projet chinois qui devrait mobiliser des trillions de yuans sur dix ans suscite réticences et jalousies d'autant plus que Pékin "achète" les pays partenaires par des crédits à guichet ouvert. OBOR c'est open bar ! Ce pourquoi la délégation de l'Union européenne au grand raout du 14 mai à Pékin a marqué publiquement son agacement en brandissant les barrières non-tarifaires chinoises au commerce réciproque, sans parler des libertés publiques fortement secouées en Chine continentale.
Le président de la Chambre de commerce européenne à Pékin, Wuttke, est allé jusqu'à dévoiler que les compagnies chinoises profitaient de l'ouverture des investissements extérieurs pour faire évader plus facilement des capitaux. L'Inde pour sa part a montré son petit air boutique en refusant que "son" Cachemire soit inclus dans l'OBOR. Par contre Kim Jong-un avait envoyé un observateur : des cartes existent pour un fuseau Harbin ou Shenyang vers Busan sur la mer du Japon. Les Etats-Unis étaient absents ; Donald Trump essaie de comprendre ce qu'il se passe dans tous ces p*tains de pays imprononçables comme la Saskatchewan. Mais Vladimir Poutine est content, lui qui bénéficie gratuitement de la géographie ad hoc pour profiter à fond de ce projet colossal.

China Ocean Shipping (Group) Company

Postscriptum : un éclairage différent sur l'excellent site QuestionChine :
Le projet pharaonique des routes de la soie à 1700 milliards de $ par François Danjou (17/5/17)

Aux commandes d'AirForceOne

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Le grand Gamin tout beauf au chien de prairie mort sur la tête fait un sans-fautes dans le vieux monde, à savoir qu'il n'a encore insulté personne qui ne s'y attendait pas, sauf un peu, le président réélu de l'éternel Iran. Mis à part ce raidissement que nous estimons contre-productif*, le Commander in Chief se couche comme un roseau sous le vent de la realpolitik à mesure qu'il avance dans sa tournée promotionnelle d'une diplomatie en anglais facile. Aussi, l'inquiétude des chancelleries commence-t-elle à se dissiper et le sera tout à fait quand Air Force One décollera de Sicile pour retourner à la Maison Blanche soigner son hyperactivité chronique. Lire avec profit le brûlot mi-amusé mi-angoissé de David Brooks dans le New York Times (15 mai), When the World is Led by a Child.
Note : (*) La République islamiste sera plus facilement abattue par les Levi's 501, les réseaux sociaux US ou chinois et le Coca Cola que par le confinement ou l'embargo. C'est la rue et le bazar qui feront plier les mollahs désormais enrichis et ouatisés.

Hubert Védrine confiait à Pascal Gauchon le mois dernier dans la revue Conflits l'exigence d'une attention redoublée à l'égard du pouvoir erratique américain : « Il va falloir analyser froidement ce qui sort, au jour le jour, de la pétaudière de Washington. Wait and see! Complété par : observation et vigilance. Il est difficile de distinguer les sujets sur lesquels il (Trump) va s’entêter car c’est ce que réclame son électorat (et que de dégâts en vue !), et ceux où la réalité le recadrera brutalement. Ainsi je suis persuadé qu’il ne "sortira" pas les États-Unis de l’OTAN.» On sait depuis ce soir qu'il n'en sort pas !

Ainsi est-il parfaitement inutile de gloser sur les mots de campagne ou les intentions exprimées par le Gamin puisqu'il ne s'y tient pas. On doit suivre l'évolution de la pathologie au jour le jour, noter la température, les humeurs, les silences, et verser la cellule Amérique du Quai d'Orsay à l'Hôpital Sainte-Anne de Paris, spécialisé dans les chiens fous et autres canards sans tête, qui démêlera tout ça. Bonjour monsieur Le Drian ! Autant dire que dérouler une prospective de la présidence Trump est se foutre du monde, ce que nos experts en géostratégie savent faire le mieux, jamais décontenancés par l'infirmation de tous leurs savants pronostics.

Au fait, on dit que l'ambiance au retour sera russe. Flynn, Comey, Rosenstein, Manafort, Brennan, Mueller, Sessions et l'ambassadeur Kislyak sont dans le casting de vidange de la fosse à purin des interférences russes sur la campagne présidentielle de 2016. Trump est-il vraiment au courant des détails ? Ses dénégations marquent plus l'agacement de subir le pilonnage de la presse qu'il hait que la conviction d'avoir tout bien fait tout propre. Y comprend-il quelque chose ? oui, si on le lui explique longtemps ! Une procédure d'impeachment ne sera pas enclenchée au Congrès puisque les Républicains ont la majorité et les investigations en cours, même positives (il y a de fortes chances qu'elles le soient), risquent bien de ne pas l'atteindre au simple motif non dit, qu'il n'est pas capable d'intuiter les nuts and bolts d'un projet pareil ! Les politiciens américains qui vont aux élections de mi-mandat commencent à sentir l'odeur putride de la campagne achevée et intègrent le mouvement présidentiel de navette à tisser dans leur préparation. Faire des croix sur le calendrier mural de la cuisine est leur meilleur anxiolytique.

Finissons sur les résultats de la réunion spéciale de l'Alliance atlantique du 25 mai, qui nous concernent plus que la guerre de cent ans des fils d'Abraham en Palestine que Donald Trump abandonne à leur haine héréditaire : "le problème est tout entier entre vous deux". Qu'ils s'en démerdent !


Le Beauf en majesté bouscule le Monténégrin et prend la pose et la lumière !

A Bruxelles, le Secrétaire général Stoltenberg a organisé les débats en fonction des capacités d'attention du président américain. Ainsi les interventions des chefs d'Etat ont-elles été limitées chacune à deux ou trois minutes pour éviter que le Gamin ne s'empare de son smartphone pour tweeter sur la météo belge ou féliciter la station spatiale ! Les mémos ont été simplifiés au niveau d'une classe de cinquième comme on en fait défiler parfois au Quartier général, sachant que Trump n'avait pas lu les dossiers atlantiques préparés par ses services. L'important pour tout le monde à Bruxelles était que, n'y comprenant rien ou pas grand chose, il laisse les affaires en l'état, se contentant de réclamer une hausse des participations européennes. C'est ce qu'il a fait avec véhémence après avoir évoqué l'article 5*** du Traité de l'Atlantique nord dans son allocution mémorielle devant la sculpture du Onze-Septembre. Il n'est pas allé plus loin dans la confirmation de cet engagement très important pour les Etats riverains de la Mer baltique, si l'on en croit le reportage de Foreign Policy(clic). Il inclut cependant une donnée nouvelle dans le schmilblick financier - et c'est tout ce qui l'intéresse en bon businessman - les contributions promises antérieurement par les Etats-membres et non versées (23 pays sur 28**) sont inscrites au "crédit" du compte US et restent dues, ce qui ne va pas de soi en Allemagne et à l'Est ! Considérons que l'engagement américain du Gamin tiendra bien dix-huit mois à partir de maintenant, après... c'est après, S.E.O.O.* !
* sauf erreurs ou omissions
** selon la Banque mondiale les cinq pays finançant leur défense à 2% PIB ou plus sont les USA, la Pologne, la France, l'Estonie et la Turquie
*** Art. 5 du Traité : « Les parties conviennent qu'une attaque armée contre l'une ou plusieurs d'entre elles survenant en Europe ou en Amérique du Nord sera considérée comme une attaque dirigée contre toutes les parties, et en conséquence elles conviennent que, si une telle attaque se produit, chacune d'elles, dans l'exercice du droit de légitime défense, individuelle ou collective, reconnu par l'article 51 de la Charte des Nations Unies, assistera la partie ou les parties ainsi attaquées en prenant aussitôt, individuellement et d'accord avec les autres parties, telle action qu'elle jugera nécessaire, y compris l'emploi de la force armée, pour rétablir et assurer la sécurité dans la région de l'Atlantique Nord.»
« Toute attaque armée de cette nature et toute mesure prise en conséquence seront immédiatement portées à la connaissance du Conseil de Sécurité. Ces mesures prendront fin quand le Conseil de Sécurité aura pris les mesures nécessaires pour rétablir et maintenir la paix et la sécurité internationales.»


Double complément : l'Européenne de la délégation américaine est Melania Trump. Slovène de naissance, Melanija Knavs parle cinq langues et a vécu quelque temps à Paris, Londres et Milan. Elle affirme à qui veut bien cesser de l'admirer pour l'écouter un peu, donner son point de vue sur tout à son mogul de mari, qu'il en tienne ensuite compte ou pas.
De formation pratique - sa beauté rayonnante n'empêche pas un don de perception des réalités - elle apporte le témoignage de captivité des Européens de l'Est et plaide pour sauvegarder aujourd'hui leur sécurité. Elle montre aussi une certaine finesse dialectique qui semble interdite à son mari . Elle assume sa charge de First Lady avec élégance ; c'est l'Europe finalement !
Autre "modératrice" de talent dans l'entourage présidentiel, Yaël (Ivanka Trump) Kushner. Elle a du sang tchèque par sa mère et parle aussi français. C'est une battante intelligente qui sait réussir en affaires de façon classique et s'est convertie au judaïsme par amour. Les femmes de l'entourage Trump remontent le plafond de verre de la compréhension du monde, comme souvent :)



Flotte stratégique

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Sommes-nous devenus intelligents ? Le jour de son départ de Matignon, l'ancien maire de Cherbourg, Bernard Cazeneuve, a signé le décret* de la flotte stratégique. Non, non, ce ne sont pas les sous-marins nucléaires construits aux arsenaux de Cherbourg justement, ni le groupe aéronaval que nous promenons au bord des zones de conflits pour nous conserver le fauteuil au Conseil de sécurité des Nations-Unies. Ce sont les chaînons de nos filières logistiques salées qui jusqu'ici n'étaient pas gérés autrement que par la mobilisation générale de moyens affectés (plus ou moins) à des besoins à naître du conflit en préparation. Autant dire le grand flou. Le décret* définit ainsi le pool concerné :

La flotte à caractère stratégique instituée à l’article L. 2213-9 du code de la défense comprend :
– Les navires et emplois y afférents susceptibles d’assurer, dans une logique de filières stratégiques et aux fins de préserver l’intégrité de celles-ci, la sécurité et la continuité :
1° Des approvisionnements industriels, énergétiques et alimentaires du territoire métropolitain et des outre-mer ;
2° Des transports opérant dans le cadre d’une délégation de service public ;
3° Des services portuaires et des travaux maritimes d’accès portuaire ;
4° De l’intervention et de l’assistance en mer des navires en difficulté ;
5° Des communications par câbles sous-marins ;
6° De la recherche océanographique ;
7° Des travaux de production énergétique et d’extraction en mer.
Et plus loin il est précisé - ce qui montre en creux qu'on va récupérer des moyens originellement français mais passés sous pavillon de complaisance si nécessaire, la langue de communication entre les navires affectés à la flotte à caractère stratégique et les autorités publiques françaises est la langue française.
* Le décret n°2017-850 du 9 mai 2017 est accessible en cliquant ici.


