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Pause !

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Les Français rêvent depuis Gergovie de l'homme providentiel ; ils l'ont !
Ils ne comprenaient pas qu'on puisse le brider dans toutes ses "bonnes intentions" en ne lui donnant qu'une minorité parlementaire qui le forcerait à la cohabitation ; ils lui ont donné une majorité nette et sans bavures à l'Assemblée nationale !
Ils détestaient leur classe politique corrompue ; c'est fait, on a abattu le taillis politique pour faire entrer la lumière sous la canopée démocratique. Assemblée renouvelée à 74% !
Alors quoi de plus ? Rien !


Emmanuel Macron a tout, l'allure, le cerveau, la jeunesse, la santé, la majorité présidentielle sans le Modem et un premier ministre super-carré. Les partenaires sociaux ont été prévenus comme le singe dans l'arbre qui assiste à l'égorgement du poulet ; le poulet s'appelle PS ou LR : les syndicalistes ne participeront pas à l'effondrement social du pays sous peine d'assèchement des fontaines de subventions et postes paritaires juteux. Ça calme !

Nul ne sait ce qu'il va advenir des Républicains tiraillés par les intérêts électoraux locaux mais disciplinés par la prébende et la dette du parti. M. Mélenchon atteindra ses 51 ans de carrière politique inutile et nuisible au sein d'un petit groupe qu'il divisera par ses objurgations répétées. Le parti socialiste est carrément en faillite politique et financière. Le Front national accède à l'hémicycle avec une petite escouade qui sera peut-être plus assidue ici qu'au parlement européen mais qui pèsera peu car hors-sol sur les sujets économiques. A noter qu'il reste des traces communistes pour les archéologues du futur, qui se demanderont longtemps ce qu'ils faisaient là.
C'est donc du billard pour le pouvoir nouveau, sauf à mettre à jour les algorithmes sur le taux de désintérêt des électeurs convoqués. Mais si les gens s'en foutent, ils ne bloqueront pas non plus !

Alors, posons la carte électorale et retournons à la charrue. Que la République se débrouille dans ses truquages et ses lobbies, vu les tares du système elle ne pouvait se mieux porter qu'avec un président plébiscité et une chambre d'otaries ! La suite est pour la chronique des scoops et des scandales. Bon vent monsieur Macron, on reviendra !

Le blogue Royal-Artillerie part en pause quelque temps.
Un chant d'air pur pour se dire au revoir.

A bientôt !



La république et les hongreurs

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Pinces à bistourner les burnes
Deux mois déjà, deux discours pour formater le quinquennat, session parlementaire estivale avec ou sans cravate, on se gargarise à l'eau de mer. Il ne se passe rien de significatif, les fameux Cent-Jourséchoient (ou échouent) le 16 août prochain. Toute action n'est pas suspendue au travail législatif ou aux négociations paritaires, il existe des possibilités de circulaires, de décrets pour faire face, voire même d'ordonnances au-delà du protocole de décapage du Code du Travail que le monde entier etc. Or il ne se passe rien d'important. C'est surtout le cas dans le domaine de la sécurité publique. Assainissement des rues encombrés de revendications de tous ordres, désordre des quartiers réservés, confinement des expressions cultuelles, police des frontières et expulsion des clandestins récents et déboutés, neutralisation des cellules terroristes, la liste est longue comme un jour sans pain. Suivent de près les mesures indispensables au redressement des comptes publics, en commençant par le bout que l'on veut, mais en commençant quelque chose, comme par exemple, la suppression de centaines d'agences, offices, commissariats, observatoires, instituts, le blocage de tout recrutement dans la fonction publique dont on ne compensera plus les départs en retraite pendant dix ans, la baisse en valeur du point d'indice, le plafonnement des remboursements sociaux et des prestations de chômage, la suppression de l'AME, la réduction du train de vie de l'Etat (voir en détail comment font nos voisins suisses et allemands). Au lieu de quoi on nomme Ségolène Royal Reine des Neiges au pôle arctique dont nous ne sommes ni riverains ni bienvenus et le président a proclamé au Congrès de Versailles l'irréformabilité du pays - c'était une blague, quoique !