Reste à établir la liste des navires et autres moyens mobilisables et suivis dès à présent. Disons tout de suite que ce n'est pas l'ancien maire du Havre qui va revoir a minima ce dispositif intelligent, qui peut-être a motivé une passation de pouvoirs particulièrement chaleureuse à l'hôtel de Matignon.

Nouvelle goélette ARANUI 5 pour la Polynésie française

Pour bien comprendre les types de navires stratégiques, au sens des intérêts immédiats de l'Etat en temps de paix comme en temps de guerre, nous citerons les remorqueurs, des dragues, des démineurs, les moyens de liaisons maritimes en continuité territoriale comme les ferries ou les goélettes polynésiennes, des méthaniers, des porte-conteneurs, les vedettes de la SNSM... « Cette flotte fait l’objet d’un plan triennal arrêté par le ministre en charge de la marine marchande, après avis de cette commission (interministérielle de la flotte stratégique). La liste des navires est tenue par le commissaire délégué au transport maritime, sous l’autorité de ce même ministre » nous dit le journal Le Marin. Outre notre marine de guerre, les autres acteurs sur zone sont les Douanes et le futur corps européen de garde-côtes s'il se crée.

Bien qu'impliqué, le ministère des Armées n'est pas l'initiateur de la flotte à caractère stratégique puisqu'il avait déjà programmé ses mécanismes de soutien propre, comme le contrat d'affrètement des Abeilles de remorquage hauturier ou ceux d'autres moyens logistiques. La démarche permet de projeter à cinq ans le panorama des moyens disponibles en cas de crise grave pour tous les services mouillés de l'Etat, et elle accompagne une re-francisation de ces moyens dans une approche de souveraineté quand c'est nécessaire et possible. L'Etat devient stratège (enfin) et commence à prendre en compte notre zone économique exclusive, la deuxième du monde. Il était temps. Bravo à MM. Cazeneuve, Le Drian et au CA Patrick Augier.

ZEE française

Fin d'un cycle souverainiste

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Premier Edouard Philippe
On le sentait venir dès l'intronisation sans en avoir la certitude ou l'espoir selon l'opinion de chacun, le jeune président allait ringardiser la classe politique malgré le renfort des gérontes et la feuille de route paternaliste de monsieur Fabius. Les "gens", comme nous appelle Jean-Luc Mélenchon - le grand battu de l'élection présidentielle - en ont ras-le-bol, et du désordre général de la société française et de l'invocation incessante aux mânes des ancêtres, fondateurs et autres statues de bronze verdi de la République en soins palliatifs. En langage de djeune on dit : soûlant ! Droite, gauche, les mots-valises sont vides de sens, sans valeurs, et les porteurs de valise inaudibles. On refuse de les écouter. Les incantations gaulliennes de certains le disputent à la mesquinerie programmatique des autres, la mobilisation de classe tentée une dernière fois par les partis de la gabegie menacés ne parvient pas à coaguler les opinions réputées de gauche, mais qui ont retraité partout sur le spectre politique nouveau. Le Français veut du neuf et que crèvent les Guaino, Hortefeux, Accoyer, Aubry, Cambadelis, Dray, Le Guen, Vaillant, Raffarin, Woerth, répétiteurs usés d'un théâtre sans public. Et quid de Collomb à demi gâteux. C'est l'opportunité, pour une nouvelle génération guidée par la raison et les réalités, d'accéder aux affaires publiques. On en trouve partout et je vais en citer une quinzaine, hors gouvernement, pour faire bon poids :

Baroin avait ses chances en substitut d'un Fillon incapable d'atterrir dans le monde réel, il est le leader naturel du parti républicain survivant, il aurait mieux fait d'en être sûr il y a deux ans. A côté de lui, les gens comprennent les positions, discours ou postures de Wauquiez, Kosciusco-Morizet, Beigbeder, Keller, Solère..., à Blois Rama Yade et aussi bizarre que ça puisse paraître, Sarkozy, dont le discours n'est pas formaté par les vieilles lunes même s'il a fait bosser Guaino.
Jadot, De Rugy, la belle Pompili sont convoqués à critiquer Nicolas Hulot sur un argumentaire étayé avec une certaine audience mais ailleurs ne restent que Hamon, Corbière plus que Garrido et quelques autres à savoir articuler une proposition politique d'équerre ; à noter El Khomri courageuse et compatible ; sinon le reste est mort de darwinisme aggravé, fameuse loi d'attrition des espèces inadaptées. Reste Mélenchon (36 ans de carrière politique !) transformé en cairn terrier bolivarien de l'opposition en meute, petite meute. Si on continue à gauche, on arrive à droite, et là c'est le désert depuis que Marion Maréchal-Le Pen a jeté l'éponge. Nombreux étaient les électeurs frontistes de second tour qui ont voté FN en attente de ce jeune leader naturel qui accumulait les preuves de ses capacités. Royal-Artillerie l'a déjà dit ici. Personne ne s'enflammera plus pour les frères Philippot, Rachline, Collard ou le pâle Aliot, Nicolas Bay peut-être, un mégrétiste, ça s'explique. Sinon c'est mort comme le prouve le pronostic d'Opinionway dans l'hémicycle ci-dessous :

Sondage Opinionway du 26 mai 2017


Dans Challenges, Bruno Roger-Petit a stigmatisé la ringardise que nous évoquions en amorce de ce billet. Il m'autorise à le citer. Attention au verre pilé, éloignez les enfants : « Qui confesse la fascination de la sphère médiatique pour les tenants de la fermeture et du conservatisme, en ses multiples facettes… Après le Brexit et Trump, la sphère avait programmé l'avènement de la fermeture et du conservatisme… Au mieux, elle attendait Fillon. Et Sens commun. Et la Manif pour tous. Et l'insécurité culturelle en bandoulière. Au pire, elle guettait Le Pen. Et la sortie de l'Euro. Et la préférence nationale. Et la grande division française. Bref, la sphère, après avoir starisé l'ensemble protéiforme des enfermés et des conservateurs, avait comme fini par penser elle-même que l'image qu'elle offrait à voir au peuple était devenue vérité. Zemmour et Polony le matin, sur RTL et Europe 1. Finkielkraut et Onfray chez Taddeï et Ruquier le soir sur France 2. Et bien d'autres, ici et là, où l'on discute et dispute les moindres soubresauts de l'actualité… Tous étaient dans la place, en majesté. Partout, la Réac académie. Depuis dix ans. Et tous annonçaient la fin du politiquement correct, des idéaux progressistes, et d'une certaine idée de la France. La sphère les avait créés et elle en était contente. La triangulation de Gramsci était accomplie et l'hégémonie culturelle acquise grâce à eux. Leurs audiences, partout où ils étaient produits, confirmaient l'intuition...»

C'est vache de la part de BRP mais le corps électoral, souverain constitutionnel, a désavoué la sphère. Il a acheté l'Europe fédérale, la flexisécurité, le chômage précaire, l'euro, l'élégance intellectuelle, les paillettes du golden boy et une jeunesse qui a fait ses preuves par trois, millions. Macron n'est pas "mon" programme mais le peuple a dit ! Les grincheux et les battus (c'est pareil) dénient la légitimité de l'impétrant au motif que sa base électorale serait minoritaire en arithmétique. C'est faire preuve de bêtise puisqu'il n'existe aucune légitimité du nombre en République pour cause de prolifération des écuries courant aux cocardes avec chauffeur. Tous les présidents élus de la Cinquième l'ont été au second tour, donc minoritaires au premier sur un socle parfois étriqué (cf. Chirac). La seule légitimité s'il en faut une, est d'exercer quotidiennement le pouvoir en étant obéi sans reproches ni murmures par l'administration du pays. C'est le cas. En fait, la démocratie c'est de l'algèbre plutôt que de l'arithmétique. Dur, dur pour les littéraires !