En faveur des entreprises, des mesures efficaces n'ont pas à attendre le nouveau code du travail. Procéder à des simplifications massives en débandant les structures de complications et bannissant les complicateurs, sortir de l'orbite publique tous ces parlements inutiles que sont les chambres de commerce, mettre en place des procédures intelligentes anti-fraude fiscale avec des procès courts et des peines toujours au maximum pourrait se faire sans délai. Bref, le pouvoir nouveau devrait gouverner ; il parle et monsieur Castaner est le héraut indépassable de sa communication, saluons l'exploit de faire tant et si bien avec si peu ! L'ire se déplace déjà vers le grand parti des Eunuques que sont devenus Les Républicains. En ces temps difficiles, La Droite ne vaut que ce que vaut son programme musclé, sauf à n'être que la droite de la Gauche. Le groupe de M. Jacob ne vote pas la confiance à Edouard Philippe mais fait confiance jusqu'à midi, sauf si le texte T croisait à angle droit "ses valeurs", indéfinissables valeurs. La posture LR est de la daube recuite sur le programme de M. Baroin, version édulcorée de celui de M. Fillon déjà passablement adouci pour captiver les électeurs ayant résisté à l'hypnose macronienne. Les élections étant passées et les caciques débarqués, on pouvait compter sur un durcissement du programme original dans une intransigeance totale pour les comptes publics, la sécurité quotidienne, l'immigration débridée, et marteler jour après jour le Carthago delenda est romain contre les déficits, Carthage étant le camp retranché des Français surprotégés par des régimes spéciaux iniques. Thatchérien un peu !

D'aucuns pensent que le Front national se serait réservé ce chapitre dur, il n'en est rien, le Front est en voie de liquéfaction, ses cadres ne sont pas au niveau requis et les serres de la famille Le Pen sont plantées en lui qui l'empêchent de voler ! Donc l'espace est inoccupé et bien que le tiède programme politique de la Droite soit déjà écrit, il ne lui sert à rien ! Que leur faut-il de plus ? Consolider des bastions électoraux ? Oui, comme d'habitude !

Rien ne laisse augurer que la France, sous le sceptre impérial revenu, rejoigne le camp de l'Europe sérieuse en rétablissant ses comptes pour relancer son économie. Le pouvoir est tout d'intentions, d'affaires, de calculs - on va rentrer dans les 3% - et les ambitions sont des effets de manche qui ne valent pas mieux que les éructations de la France bolivarienne, insoumise pour de rire.

Le deuxième problème d'Emmanuel Macron est dans son domaine réservé, affaires étrangères et défense. Si les premiers pas de l'impétrant sur la scène internationale ont été unanimement salués par les chancelleries et les médiats, reste à passer aux actes. En Europe, le verrou est merkélien et il ne glissera dans sa gâche qu'à la seule condition que la France, qui semble vouloir donner des leçons au vieux continent, rentrent dans les clous de Maastricht et fassent autant de progrès que les pays d'Europe du Nord dans la gestion des affaires de l'Etat, jusqu'à atteindre la règle d'or du déficit "zéro". Le dernier rapport de Didier Migaud et les tergiversations observées sur la dépense publique - on aurait pu profiter du coup de foudre de la Cour des Comptes pour abattre la hache - ne laissent attendre aucun remède à la gabegie française, sauf un peu de toile émeri sur le prochain budget, et privent donc Paris de toute crédibilité dans ses demandes ou recommandations à Bruxelles. L'étoile va vite pâlir et notre voix faiblir sur des sujets essentiels, dont l'islamisation forcenée de l'espace européen n'est pas le moindre. Le groupe de Visegrad pose effrontément la question qui tue !

Au-delà, la question de notre influence géopolitique est toute entière dans le renforcement de nos capacités militaires permettant de continuer d'intervenir un peu partout. Le seuil de 2% du PIB des dépenses militaires semble inatteignable et la loi de programmation militaire annoncée ne sera pas convertie en crédits de paiements en temps et heure. Qu'on ne compte pas sur la générosité allemande de mettre au pot d'une défense européenne si nous ne pouvons pas nous-mêmes contribuer à parité. Notre place dans l'OTAN sera aussi fragilisée surtout sous le règne ubuesque de Donald Trump. Avons-nous les moyens de soutenir longtemps les cinq pays du Sahel qui luttent contre les bandes islamistes et les trafics en tous genres ? Nous comptions sur l'ONU, Washington coupe les crédits. Pouvons-nous soutenir longtemps des actions militaires en Irak et au Levant ? Certes nous pouvons figurer mais certainement pas conclure. Bénéfice zéro. Nos positions sur le Golfe persique semblent enfoncées. Nous pivotions sur le Qatar et sur Abou Dabi mais depuis que nous savons que les contrats séoudiens de MM. Hollande et Le Drian sont ramenés à la portion congrue et ne mériteront pas les unes de la presse, nous comprenons que le Pentagone et le Département d'Etat ont repris la main sur l'armement. Sur zone, les Etats-Unis ne respectent que la force, paramètre de souveraineté de plus en plus cher à maintenir pour une nation impécunieuse comme la nôtre.