Carl Lang - PdF
Au milieu des ruines (comme disait l'autre) on remet aujourd'hui en marche le moulin à poivre du souverainisme autour des mêmes (clic), nul ne voulant croire que le segment politique ait disparu. Nous voyons des gens de qualité se parler, faire cénacle avant de faire un parti éphémère, qui pensent avoir une créance sur l'avenir. C'est la démarche souverainiste agglomérante qui n'a jamais rien remporté parce que la lutte des ego a toujours primé l'intérêt général et que le corps électoral se méfie terriblement des politiques qu'il a prématurément usés. Du jour au lendemain ces gens si distingués sont devenus des cadavres exquis. Inutile d'attendre que Macron en ses conseils et son gouvernement se plante pour appeler au recours. Aussi haut que sera remontée la boule de neige, elle ne déclenchera pas d'avalanche. Toute une classe est sortie de l'épure pour n'avoir pas compris les vrais ressorts de la société française que les générations montantes veulent façonner autrement, connaissant le passé mieux peut-être que ne le croient les anciens, mais ne le jugeant pas utile dans la configuration socio-économique de demain matin. Sur ces bases, on dégage le vieux monde, et j'en suis !

Carnage de l'entre-soi : les souverainistes s'enferment, s'emmurent, ne voient plus le soleil d'Austerlitz, seul les éclaire le pessimisme aux falots tremblants de la crypte où on fait de l'écho pour passer le temps. Nous ne les nommons pas pour ne pas ajouter l'insulte à la disgrâce ; ils sont morts, et leur propre appréhension du monde en insinue malgré tout l'idée dans les cerveaux. Ils perçoivent vaguement leur inutilité, ne peuvent pas le dire, se réunissent pour un dernier pétard mouillé aux législatives puis disparaîtront, épuisés mais ravis d'avoir fini de pousser le rocher de Sisyphe. Ceux qui ont tenté le diable comme Villiers ou Chevènement vous diront qu'il y a des fenêtres d'opportunité, des trains qui passent puis qui ne passent plus. On ne peut plus balader des partisans jusqu'au prochain scrutin comme le font les Le Pen depuis toujours en comptant d'avance les sous rapportés par la séquence électorale. La prochaine fois... il n'y aura pas de prochaine fois !

Macron a prévenu le président Juncker qu'il ferait tout pour gommer les débordements insupportables de la Commission européenne à commencer par le dumping social. Il va couper l'herbe sous le pied aux europhobes allant jusqu'à disputer sa rigueur intenable au dogue de Berlin. Varoufakis* a parfaitement vu la fente dans la palissade libérale en soutenant Macron*. Sur quoi nous battrons-nous dans quatre ans s'il réussit ? Et ne faut-il pas souhaiter qu'il réussisse pour l'avenir de notre pays ?

La donne est passée maintenant aux quadragénaires décatalysés avec quelques accommodements pour satisfaire aux équilibres victorieux. Rien n'est repris du fonctionnement des quinquennats précédents. Le nouveau pouvoir est attentif à lui-même, à ses dossiers et à sa communication la plus sobre possible. Modelant la gouvernance à sa main, l'Elysée a pris le parti de se taire le plus souvent, à l'Ottomane, ce qui enrage la corporation des ratés qui se nourrissent des excréments médiatiques du pouvoir et croient gouverner en lieu et place des élus par l'alarme, le scandale, le scoop.

L'affaire Ferrand est typique de cette gestion muette du problème. On ose s'opposer à la Sainte Inquisition du Canard Enchaîné et pis que tout, Matignon snobe la campagne de presse contre le ministre, ce qui a le don d'enrager les dîneurs du soir qui somment à tout va, mais en vain ! Les journalistes de gouvernement, les influenceurs qui répugnent à se dépenser dans une campagne électorale pour prendre les choses en main, toute cette racaille planquée derrière une carte de presse, véritable sauf-conduit pour l'assassinat médiatique de leurs semblables, tout ça va être descendu à son niveau le plus trivial, utilitaire, news et commentaires, le quatrième pouvoir, qui a fait tant de mal, va se dissoudre dans le désintérêt général et les avantages fiscaux. Pour qui se prenaient-ils ces types ? Des faiseurs d'opinion, des faiseurs de rois. Tu parles ! Mort aux cuistres, à légions ! Un bol d'air frais !


Et le roi dans tout ça ?
Ben... rien ! La période d'attention de l'opinion aux débats politiques va se refermer. Nul n'a parlé du roi, sauf le président candidat, ce qui est un comble. La roycosphère n'a rien produit d'audible, n'a su promouvoir son offre politique. Les princes pour leur part s'en sont bien gardés. L'opinion avait le souci d'arbitrer au bon sens les choses sérieuses, rejetant les délires et foutaises de préaux, nulle figure de proue chez les royalistes n'a réussi à faire "sérieux". C'est dommage car la défaite cuisante du souverainisme français induit celle du royalisme en son état doctrinal actuel. C'est l'aggiornamento ou mourir. On récrit la copie ! Qui lève le doigt ?

Quant aux deux critiques insatiables au balcon du Muppet Show, laissons-leur le plaisir d'avoir raison tout seuls contre tous.



note (*) :« En écrasant le printemps grec, la Troïka a non seulement porté un coup à la Grèce, mais aussi à l’intégrité et à l’esprit de l’Europe. Emmanuel Macron a été le seul membre du système qui a essayé de s’y opposer. Je pense qu’il est de mon devoir de faire en sorte que les Français progressistes, sur le point d’entrer (ou de ne pas entrer) dans le bureau de vote au second tour, fassent leur choix en ayant pleinement conscience de cela », écrivit M. Varoufakis entre les deux tours de la présidentielle (cf. Libé).

Postcriptum : on aurait pu faire un billet de même poids sur l'ensemble de l'Union européenne en amorçant outre-Manche depuis que le UKIP n'a plus qu'un seul conseiller municipal après Brexit depuis le 4 mai 2017 (date de l'élection à un tour des municipalités); ils avaient 144 sortants ! Les résultats hollandais et autrichiens n'ont pas été probants, l'AfD allemande est vampirisée par Martin Schulz... Ailleurs les souverainistes, même minoritaires, ne progressent plus parce que leurs adversaires s'organisent, jusqu'en Pologne. L'échec français a un retentissement considérable autant que le succès promis qualifiait partout les partis nationalistes.


L'Europe tombe du hamac !

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"Allo Norfolk, nous avons un problème". Le général français Denis Mercier, commandant l'ACT de Norfolk, a lui-aussi un problème. Et Royal-Artillerie a tout autant le sien si le blogue doit expliquer à son lectorat impatient cette dispute germano-yankee habilement camouflée jusqu'ici. Que devient l'Allied Command Transformation, l'agence de prospective atlantique, après l'ouverture des hostilités entre la Chancelière et le Commander in Chief des greens de golf ? Que devient le Stability Policing Concept Development* qui projette la stabilité obligatoire en avant du front de l'Alliance ? Sans ce volet impérialiste, l'OTAN devient réellement obsolète, puisqu'il encadre la lutte anti-terroriste sans frontières. Par le monde entier et jusqu'à Port Moresby chacun sait que la Chancelière Merkel entre deux pintes a douté à haute voix de l'implication de Donald Twitter Trump dans la défense commune atlantique, celui-ci répondant presque aussitôt en éructant un tweet assassin que les archives doivent archiver :



Le fin stratège que Joe-Six-Pack s'est choisi ne menace plus la Chine hypocrite ou la sournoise Russie mais son alliée de référence en Europe continentale, qui tout simplement le prend à son tour pour un con ! Tout réside dans le déficit du commerce extérieur subi par les Etats-Unis qui fabriquent une vacherie invendable en Teutonie. Le caprice enfantin du refus de serrer la main d'Angela Merkel, le petit billet à 350 billions qu'on lui passe lors de sa visite à la Maison Blanche, les insultes à peine voilées sur l'accaparement allemand d'avantages indus, la grossièreté innée du parvenu sans autre bagage que son argent lors de sa tournée européenne, son refus à l'obstacle de vieille carne infoutue de préparer ses réponses au G7 sur l'Accord de Paris (COP21), ses gamineries de corpulence hors de saison à Bruxelles et le golf cart de Taormina autant que sa moue sur un menton mussolinien ont eu raison de la patience allemande. A tel point que la déclaration d'Angela Merkel (ci-dessous) a été endossée immédiatement par son adversaire du SPD aux prochaines élections du Bundestag, Martin Schulz, et nul doute que les chancelleries européennes analysent dès aujourd'hui la nouvelle donne lancée sur le tapis vert depuis la kermesse CSU de Munich, les Anglais étant les premiers déçus de leur éviction du bac à sable.
« Die Zeiten, in denen wir uns auf andere völlig verlassen können, sind ein Stück vorbei [...] Wir Europäer müssen unser Schicksal wirklich in unsere eigene Hand nehmen.»

Soutenir le regard inquisiteur d'un enfant de sept ans et 110 kilos est une épreuve. Merkel ne compte plus subir l'affront de la Bêtise et si les mots de Munich précipitaient brutalement la synthèse de la diplomatie allemande, ils ont le mérite de mettre au net l'obscénité des nouvelles relations transatlantiques depuis l'intrusion du mogul newyorkais sur la scène du monde. C'est l'Europe qui est au contact des défis - d'aucuns diraient des provocations américaines - c'est l'Europe qui doit contenir la revanche russe et développer une économie de libéralisation sur un territoire qui va de la Volga jusqu'à la mer d'Okhotsk, c'est l'Europe qui en prendrait plein la gueule si les grands enfants se battaient un jour, c'est l'Europe le muet de la pièce, jusqu'ici. Mais pour faire entendre sa voix au-dessus du vacarme mondial, il faut revenir aux fondamentaux : si vis pacem para bellum !.

Sur la psychanalyse de Merkel on lira avec profit le billet en anglais de Meiritz, Reimann et Weiland dans le Siegel par ici. OK, ils se détestent ! What next ?



Que veut dire ne compter que sur soi dans l'esprit merkelien ? Sachant l'intuition pragmatique des Allemands (et des Prussiens surtout) on peut s'interroger sur le périmètre du cercle de chariots. L'Allemagne pense-t-elle se défendre efficacement à vingt-sept ? Elle acte la sortie de la Grande Bretagne du pacte européen de défense d'un côté, bloque la Turquie de l'autre, est-ce pour déployer des moyens nouveaux dans les Balkans ou en Baltique ? Le plus facile pour les Allemands est de nourrir le chapitre PSDC** du traité de Lisbonne et de... réarmer. Pour l'instant la Bundeswehr n'est même pas l'ombre de la Wehrmacht, mais la République fédérale dispose des savoirs, épures, plans et matières, prototypes plus l'indispensable : les usines de fabrication. En quatre ans la transformation peut être spectaculaire dans les trois armes. A l'échéance de dix ans, elle coiffe toutes les armées conventionnelles du continent, y compris celles du Royaume-Uni.

Mais la Chancelière de Prusse n'est pas un distributeur d'assurances gratuites. Pas question de dépenser sans compter dans les canons d'assaut si les voisins se vautrent dans les prestations sociales à compte d'autrui. La première raison est électorale, l'opinion allemande, pacifiste au fond d'elle-même, ne l'acceptera pas. L'Europe à défendre devra être rhénane avec des comptes publics en ordre, des déficits non récurrents et maîtrisés, une monnaie allemande et plus si affinités. C'est ici qu'on aborde aux dangers de la fédéralisation macronienne. La France est à fond sur son petit moteur et ne pourra pas faire beaucoup plus avant longtemps. Ce dont elle dispose aujourd'hui en matière de défense est mieux qu'ailleurs mais petit quand même dès qu'on quitte l'étang. Passer des pouvoirs budgétaires à l'Eurogroupe revient à donner l'approbation des comptes à la chancellerie du reich-sans-numéro, ce qui en français facile remet plusieurs clés du trousseau de la politique française à Berlin. Vu la gabegie structurelle des régimes Chirac II, Sarkozy et Hollande, on peut se laisser tenter par le nettoyage d'Hercule que rendrait indispensable et possible l'éventuel anschluss, et rebaptiser des rues du nom de "Pierre-Laval".

Quand, à la fin, les armées françaises et allemandes auront été remises à niveau, et même si s'y agrègent des armées cousines en capacité de les renforcer réellement - comme l'Italie et la Grèce en Méditerranée - il n'en demeurera pas moins que quatre mille cinq cents ogives nucléaires seront toujours dressées dans la Fédération de Russie pour dissuader ses voisins d'en faire trop. C'est sans doute sur la fracture du parapluie atomique que cassera l'Europe de la défense, les pays du glacis soviétique ne croyant qu'à la garantie américaine, même s'ils décomptent les jours qui restent à la présidence Trump. Que va inventer Ubu demain, tel est le leitmotiv de leur angoisse diplomatique.


(*) In order to meet this mission, NATO needs to develop an expeditionary approach and capability. The aim of this workshop is to identify a comprehensive list of Doctrine, Organization, Training, Material, Leadership, Personnel, Facilities and Interoperability requirements for an effective NATO Stability Policing Concept. This concept supports the Projecting Stability aspirations of NATO's Allied Command Transformation Campaign Plan designed to contribute to the realization of the overarching Warsaw Summit themes of defence, deterrence and projecting stability. La mission complète de stabilité globale de l'ACT par ici.

(**) Politique de sécurité et de défense commune (PSDC): elle comprend la clause identique de mutualisation que celle inscrite à l'article 5 du pacte atlantique. Ses termes explicites sont les suivants : « Au cas où un État membre serait l’objet d’une agression armée sur son territoire, les autres États membres lui doivent aide et assistance par tous les moyens en leur pouvoir, conformément à l’article 51 de la charte des Nations unies. Cela n’affecte pas le caractère spécifique de la politique de sécurité et de défense de certains États membres ». La dernière phrase sauvegarde la neutralité de certains Etats tout en les faisant concourir à la défense commune par d'autres moyens.

Note d'ordre : Royal-Artillerie a toujours soutenu l'Alliance atlantique et son commandement intégré, au premier motif qu'elle formait la seule protection crédible en cas de guerre ouverte sur le continent européen et que ses procédures communes étaient une remise en cause permanente des procédures nationales, parfois simplifiées jusqu'à l'indigence par les ajustements budgétaires du moment. Elle le demeure malgré tout, mais il va y avoir un équilibre nouveau qui déplacera le centre de gravité au milieu de l'océan avec des conséquences financières importantes pour la vieille Europe qui vient de tomber du hamac.





Tian'anmen 89

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 Les étudiants, employés et ouvriers de Tian'anmen ont aujourd'hui vingt-huit ans de plus, et ont gardé les mêmes convictions libertaires. Ils sont du gibier pour le pouvoir chinois, mais dispersés et réfugiés à l'étranger, ils ne peuvent être atteints facilement. La seule riposte à la modeste diffusion de leurs idées est de couper par tous les moyens les moyens de le faire. Alors s'organisent-ils sur les réseaux sociaux en se méfiant des intrus et autres agents provocateurs de la Crasse communiste ; ils entretiennent des cercles d'amis, fréquentent des gens intelligents, continuent à leur façon le combat pour les libertés publiques et politiques, douce utopie qui fit surgir les chars de la gérontocratie peureuse au petit matin du 4 juin. La guerre de l'intelligence est sans fin.
Salut aux morts !


Ubu et la fake science

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"What the fuck in America ?" me disait hier ma concierge américaine. C'est tout simplement l'aboutissement d'une longue guerre des fossiles contre les énergies renouvelables et le marché-carbone, menée par les frères Koch et leur groupement d'intérêts Americans For Prosperity qui tirent depuis 2008 à coups de millions sur les sénateurs et représentants rétifs. Pour comprendre de quelle façon le parti républicain a été "reconstruit" par le fric et pourquoi tous les ténors républicains du Congrès (sauf McCain) ont applaudi la décision de Donald Trump, il faut lire le long article de Davenport et Lipton dans le New York Times du 3 juin : How GOP Leaders Came to View Climate Change as Fake Science (clic).

Douze heures après le retrait fracassant du gouvernement US de l'Accord de Paris (COP21), la fronde s'est organisée à grandes enjambées par tous les territoires de l'Union. Vendredi matin, trois gouverneurs démocrates (CA, WA, NY), des dizaines de maires de grandes villes (dont Los Angeles, Salt Lake City, Atlanta, New York, Pittsburgh, la ville emblématique du discours de Mr Trump), des patrons importants, des dizaines de doyens d'université ont convergé dans une volonté de continuation des mesures visant à freiner le réchauffement climatique mondial. Le public ne va pas tarder à s'organiser et MM. Trump, Pence et Bannon vont faire se lever la pire contestation de leur politique populiste, sans lignes de partage ethnique, classe d'âge ou de revenu. il est difficile de gouverner plus mal en levant tout le monde contre soi sauf les red necks des Appalaches ! Que n'a-t-il promis en campagne pour se faire élire ! Au jour de parution de ce billet, la contestation aura grossi au niveau d'un tsunami*.

La presse entre dans le détail des conséquences du désengagement annoncé et ce modeste blogue ne va pas s'y frotter, mais il peut s'avancer sur le terrain psychologique. L'étude de comportement du cas Donald Trump s'achève sur sa façon grotesque de chanter à tue-tête l'hymne national en mémoire des soldats morts au combat le 29 mai dernier, tout en en gigotant sur place comme à l'Oktoberfest devant l'orchestre en culotte de peau. On rapporte que les parents des soldats morts ces derniers temps en furent outrés ! Mais lui s'en fout. Une étude de comportement du nouveau président des Etats-Unis ferait déjà quatre cents pages, jusqu'à vouloir prendre la main au pape pour faire un mano a mano de pure com ! La présidence n'est qu'un théâtre, les décrets sont signés devant les caméras et retournés vers elles pour bien montrer la signature de Dieu. Quand il y pense, il toise ses interlocuteurs en levant le menton comme le Duce, pus se ravise sur un sourire pour la photo. Et finalement, il est partout chez lui, fait le pitre à la danse du sabre chez les Séouds, le monde lui appartient comme un grand champ de fric à moissonner. Donald le formidable est en scène du lever au coucher. Il adore parler de lui. On peut lire la version prononcée de la déclaration de retrait de la COP-21 devant son parterre de groupies sur le site de la Maison Blanche en cliquant ici. NDLR : sur les sujets de politique internationale l'administration Obama publiait jadis la traduction française du discours officiel dans la foulée (autre temps, autres mœurs).

Les deux axes soutenant la thèse climatosceptique américaine sont l'emploi domestique et les transferts financiers vers le Tiers-Monde. La transition énergétique est créatrice d'emplois, mais ce ne sont peut-être pas les mêmes, au mêmes endroits et ne s'adressent-ils pas non plus à la même clientèle électorale. Ce qui est probable en revanche, c'est que les emplois techniques induits par la révolution énergétique sont en train de quitter les Etats-Unis, sauf si Ubu change d'idée, ce qui est possible encore ! Quant à l'argent - juste obsession mais obsession quand même - les pays pauvres n'en ont pas demandé tant que ça au premier producteur de pollution cumulée de la planète, trois milliards de dollars seulement. Au fait, si le budget fédéral se retire, les GAFA pourraient couvrir facilement la contribution due. Il reste que l'esprit "positif" de la COP21 est un facteur de cohésion sociale dont les Etats-Unis n'auraient donc pas besoin ?