Faute d'élan, la République de M. Macron risque bien de s'enferrer dans des explications répétées et préférer la communication aux résultats, c'est du moins ce que l'on voit aujourd'hui. Face à lui, l'opposition parlementaire n'est ni crédible ni armée d'un projet de rechange. Le roi des grenouilles a une gueule de grue.


Nota : Hongreur du verbe hongrer : châtrer les chevaux. Hongre (h aspiré), cheval châtré pour sa docilité au travail, originellement importé de Hongrie.

Bonnes vacances

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Petit Travers de Carnon
Au Grand Travers

CMRDS 2017

Outrances et timidités des dévolutions

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Si la campagne électorale n'a pas débattu de l'Europe autrement que pour en dénoncer ses nuisances, les équipes partisanes de communication et propagande n'ont jamais poussé les feux de l'analyse de ses inconvénients. S'éloigner des incantations populaires et des assertions définitives de l'establishment libéral permet de deviner un point d'équilibre à partir des réalités. C'est l'ambition de cette brève de comptoir qui explore l'optimisation de nos interdépendances européennes en opposant insuffisances et exagérations des pouvoirs délégués.

Préambule

Peuple souverain, l'expression est illisible. "Souverain" signifie que je tranche et coupe selon mon bon plaisir, selon mon caprice, où et quand je veux. En quelle occasion le "peuple" aurait-il manifesté son caprice ? Si on le voit comme corps politique structuré (ce qui est discutable), on peut le considérer libre et souverain à l'occasion d'un référendum qu'il aurait lui-même convoqué. Le peuple de la Confédération helvétique est en ce sens souverain. Mais cette souveraineté, encore moins son ersatz français, n'induit pas forcément celle du pays appelé à siéger dans les enceintes supranationales de pouvoir où se mesurent justement l'indépendance et la souveraineté. Sauf pour quelques républiques bananières insignifiantes, la souveraineté le cède partout à l'interdépendance, Suisse y comprise. Elle en a vu les limites dans l'attaque anti-évasion fiscale des Etats-Unis. Nos pays dépendent les uns des autres. Il n'est pas un secteur exempt, même celui de la culture.

C'est dans ce cadre que s'exerce le principe dit de subsidiarité qui, rappelons-le, conserve par devers soi toutes choses que nous pouvons facilement régler et déporte à un étage supérieur d'autres choses qui se font mieux, voire uniquement, à plusieurs. La dispute européenne tourne autour du principe de subsidiarité. Dans l'Union européenne il est régi par l'article 5-§.3 du Traité de Maastricht : « En vertu du principe de subsidiarité, dans les domaines qui ne relèvent pas de sa compétence exclusive, l'Union intervient seulement si, et dans la mesure où, les objectifs de l'action envisagée ne peuvent pas être atteints de manière suffisante par les États membres, tant au niveau central qu'au niveau régional et local, mais peuvent l'être mieux, en raison des dimensions ou des effets de l'action envisagée, au niveau de l'Union ». Le texte ouvre la porte des ascenseurs : les pays peuvent naturellement faire monter ou descendre des segments économiques ou autres sur l'échelle des dévolutions. Il suffit de s'entendre entre gens de bonne compagnie et ne point claquer les portes comme des enfants insupportables. Qu'est-ce qu'il ne va pas ?
Il y a de quoi, exemples :

Outrances

L'invasion des normes communautaires donne prise aux critiques les plus sévères. Que le marché commun de libre circulation des biens et denrées soit régi par des normes tombe sous le sens ! Surtout si la production d'un segment donné est destinée aussi à la grande exportation. La norme alimentaire ou la composition chimique d'articles d'usage courant sont des garanties de base. Elles boostent la vente. Mais on ne voit pas bien l'utilité de la normalisation des mesures, diamètres et débits en toutes circonstances, voire même celle des espaces pour handicapés, la largeur des corridors d'hôtel. Que des articles "hors-normes" ne puissent pas bénéficier du label "CE" est... normal ! L'article national sera alors labellisé NF, TüV, BS ou UNI de façon lisible et s'il est bon, les consommateurs (et leurs associations de vigilance) l'achèteront, à défaut, le traîneront au tribunal.
Dans le domaine sociétal (les handicapés, les hôtels en font partie), chaque pays doit pouvoir s'organiser au mieux des intérêts et coutumes de sa population. Pourquoi normer à Bruxelles la qualité de l'eau distribuée à la consommation ? Chaque Etat ou région (Land) est capable de publier sa grille physico-chimique de l'eau potable répondant aux normes mondiales de l'OMS et s'il ne surveille pas, il doit être attaqué en justice par ses consommateurs.

L'outrance sévit aussi sous la forme d'une uniformisation des formats et procédures tendant à pousser à la roue de la fédération européenne. Pourquoi normer la comptabilité des sociétés (norme IFRS) ? L'analyse financière est affaire de spécialistes et uniformiser la présentation des comptes sociaux de Gibraltar à Utsjoki n'apporte rien de plus pour excaver la vérité vraie d'un bilan. Le spécialiste doit apprendre les mœurs comptables de chaque pays comme il le fait déjà pour la Chine, le Japon, la Thaïlande, Singapour, Jersey et l'Australie. Et bien il verra l'inversion des classes de comptes entre l'Allemagne et la France, les spécificités luxembourgeoises, la plasticité britannique, la comptabilité lombarde italienne et notre Plan 1957 qui avait déjà un siècle de retard sur ceux du Reich bismarkien ou de l'Angleterre victorienne. Savez-vous qu'en matière de droits de douane le Plan 57 n'indiquait aucun compte ou sous-compte de la sous-classe 63 ? L'Ordre des experts-comptables suggère de les prendre en frais accessoires du principal (donc ils disparaissent) sinon en 6353 « Impôts indirects ». Qui a dit que ce pays était un grand du commerce mondial ?

Un dernier exemple d'outrance - j'en vois au fond qui pianotent sur leur smartphone.
Bolkestein (en photo)! Ce nom, élevé à la puissance d'une injure, restera la mère des outrances européennes. Que l'ouvrier puisse se faire embaucher dans tout le marché commun sans restrictions est une façon intelligente de fluidifier la main d'œuvre, balançant excédents et déficits, outre la liberté normale de circulation des compétences comme celle des camions. Mais assujettir l'embauche délocalisée au régime social du pays d'origine est pur dumping de la part des pays émergents, surtout de l'Est. Il n'y a pas à comprendre cent pages de justifications bureaucratiques ! Ceux qui se sont prêtés à cette escroquerie devraient être poursuivis, et la directive (largement entamée par les régimes nationaux) devrait être rapportée, remplacée par une ligne de code : "l'Européen travaille où il le souhaite sur tout le territoire de l'Union européenne sans restrictions ni privilèges".

En revanche, certains domaines sont jalousement conservés dans la coquille nationale alors qu'ils seraient mieux gérés à plusieurs. Ce sont parfois des petites choses qui n'ont pas attiré l'attention des technocrates bruxellois ou bien qui ont succombé à la résistance opiniâtre de lobbies particuliers.


Timidités

Rien n'est plus irritant lorsqu'on voyage en Europe de chercher au fond de sa valise l'adaptateur pour prise de courant correspondant au standard national du pays de destination : Tableau des prises électriques (clic). L'Europe a cinq standards de prise, le plus sécurisé est le standard britannique mais il est sans doute trop tard maintenant pour le promouvoir. Tout le monde devrait passer à la prise "Schuko" qui ne bouleverse pas les distances entre broches sauf en Italie. Les grands espaces économiques ont chacun leur standard unique.