Ourse en zoo au Canada

Nous n'avons pas les compétences pour juger de la pertinence des mesures engagées à l'échelle du monde par les signataires de l'Accord, mais les yeux ouverts nous font voir que les glaces fondent au Groenland, que les inter-saisons raccourcissent en France, que les épisodes météorologiques sont plus violents, sans même faire l'inventaire des tornades, tempêtes et inondations en Amérique du Nord, les villes asiatiques sont irrespirables, en bien des coins l'eau pue. La planète change (à cause des gens sans doute, de la surpression démographique aussi) mais il n'est pas inutile de s'atteler sans attendre Trumpinator à son nettoyage de printemps, en grand et à fond. J'aurais préféré à la réponse ironique du président Macron "make our planet great again", un "make the earth clean again", c'est déjà herculéen et moins disgracieux à l'endroit d'un dirigeant qui n'a pas le niveau de la fonction.

Cette grande dispute illustre la faiblesse programmatique des démocraties qui se gouvernent sur l'instant, au sondage, au nombre et parfois comme ici, sous la puissance de la corruption institutionnalisée ! Les meilleurs projets des gouvernements démocratiques sont amputés des moyens de leur projection à long terme au bénéfice d'avantages politiques de court terme. Ce n'est pas que nos vieilles nations européennes en soient incapables mais elles courent d'une élection à l'autre et le renforcement de leur socle électoral prime tout, après le fameux état de grâce des cent jours qui ridiculise le régime. Après, est-ce la rue qui gouverne ? Vient en outre une mode nouvelle chez nous, celle de défaire les mesures prises par l'équipe précédente, surtout quand elles sont bonnes. Deux empires se projettent à trente ou quarante ans parce qu'ils ont détaché la géostratégie des débats quotidiens, ce sont des dictatures : la Fédération de Russie et la République populaire de Chine. Et pour la seconde, le dire au lendemain de l'anniversaire du massacre de Tian'anmen me coûte. Mais les perspectives assumées sont là-bas. Le revirement climatologique de Pékin est le fruit d'une analyse poussée sur des constatations irréfutables.

Sans appeler au pavois le despote éclairé qui remettrait les choses au carré (quoique !) on touche du doigt l'intérêt d'un pouvoir permanent libéré des passions partisanes qui s'occuperait des grands sujets de temps long. Un roi ferait ça bien. Imaginez que les trente plus grands pays du monde soient des monarchies actives. Les effets du réchauffement climatique les inquiéteraient gravement puisque leur progéniture recevrait la promesse de défis impossibles à relever, et en cénacle plus restreint que l'Assemblée générale des Nations unies, ils prendraient des mesures communes de sauvegarde dans l'intérêt de tous. Ceci ne doit pas diminuer les mérites des organisateurs de la COP-21 et de M. Fabius. Vingt ans de négociations, précipitées sur un résultat planétaire dans un sprint de trois ans, une procédure qui pourrait nous faire mentir sur l'incapacité des nations à s'entendre. C'est bien pourquoi l'intrusion grotesque de l'éléphant Trump dans ce magasin de porcelaines est du domaine des calamités. On n'avait jamais réuni 195 pays sur un texte de 39 pages !



Mais, soyons fair-play. L'éléphant peut être aussi un grand niveleur de difficultés. Que s'est-il passé entre les chefs d'Etat arabes et Donald Trump lors de son voyage chez les Séouds ? Sabre en main, dansait-il de joie ? Ce matin les téléscripteurs crépitent : l'Arabie séoudite (allié de référence des Républicains), le Bahrein (pays-hôte de la V° Flotte de l'US Navy), Les Emirats arabes unis qui tiennent toute la Côte des Pirates et plus sérieux, l'Egypte qui éradique systématiquement chez elle les Frères musulmans outre le fait qu'elle est la première puissance économique, démographique et militaire de la région, coupent les ponts avec le Qatar, au motif du financement avéré du terrorisme international. Si bien des politiciens français** sont abattus ce matin, c'est ailleurs que se lève le vent de la panique. Les fondations, associations caritatives ou pieuses de la péninsule arabique puis toutes celles du proche Orient savent qu'elle sont devenues depuis ce matin des cibles pour les polices secrètes arabes, bien plus redoutables que les nôtres. On va suivre maintenant la cascade d'accidents regrettables qui va nourrir le feu de la purification qui va blanchir ceux qui l'apportent. Un motif ? Je m'avance ? Donald Trump a convaincu les Séouds et leurs alliés qu'il irait jusqu'à vitrifier l'Iran si nécessaire sous condition de leur pleine collaboration dans la lutte contre le terrorisme islamique et pour la pacification du Moyen Orient. Toute autre explication sera bienvenue.


(*) Ampleur du mouvement de contestation et résistance écologique aux Etats-Unis suite au retrait de l'Accord de Paris : les élites américaines cherchent à réunir les gouverneurs des Etats fédérés, les doyens d'université, les grands patrons, les maires des métropoles. Il serait étonnant que la Maison Blanche, à moitié staffée et qui pis est, à partir du fond de panier, puisse affronter la bronca générale, les jours n'ont que 24 heures et le vieux président fatigue vite. Les coups de menton n'y suffiront pas !
(**) Lire le bouquin de Georges Malbrunot, Nos très chers Emirs

Overlord 1944

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Cette année, une façon moins convenue de commémorer le Débarquement de Normandie avec le groupe de hard rock Overlord de Lyon :
Too Late To Prayévoque un G.I. parti de Saint-Louis (Missouri) jusqu'à Colleville-sur-Mer †, un court-métrage sensible sans prétentions qui va bien.



En prime, une série de photos vraiment étonnantes comparant les plages du débarquement jadis et tantôt, rassemblées sur le site Tuxboard (cliquer ici)

Toujours nous nous souviendrons et nos enfants après nous !


Six jours et cinquante ans

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Les Israéliens ont commémoré le cinquantième anniversaire de la Guerre des Six-Jours (1967) qui vit leur armée vaincre la coalition de toutes les armées arabes voisines. Le 23 mai 1967, l'Egypte ferme le détroit de Tiran qui donne accès au port d'Eilat depuis la Mer rouge. Les signes avant-coureur d'une coalition de puissance de l'Egypte, Jordanie et Syrie incite Israël à frapper l'Egypte au Sinaï, puis la Jordanie en Cisjordanie et la Syrie sur le plateau du Golan. En six jours la guerre est perdue par les Arabes et Israël conquiert les théâtres d'opérations. Le Sinaï sera échangé contre la paix plus tard, et la bande de Gaza évacuée par les colons juifs qui s'y étaient installés après la guerre. La Cisjordanie sera pour sa part abandonnée au vainqueur par le roi de Jordanie et le plateau du Golan syrien annexé.



Cinquante ans plus tard, les Arabes, travaillés par l'irrédentisme islamiste, sont affaiblis comme jamais, l'Egypte ne contrôle plus le nord-Sinaï, la Jordanie est étouffée par le poids des réfugiés syriens et irakiens, la Syrie comme force militaire a disparu des écrans, laissant la guerre aux infanteries iranienne (Pasdaran), libanaises (Hezbollah) et à l'aviation russe. Mais Israël a-t-il gagné pour autant la partie ?

La frontière égyptienne est instable, la Cisjordanie est en insurrection larvée, seul le Golan est tenu d'une main de fer. C'est un piètre résultat ! D'autant que la résolution onusienne 242* reste la pierre d'angle de toute la géopolitique régionale. Peut-on dire qu'Israël n'a jamais fini sa guerre des Six-Jours ? Coloniser la Cisjordanie, Judée et Samarie des Ecritures, était compréhensible pour atteindre la frontière naturelle du Jourdain et surtout les captages d'eau de la montagne. Y conserver les populations palestiniennes participait sans doute d'une juste retenue humanitaire mais a abouti à paupériser et à humilier ce peuple au-delà du supportable. Insérer des colonies juives souvent fondamentalistes entre les zones d'habitation et d'agriculture palestiniennes revient à attiser l'espoir d'une revanche de génération en génération. Bien sûr, les commandants d'Israël ne pouvaient pas déporter en masse les vaincus (d'autant que les Palestiniens n'étaient pas une entité belligérante), à tout le moins auraient-il dû mettre en chantier dès le lendemain du cessez-le-feu les termes d'une cohabitation loyale et fructifère dans la zone utile, la Cisjordanie, s'ils avaient jugé que stratégiquement Israël ne s'en retirerait jamais. A l'évidence, c'est impossible mais la cohabitation est refusée. La situation de la Cisjordanie est entre le bantoustan, la Mitidja ou à Jérusalem, le ghetto de Varsovie. Au choix !


Mirages III de Tsahal


Sans employer les grands mots on peut juger que l'Etat hébreu ne sait pas terminer ses guerres, qu'il ne semble pas capable d'abandonner la chimère biblique d'Eretz Izraël à l'accomplissement de laquelle un esprit boutiquier du Sentier ne va pas suffire. Il y a défaut de niveau et une bombe atomique de précaution, autant dire rien de sûr pour l'avenir quoiqu'en pense le président foutraque des Etats-Unis qui dit vouloir forcer la paix. N'entrons pas dans les prémices des négociations israélo-palestiniennes sous la férule américaine, c'est comme vouloir émulsionner l'huile et l'eau, la vinaigrette n'est liée qu'un moment.

La seule lueur pourrait venir d'une association de la communauté juive mondiale avec quelque équivalent fondé par le monde arabe dans le but de créer un futur concret au Proche Orient, concret voulant dire bâtir ensemble des infrastructures lourdes, développer l'énergie renouvelable, l'agriculture durable, les sciences appliquées, travail en commun pour sortir du tête-à-tête haineux actuel. On peut rêver.


(*) Résolution 242 du Conseil de Sécurité des Nations Unies:

Le Conseil de sécurité,
Exprimant l'inquiétude que continue de lui causer la grave situation au Proche-Orient,
Soulignant l'inadmissibilité de l'acquisition de territoires par la guerre et la nécessité d'œuvrer pour une paix juste et durable permettant à chaque État de la région de vivre en sécurité,
Soulignant en outre que tous les États Membres, en acceptant la Charte des Nations unies, ont contracté l'engagement d'agir conformément à l'Article 2 de la Charte,

1. Affirme que l'accomplissement des principes de la Charte exige l'instauration d'une paix juste et durable au Proche-Orient qui devrait comprendre l'application des deux principes suivants :

a. Retrait des forces armées israéliennes des territoires occupés au cours du récent conflit ;
b. Fin de toute revendication ou de tout état de belligérance, respect et reconnaissance de la souveraineté, de l'intégrité territoriale et de l'indépendance politique de chaque État de la région et de son droit de vivre en paix à l'intérieur de frontières sûres et reconnues, à l'abri de menaces ou d'actes de violence ;

2. Affirme d'autre part la nécessité

a. De garantir la liberté de navigation sur les voies d'eau internationales de la région ;
b. De réaliser un juste règlement du problème des réfugiés ;
c. De garantir l'inviolabilité territoriale et l'indépendance politique de chaque État de la région, par des mesures comprenant la création de zones démilitarisées ;

3. Prie le Secrétaire général de désigner un représentant spécial pour se rendre au Proche-Orient afin d'y établir et d'y maintenir des rapports avec les États concernés en vue de favoriser un accord et de seconder les efforts tendant à aboutir à un règlement pacifique et accepté, conformément aux dispositions et aux principes de la présente résolution ;

4. Prie le Secrétaire général de présenter aussitôt que possible au Conseil de sécurité un rapport d'activité sur les efforts du représentant spécial. »


Premier tour

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Les élections législatives de dimanche prochain ouvrent le dilemme crucial de notre démocratie : la procédure doit-elle représenter le pays ou bien gouverner le pays ? Tout dépend du jeu de miroir entre les organes exécutif et législatif. A quoi sert-il de représenter au parlement toutes les idées du pays, même idiotes, sinon à prévenir que l'opposition ne se transporte des chambres à la rue ? L'histoire nous apprend pourtant que confiner la contestation dans les hémicycles ne garantit pas la tranquillité en voirie. Sous le quinquennat Hollande, l'expression ouverte des oppositions de tous bords au palais Bourbon n'a pas diminué les manifestations de mauvaise humeur contre la loi "travail" du ministre El-Khomri, l'agitation étant quasiment professionnelle en France dès lors que la démocratie hurlante prime sur la représentation démocratique institutionnelle, on se demande à quoi servent toutes ces précautions constitutionnalisées. Les Frondeurs du Parti socialiste ont pourri tous les débats et n'ayant obtenu gain de cause ni pu renverser le gouvernement par crainte des résultats fâcheux d'une dissolution de l'Assemblée nationale, ils ont déporté la guérilla chez les centrales syndicales et les factieux.

La France dans ses trois déficits*, écrasée par une dette souveraine incommensurable, la bombe à retardement de la démagogie rampante, ne peut plus s'abandonner à ces gamineries extrémistes avant de commencer à réduire le périmètre étatisé qui la saigne. D'un côté le gauchisme bolivarien qui a partout échoué au prix d'une paupérisation extrême des classes populaires, de l'autre le parti de la cécité camouflant un trust politique familial dont la feuille de route est d'en vivre. En attendant que la Droite construise un parti conservateur fondé sur des principes solides et permanents, principes élaborés dans une doctrine politique capable de se battre à parité sur le théâtre du monde, le choix des électeurs responsables est limité à trois partis en capacité de gouverner sinon de débattre positivement sur la réforme nécessaire du pays : LREM, UDI, LR. Voter pour quiconque d'autre est perdre son temps. Que les éructations des démagogues en mal de prébendes ne fassent pas dévier le vote d'intelligence. Cerise sur le gâteux, le président Macron n'est pas hostile aux royalistes même s'il n'est pas monarchien encore.
(*) budgétaire, commercial et social

- LREM, la République en marche, est le centre-gauche du spectre politique utile et l'amalgame rare d'une large coalition non négociée pour la réforme. Il y a de tout, porté par la jeunesse d'esprit, un angle neuf, la lassitude de voir et revoir toujours les mêmes ; les observateurs lui promettent une large victoire en sièges dans le sillage de la présidentielle régénérante sous l'ombre du messie envoyé aux hommes par la haute bourgeoisie fatiguée des connards.

- LR, les Républicains, est devenu un syndicat de perclus dont le programme recouvre celui de LREM avec des exigences plus prononcées dans le domaine économique, quoique tempérées par des sondages défavorables, en fait c'est le plan Juppé. Des états d'âme dispersés fracturent le parti, tout au moins ont fortement entravé la propagande électorale en portant en avant disputes personnelles et scandales qui l'affaiblissent. Le premier ministre du gouvernement est issu de ses rangs, ainsi que les ministres de Bercy.

- UDI, l'Union des démocrates et indépendants est l'héritière du parti giscardien. C'est le centre-droit non-godillot et européiste clairement assumé. Force d'appoint, parti charnière, parti balance, la démocratie à la merci du nombre.

Tous ceux qui gravitent autour de ces trois partis viennent faire de la figuration, ou chassent les indemnités parlementaires, à la réserve près que dans chaque circonscription peuvent se rencontrer comme ci-dessous des personnalités politiques parfaitement recommandables et méritantes qu'il serait disgracieux de saquer !

Il demeure quand même une sorte d'exception française qui n'est peut-être pas innocente dans nos déboires démocratiques : à l'inverse de tous nos voisins et concurrents de l'OCDE, ce n'est pas le parlement qui forme le gouvernement mais le président élu au suffrage universel qui forme l'hémicycle susceptible de lui donner pouvoir. C'est du Jospin, quand il a choisi l'ordre des élections législatives et présidentielle au moment de l'instauration du quinquennat, mais c'est aussi une dérive monarchique mal comprise dans l'esprit supposé des institutions. Les textes parlent autrement. Ainsi dans la configuration d'aujourd'hui le président élu n'est pas issu d'un parti installé mais plébiscité. La rencontre gaullienne d'un peuple et d'un chef trouve sa pleine expression dans l'élection d'Emmanuel Macron. L'assemblée nationale semblerait superfétatoire avec cette prime populaire à l'exécutif mais il n'est pire danger qu'un gouvernement n'ayant à répondre de rien devant aucune représentation démocratique sauf à chercher le nihil obstat de l'autocrate.

La législature va être intéressante surtout dans sa résistance à la pression de la rue d'un côté et celle d'un président actif et intelligent de l'autre. Ne mettez pas n'importe qui sur les bancs, jouez les personnalités avant les programmes ! Mais attention : voter blanc en circonscription où généralement plus d'une douzaine de candidats s'offrent aux suffrages des électeurs est proprement débile. S'abstenir ou bouder c'est donner procuration à autrui, ne pas se plaindre ensuite. Et tant pis si aucun candidat royaliste ne peut percer ; c'était écrit dans le logiciel de préparation ; on y reviendra encore et encore.

Pliez les gaules, urnez dimanche !


Arnaud Richard (UDI), un vrai bosseur !

Le Lien légitimiste nouveau n'attend que vous

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Gérard de Villèle par Madame sous le noyer de Petit-Prix
C'est une opportunité rare pour un mécène de la cause royaliste. Coup de tonnerre, Gérard de Villèle appelle à candidater pour la reprise du Lien légitimiste dont il ne veut plus assurer la publication pour des raisons personnelles (santé). L'organe de référence de la Légitimité est un bimestriel de vingt pages sous format demi-tabloïd qui a une réputation de sérieux et d'indépendance, d'aucun le jugeant même trop libéral pour être lu à la veillée de la crypte ! Pensez donc, il a promu au fil des éditions l'économiste monarcho-anarchiste Hans Hermann Hoppe. Disert sur l'histoire de l'Ancien régime dans ses recoins oubliés et expert de la Restauration pour la raison que l'on devine, le Lien légitimiste est aussi un journal d'actualités du microcosme sachant critiquer discours et postures s'il y a lieu, et soutenir toujours la maison de Bourbon.

Le repreneur ne peut être seulement un bénévole motivé par l'incandescence de sa foi en le roi. Le média doit évoluer pour suivre la marche du temps, passer au format tabloïd sinon même berlinois, accroître sa pagination, pouvoir ultérieurement soutenir une périodicité mensuelle et se promouvoir par un site professionnel sur internet, etc etc... Si les bonnes volontés compétentes sont bien sûr un renfort utile dans toute démarche de communication, le défi - et c'est l'avis individuel et portatif de votre rédacteur préféré - ne peut être relevé que par une personnalité en capacité de distraire les fonds nécessaires à la rénovation du support pour exploiter la mine légitimiste jusqu'au bout, le bout étant bien sûr l'établissement du prince Louis de Bourbon dans le paysage quotidien des Français.

Le Piéton du roi, ne répondant pas aux critères proposés, sans pistoles et refusé au triste privilège de l'âge, ne peut remporter l'adjudication malgré son vif désir de voir continuer ce canal d'opinion de haute qualité qui lui fit l'honneur insigne d'accepter dans ses colonnes ses libres réflexions. De tout ce qui précède il n'est rien qui engage la publication ou sa rédaction, le présent billet étant une initiative personnelle et non sollicitée. Voici le scan du dernier numéro du Lien légitimiste raccourci à deux pages. Tout y est utile.

Joindre la direction du journal pour manifester ses intentions et s'informer sur les détails techniques indispensables à la reprise, c'est facile par courrier, courriel ou téléphone. A défaut, l'onglet Contact de ce blogue reste un moyen d'accès indirect.

M. Gérard de Villèle
Le Lien légitimiste
2 Le Petit-Prix
37240 La Chapelle Blanche Saint-Martin

✉ gerard 'chez' villele.com
☎ 0247 596 876

Yapuka !