L'Abeille-Bourbon au sauvetage
Les nations maritimes européennes gardent des milliers de kilomètres de côtes mitoyennes, toute la Baltique sauf l'enclave russe de Kaliningrad, la rive orientale de la Mer du Nord, idem pour la Manche, la Mer d'Iroise, l'Océan atlantique oriental jusqu'à l'Île de Fer aux Canaries. Norvège et Grande-Bretagne exclues, treize pays sont "mouillés" dans le domaine atlantique. Le bon sens commande à la mutualisation de garde-côtes et pêches par la création d'un corps européen dédié naviguant partout, exerçant les mêmes compétences que les Coast-Guards des Etats-Unis (police, douane, affaires maritimes, alerte et sauvetage). La même chose en Méditerranée où les "bassins" nationaux sont encore plus imbriqués ; huit pays sont mouillés. En dessous, le poisson n'étant pas captif, on peut envisager l'examen d'une possibilité de licence de pêche européenne, mais bon c'est un enjeu très politisé.

Un domaine pas du tout rationalisé est celui des approvisionnements énergétiques. On comprend bien qu'un Bureau central de l'énergie passant des contrats pour un marché de cinq cents millions de consommateurs obtiendra de meilleures conditions que chaque pays séparément. A choisir de négocier du gaz algérien soit dans un tête-à-tête GDF SUEZ - SONATRACH avec tout le contentieux historique et la corruption endémique, soit par un Bureau central d'achats à Rotterdam dirigé par un klootzak de Batave qui fait semblant de ne pas comprendre le français, un entêté impossible à déborder qui a commencé sa vie au biberon de la Royal Dutch Shell, inamovible, apparemment aussi puissant que très con ; le second dispositif obtiendra de meilleurs prix et conditions de cadencement. Parler avec GAZPROM pour 50 ou 500 millions de consommateurs n'est évidemment pas pareil. Le même klootzak sera hermétique aux gesticulations russes. Poser des pipelines pour livrer chez nous pétrole et gaz se fera plus facilement au Bureau central des tubes que dans des discussions binationales à ouvrir chaque cinq cent kilomètres.

Un dernier pour la route, ou plutôt deux, qui n'ont pas besoin d'être développés : le contrôle de la circulation aérienne et l'espace commun téléphonique.

Sur tous ces sujets, il existe des tonnes de rapports, analyses, critiques, mémorandum... tous inutiles. Pour preuve, l'Union européenne va mal, elle n'est pas gouvernée, elle ne se reconnaît pas elle-même, et pourtant elle est le niveau pertinent pour affronter les autres Etats-continents qui n'arrêtent pas de grandir autour d'elle, jusqu'à imposer leurs mœurs commerciales, leurs normes, leurs projets. Ces choses ne se construisent pas pour cinq ans mais sur un demi-siècle. La carence de leadership européen (le leader naturel était la France mais depuis Chirac elle a fait sous elle, nous avons fini avec Harlem Désir, p*tain!), l'arrogance et l'impuissance de la Commission, l'agenda douteux des dirigeants communautaires (Barroso à vendre, demain Juncker), le déclassement des chefs de gouvernement qui sont devenus des directeurs de boutiques achalandées, tout cela nous a fait perdre beaucoup de temps en même temps qu'étaient aiguisés certains appétits extérieurs à la limite de l'anschluss comme le TAFTA. Par chance, Donald Trump ne l'a pas compris et veut s'en défaire. Mais le projet (très avancé en discussions) reviendra à mesure que la Chine montera en pression. C'est un énorme travail qui nous attend. Nous n'avons pas du temps de reste pour jouer aux apprentis-souverains, il y a bien longtemps que la France éternelle est en dépendances, heureusement plurielles.





En conclusion, la dévolution n'est pas un gros mot. Ne conviendrait-il pas de mettre à plat nos coopérations plutôt que de jeter tant d'énergie dans des Frexit, Grexit, Nerxit, Danxit et autres "exits". Inutile de tout jeter à terre de la construction européenne. Les nations qui la composent n'ont pas disparu, les coutumes régionales, nationales demeurent bien vivantes, leurs défauts endémiques aussi. Dans une apparition télévisée la veille du 1er Mai, Marion Maréchal Le Pen, l'esprit le plus aiguisé du Front national, signalait deux fractures graves de l'Union européenne, l'une horizontale séparant pays du nord (l'Europe sérieuse chez RA), pays du sud (l'Europe rieuse) ; l'autre verticale, identitaire, expliquée par l'histoire du XXè siècle, entre les pays neufs d'Europe centrale et orientale et la vieille Europe occidentale. Que les PECOs dégagent m'en touche une sans faire bouger l'autre. Que l'on brise la vieille Europe sur la ligne de fracture nord-sud serait une stupidité, un crime. La France n'y gagnerait rien, nos sœurs latines encore moins puisque nous avons tous les quatre besoin des marchés du nord, des touristes du nord, des investisseurs privés et industriels du nord outre l'imbrication ancienne de nos sociétés. Les Britanniques commencent d'ailleurs à douter de leur mouvement d'humeur anti-polonais ; il leur aurait suffi de casser la directive Bolkestein et d'expulser les doryphores, puis d'attendre les remontrances pour passer aux insultes. Juncker, avec son palmarès de fraudeur fiscal, n'aurait pas longtemps résisté, la Commission se cassait comme une noix.