Catoneo



Qatar, premier round

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Alors que toute la Ligue arabe semblait aimantée dans la même direction lors de la visite de Donald Trump à Riyad, les conseillers du roi Salmane d'Arabie séoudite ont déclenché l'embargo sur le Qatar. Le motif exprimé à la face du monde est sans intérêt, car risible. Toute la péninsule laisse fondations charitables, confréries pieuses et autres organes islamiques financer les groupes de combattants musulmans jusqu'à atteindre parfois l'organisation du prétendu Etat islamique pour le Levant et l'Irak. Cela fait des années que le Qatar fait la nique au puissant royaume des Séouds, tant par le désalignement stratégique que par la propagande laïque d'Aljazeera. Et qui pis est, l'émirat, partageant un champ gazier sous le Golfe avec l'Iran des mollahs, est accusé de compréhensionà l'égard du grand démon chiite assoiffé de conquêtes (Irak, Yémen, quoi demain...).

Une carte nous montre que le Qatar est une presqu'île accessible par mer et par air si l'Iran le veut bien, dès lors que l'Arabie Saoudite ferme le pédoncule terrestre. Donc les observateurs payés au mois supputent une provocation séoudienne visant à jeter le Qatar affamé par le blocus dans les bras de l'Iran, ce qui justifiera le déferlement d'une division blindée venant sauver le sunnisme arabe de l'hérésie. Remarquez que c'est arrivé au Bahreïn, où la majorité chiite s'est soulevée spontanément jusqu'à ce que la dynastie El-Khalifa appelle le roi au secours, qui a fait donner les chars - il n'y avait que la Chaussée Roi Fahd à franchir. L'Iran a toujours nié fomenter des troubles, on peut ne pas le croire ou l'inverse, et noter que la contestation débordait largement la communauté chiite. Au moment d'écrire ces lignes, l'Iran force déjà le blocus par avion et fait manœuvrer une petite escadre au large du Sultanat d'Oman pour encombrer le détroit. Quant au Bahreïn, c'est devenu aujourd'hui un royaume maté, une valeur sûre pour les Séouds.


Mais il y a un os pour refaire le coup du Bahreïn au Qatar. Le Grand Turc s'en mêle, qui a fait voter au parlement d'Ankara le déploiement de troupes turques dans l'émirat où une base s'apprête à les recevoir. Le roi peut se mesurer aux Turcs loin de chez eux, en souvenir de l'épopée de Lawrence d'Arabie, et faire donner ses armées toutes neuves, mais le terrain est miné en quatre endroits : les alliés occidentaux ont cinq bases militaires : le CENTCOM des Etats-Unis a une grande base aérienne à El-Udeid (Qatar), une base navale pour la V° Flotte à Manama (Bahreïn), les Britanniques développent une base navale au port bahreïni de Mina Salman et la France une base marine active à Abou-Dhabi qui double ses capacités de Djibouti, plus une base aérienne (BA104) incluse dans la base émirienne d'El-Dhafra. Il y a peu de chances que les artilleries turque et séoudienne donnent de la voie sur zone. D'où l'offre de médiation de l'émir Sabah IV du Koweit, pris en tenaille entre l'Irak (toujours revanchard) et l'Arabie séoudite hégémonique, qui craint pour sa vie et ses puits.

Les deux pays occidentaux les plus "mouillés" sur le Golfe persique sont la France et les Etats-Unis, les Anglais étant toujours la référence historique. La logique diplomatique voudrait que les trois occidentaux s'entendent - il ne serait pas inintelligent que la Grande Bretagne soit investie médiatrice - et que commencent des discussions entre les Emirats arabes unis, l'Arabie heureuse, le Qatar en prenant soin de bien refouler la Turquie des salles de conférence pour les raisons qu'on vous expose ci-après. Un mot sur le sultanat d'Oman, voisin incontournable mais détesté de Riyad pour son indépendance d'esprit et sa position stratégique sur le détroit d'Ormuz alors que Riyad n'a nulle part ce type de levier géographique.

Recep Erdoğan refait à Doha le même coup que Vladimir Poutine avait fait à Damas en envoyant ses armées au secours de Bachar el-Assad. Comme Poutine, il a une petite base en construction près de Doha qui fait tête de pont ; comme Poutine, il veut surprendre les chancelleries du monde qui doivent l'admirer comme le Soliman revenu ; comme Poutine, il est très content de faire la nique aux Américains. Le déploiement turc est fait sous le couvert d'un accord de défense mutuelle de 2014 avec une clause automatique dite de "casus fœderis" (style art.5 du traité de l'Atlantique nord). Erdoğan signe ce genre d'accord avec qui il peut dans le projet ottoman d'un retour de la Turquie au premier rang des nations. L'intrusion de la Turquie n'apporte aucun crédit d'apaisement, a fortiori vis à vis de l'Iran. On voit bien que la paix n'est pas l'obsession d'Ankara qui semble vouloir prospérer sur les cassures arabes et le fumier commercial des Emirats. Et comme nous le voyons en Syrie, le gouvernement Erdogan ne se battra éventuellement sur le Golfe que pour ses propres intérêts qui... rejoignent ceux de l'Iran dans les provinces kurdes de l'Est.


Mais puisqu'on parle de Poutine, notons que le ministre des affaires étrangères El-Thani est monté samedi dernier voir Sergeï Lavrov à Moscou pour se plaindre du sort fait à l'émirat. Les Russes détestent que les fils noués dans l'affaire syrienne soient coupés et ré-entortillés autrement, juste au moment où l'on va en finir à Mossoul et à Raqqa avec l'organisation Etat islamique. Tout le monde a son filleul dans cette guerre et les rôles sont attribués, les hiérarchies aussi. Après bien des tâtonnements, le Kremlin est parvenu à rester du côté de la crosse en ménageant les loups sunnites et les moutons chiites pour la suite à donner. Mais nul à Moscou n'a l'intention de s'attarder sur l'Euphrate, la guerre coûte un bras et tout bouleversement, sans parler même d'une guerre déportée sur le Golfe, enferrerait les forces russes sur place. A la fin, on arrive à une confrontation américano-russe qui ne peut pas tourner en affrontement mais, vu les histoires d'interférences de hackers russes dans l'élection présidentielle américaine, ce n'est vraiment pas le moment de discuter d'une garantie de stabilisation du Golfe persique avec les Russes au Congrès de Washington.

Justement, comment va réagir le gorille de neuf cents livres qui sommeille dans le coin de la pièce ? Le président Trump n'est pas encore prêt, ce type de dossier inextricable ne pouvant être assimilé en une seule semaine. Et puis il est carrément obsédé par tous ceux qui voudraient le foutre à la porte de la Maison Blanche.

Alors, les Turcs, les Arabes, les comment déjà ? Emiratis, Qataris, Koweitis, c'est des dollars américains au moins ? Même pas, mon Commander-in-Chief, des piastres de nègres !
- Riyals, rials, dinars, dirhams...
- Ta gueule, Steve ! appelle-moi Mike Pompeo à Langley !


Quelle issue, sans issue ?
(1) Pronostic vital engagé pour le commerce de Dubaï.
(2) Quid du Conseil de coopération du Golfe qui manœuvre les divisions blindées ? Avec l'imbrication des accords mutuel de défense, partout ailleurs ce Conseil aurait volé en éclats. Sauf ici, vous savez l'expression "l'orient compliqué" ! Seuls le Quai d'Orsay et le Foreign Office y comprennent quelque chose, nous n'y sommes pas.

Nos oignons royalistes

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Recentrons-nous. Ignorant tout des dispositions retenues par l'Alliance royale pour les législatives 2017, je suis allé sur le site du parti et, cachée derrière deux pages, j'ai trouvé une liste (clic) de seize candidats (avec des erreurs de circonscriptions !).

Résultats du 11 juin 2017 (base Le Monde):

- 0,44% pour De Prévoisin (AR/3°Indre et Loire)
- 0,34% pour Paillard (DVD/8°Hauts-de-Seine)
- 0,20% pour De la Dorie (DVD/7°Haute-Garonne)
- 0,19% pour Brière-Saunier (AR/1°Eure et Loir)
- 0,18% pour Alexandre (DVD/3°Loiret)
- 0,18% pour Dufourg (AR/2°Indre-et-Loire)
- 0,08% pour Lelys (AR/2°Paris)
- 0,06% pour Lebreton (AR/8°Rhône)
- 0,05% pour Camus (DVD/3°Rhône)
- 0,03% pour Chabanet (DVD/17°Paris)
- 0,02% pour Devin (DVD/2°Yvelines)
- 0,02% pour Fautrad (AR/10°Loire atlantique)
- 0,01% pour Bélenguier (DVD/5°Bouches-du-Rhône)
- 0,01% pour Lamand (DVD/18°Nord)
- 0,01% pour Levavasseur (AR/1°Paris)
- 0,01% pour Petit-Galland (AR/1°Charente)

Précisons que les candidats n'avaient pas donné de bulletins de vote aux bureaux (nécessité pour l'électeur de l'imprimer chez soi) et que la campagne fut partout faite sans grands moyens d'affichage, aucun remboursement des frais n'étant prévu, évidemment. Reste le pourquoi : la démarche électorale lancée par Yves-Marie Adeline visait à profiter du tapage de la campagne pour diffuser à haute voix l'offre politique de l'Alliance royale. L'élection était un prétexte pour booster la communication. Devaient s'y agréger des moyens financiers de propagande suffisants au fil des adhésions provoquées par ce procédé.

Le parti a seize ans, les moyens de son insertion dans le paysage politique français ne sont toujours pas acquis. Après plusieurs essais, ça ne marche pas. Ne cotisant pas, je ne pose pas la question de savoir à quoi sert ce parti dont on n'entend jamais parler. Mais la question se pose aussi pour d'autres structures confidentielles qui survivent sans objectifs ni influence, mais font sans doute le bonheur de leur dirigeant par la position sociale qu'elles procurent dans les sous-préfectures. Tant que ça ne mange pas de pain dit la sagesse populaire... et c'est bien le cas, les velléités politiques ressortissent plutôt au domaine du romanesque et après tout, chacun a bien le droit de s'occuper comme il veut.
Entre-temps, deux supports de communication cessent leur activité. Le Lien légitimiste est stoppé et cherche un repreneur, le rédacteur en chef ne voulant continuer ; le site web du Conseil dans l'espérance du roi a arrêté son bulletin climatique quotidien. Les autres publications royalistes sont à l'étiage, à voir les appels fréquents et répétés à secours financiers. Ce n'est pas le jour d'épiloguer sur les raisons de ce patinage sur place - nous l'avons fait cent fois - mais il y a quelque chose qui ne marche plus dans le microcosme. Les chiffres d'audience de Royal-Artillerie ne sont pas enthousiasmants non plus, plutôt en pente.
Les fora sont morts, bien des blogues aussi qui s'adonnaient à la présentation d'idées personnelles. Aujourd'hui on recopie beaucoup des billets rédigés ailleurs ou recyclés, même sur LaFauteARousseau. Facebook et Twitter permettent encore de saillir l'intelligence du lecteur mais à petit jet et vite fait.

Manque l'argent et un chef charismatique pour tirer le char et réveiller tout le monde. Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir ?
« Je ne vois rien que le soleil qui poudroie, et l'herbe qui verdoie ».


Second tour

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 Le Français moyen a plus de sens politique que la classe politique. Du fond de son fauteuil-télé, il jauge les hommes et s'amuse des programmes parce qu'il sait intuitivement que l'avenir est fait d'incertitudes, surprises, drames et tout le diable son train. Les slogans de campagne enrichissent le décor audio-visuel mais Sarkozy et son "travailler plus pour gagner plus" fut rattrapé par la faillite de Lehman Brothers ; Hollande et son ennemi La Finance, le fut tout autant par le terrorisme et la fronde interne au PS. Devant la page blanche du futur, l'électeur prime le caractère, la résilience, l'envergure du candidat-chef d'Etat bien plus qu'un programme qui l'ennuie.

Ainsi monsieur Macron a-t-il gagné, comme prévu dans ce blogue, sans programme sur sa bonne mine, au grand dam des connards* du vieux monde qui n'attendaient que les cents chapitres macroniens à mettre en pièces pour se refaire une doctrine. A voir la rage des foutraques de gauche et de droite, on devine la rancune des politiciens de métier blanchis sous le harnois des récitations ! Le Français, lui, n'a pas été freiné par la jeunesse relative de l'impétrant, sa réussite professionnelle et son parcours politique, sa belle cougar plus cultivée que la moyenne, l'absence d'un parti de gouvernement en soutien, les augures d'un désastre annoncé par les experts. Au lieu de quoi, le mec élu par les deux-tiers des votants contre la Fille du Pirate, les a bluffés le jour de son intronisation et les jours suivants au milieu des "grands" de ce monde qu'il donnait l'impression de n'avoir jamais quittés. Pareille aisance rassurait les Français qui revenaient d'un zébulon surexcité alternant jogging et vélocipède, au gros placide boutonneux, bite-au-vent et scooter en prime.

Aussi les connards du vieux monde ne comprennent pas aujourd'hui les quatre cents sièges annoncés au palais Bourbon, et continuent à labourer le programme dont les Français se tamponnent ; mais de cela les génies de la programmatique ne veulent rien savoir. Mélenchon et les quarante bolivariens brandissent les accords de branche du Code du travail qui n'intéressent pas l'électeur, le sénateur Baroin et ses acolytes et rivaux, la CSG qui est un impôt caché que personne ne voit vraiment. Passons sur la caricature permanente des propositions d'autrui qui montre le niveau d'approche.
Après le programme inconvertible en voix, se brandissent les "valeurs". C'est quoi déjà ? Ben... les valeurs de la gauche(?!)... les valeurs de la droite(?!)... seul le centre n'affiche pas de valeurs spécifiques sauf de bon sens. Sans oublier les "valeurs de la République" ! A la réserve près que droite et gauche sont des notions historiques n'ayant plus cours légal. A côté d'eux-tous, les patriotes bleu marine lancent les dés pour quatre sièges après en avoir annoncé quatre-vingt avant la présidentielle, quarante juste ensuite. Leurs électeurs ne réagissent pas aux circonstances politiques, ne militent pas non plus mais attendent le succès comme la manne au désert.
Cramponnés au patriotisme subdivisé en courants, les cadres du Front désespèrent d'émerger en groupe au cœur des institutions. La faute à plein de choses parfaitement connues, encadrement faible, niveau faible, militants rares, mais un parti "personnel" comme le Front national ne peut pas se réformer ou s'adapter aux temps, sauf à tuer le duc de Guise. Le logiciel perdant-perdant va l'achever par le drainage de ses électeurs en sidération ayant enfin compris que la seconde n'enclenche pas sur les boîtes Philippot ! Un vrai parti de droite identitaire sans références à l'Occupation ou aux gaz a un boulevard devant lui ; un seul ! Deux et c'est déjà mort ! Qu'en pense Paul-Marie Coûteaux ?

Cédric Villani, Nobel de Maths
S'il leur en reste, du temps, les battus dénoncent ensuite le mode de scrutin et, après résultats, l'illégitimité des élus dans une arithmétique étrangère à la démocratie représentative, mais dont ils sont prévenus depuis... SOIXANTE ANS bientôt ! Madame Autain, charmante idiote au demeurant complètement à l'est mais avec du corsage, réclame la Sixième République qui devrait la porter à la Chambre (aucune insinuation). Le système politique briment les battus, clament d'autres. Tous invoquent la proportionnelle en faisant mine d'oublier qu'elle est réservée aux peuples matures et coalisables, à défaut de quoi le Général jugea qu'elle ne marcherait pas au palais Bourbon où les singes hurleurs au cul rouge claquent des pupitres et insultent à tout va. Mais justement, tout cela pourrait changer avec le renouvellement profond des députés choisis parmi les gens normaux et/ou intelligents.
J'aime bien la médaille Fields de mathématiques avec lavallière et l'araignée dorée à la boutonnière, Cédric Villani, capable d'un discours bien déroulé et puissant qui finit par surprendre au milieu des éructations habituelles des professionnels de l'alarme et de l'embrouille. La diversité du mouvement En Marche garantit seule une pluralité d'opinions dans l'hémicycle, les origines des députés Macron étant si différentes. Le danger d'un groupe majoritaire monolithique est donc une crainte infondée de la part de ceux qui n'en sont pas, d'autant que le groupe MODEM fera chambre à part, que Bayrou est rancunier comme une vieille fille, et qu'au palais du Luxembourg les gérontes ne semblent pas impressionnés. Reste que la moitié du corps électoral est parti pour Coblence, ce qui devrait rassurer les royalistes contempteurs de la démocratie d'étage régalien. Avec deux-tiers d'abstention, on ramènera le roi, croient-ils.

La méthode de raisonnement tactique utilisée dans l'infanterie française exige pour une mission définie la désignation d'un chef doté de moyens affectés. Le chef, c'est fait, les moyens, c'était à vous, vous les avez donnés ! Pour dimanche prochain, bordez les frontières de LREM en élisant des gens bien capables d'un quant-à-soi, il y en a ! Normalement à ce stade de l'article, suit la litanie des connards dont le Piéton salue la défenestration praguoise ; mais elle serait trop longue (désolé)!

(*) sobriquet villepinien désignant les députés avant la dissolution de 1997 !

Avis camelot

Kanzler Kohl (1930-2017)

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Je n'ai pas d'intérêt particulier à me souvenir de la carrière d'Helmut Kohl, sauf au moment de la chute du mur de Berlin. Panique dans les chancelleries devant le déferlement des Ostis en ville, tous klaxons hurlants. A la frontière, qui n'était plus qu'un stop routier, on donnait à chacun trois francs six sous (en deutschemarks) pour s'abreuver et manger un berliner avant de rentrer au petit matin dans le rêve communiste et gris.

Les quatre puissances occupantes cherchaient la posture qui préserverait l'avenir, de quoi, on ne savait toujours pas. Nul ne parlait de réunification, qui prendrait des années d'ailleurs... en conclusion d'une procédure de désoccupation qu'on ne savait par quel bout prendre. Alors vint le chancelier Kohl. Il avait contre lui la Grande Bretagne et la France. Il acheta les Russes (à milliards de DM) et donna des assurances aux Américains sur l'alliance transatlantique, puis il procéda : parité des marks occidental et oriental, négociation d'anschluss avec le cabinet de Pankow et rachat de la dette démocratique, établissement d'une agence de reconstruction des länder pourris, et réunification à la barbe de tous. C'était ça Kohl, un, deux, trois coups d'avance ! Vladimir Poutine en prendra de la graine qui était officier en Allemagne de l'est au moment de l'évacuation soviétique. Surprendre et miser gros !

L'Allemagne d'alors n'était pas dans la prospérité insolente qu'on lui connaît aujourd'hui - Schröder n'était pas encore passé par là - et la chancellerie fit feu de tous bois en mettant à contribution son budget fédéral et en encourageant la Deutschland AG à ponter dans la partie. Kohl avait la vista qui faisait défaut aux autres dirigeants, même Thatcher ! Cerise sur le martini dry de la réunification, il parvint à bloquer tout avantage concurrentiel de la France sur la période de reconstruction lourde en arrimant le franc français à la monnaie fédérale.

RIP, géant !

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