Il faut donc rénover, il suffit de rénover. Sans doute pas quand même avec la technocratie bruxelloise mais entre chefs d'Etat, sans même convoquer la Commission qui doit être reproportionnée à son niveau réel de secrétariat exécutif. Qui aura les burnes nécessaires pour convoquer à Rambouillet les pays fondateurs et l'Espagne afin de redéfinir le projet à l'aune des défis planétaires qui se dessinent. Les autres pays suivront ou quitteront, bon voyage ! Finalement, ce qui manque chez les hommes d'Etat européens, c'est d'avoir perdu assez de sang et de larmes pour se comporter en hommes ! Nous sélectionnons la sous-race éduquée dans la ouate !

Reste une question (habituelle sur Royal-Artillerie) qui n'a jamais été posée officiellement aux peuples européens, à chacun d'eux : voulez-vous une confédération ou une fédération ? L'issue est fort simple : les pays ayant choisi la fédération entreront comme entité unique dans la confédération des autres.




Ceci est la dernière contribution de Royal-Artillerie à la dispute présidentielle. Le débat du second tour, qui a occupé toute la soirée du 3 mai, a montré qui avait un projet cohérent, certainement difficile à mettre en œuvre contre les corporatismes de tous ordres, et qui avait déjà perdu dans sa tête pour se livrer à l'invective et à l'insulte, faisant même l'économie du respect dû à l'électeur indécis pour tenter de rassembler les voix qui lui manquaient. Madame Le Pen n'a pas la carrure, et définitivement pas l'intelligence du mode de scrutin !


Carte postale

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Digue de Saint-Vaast-la-Hougue, le fort au fond

La tour de tatihou par Vauban



Le cliché "cliché"

CMRDS dernier appel !

Fini de rire !

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Les vacances s'interrompent définitivement. Barcelone, l'une des trois capitales de Méditerranée occidentale est touchée de plein fouet. Pas de yakafokon sur Royal-artillerie - reportez-vous sinon aux déclarations des politiques en charge de notre "éducation" - simplement, que la guerre commence !


Remontons la pendule : en 2007, Nicolas Sarkozy, parfaitement conscient des antagonismes mortifères entre les riverains nord et sud de la mer méditerranée, lançait un appel conjointement avec l'Espagne et l'Italie pour une Union méditerranéenne (cf. le dossier UPM). La perception de la fracture était réelle et partagée par nos voisins. C'était le bon moment pour lancer les dés, sauf que Sarkozy n'avait déjà plus de limites à son rêve du retour de Bonaparte aux Pyramides, et englobait sur l'épure la Turquie délaissée par une Union européenne outrée, l'Egypte pour faire le poids et Israël pour plaire à ses sponsors. Angela Merkel y vit un affaiblissement de son imperium continental et noya le projet dans les tuyaux d'une usine à gaz qui descendait depuis la Laponie jusqu'aux sources du Nil. L'intuition sarkozienne était la bonne, la réalisation handicapée par son sur-moi.

C'est une union du bassin occidental de la Méditerranée qu'il faut construire en envoyant ch... les observateurs aux pieds secs, dont l'Allemagne. Sur la rive sud du bassin, il n'y a qu'un Etat disposant d'une économie, c'est le royaume chérifien. L'Algérie est un Etat sans économie (le pétrole n'est qu'une rente) et la petite Tunisie joue le rôle du roseau de la fable. On comprend tout de suite que c'est l'Algérie le problème, mais comme la disparition de la momie va déclencher une révolte civile d'ampleur, l'occasion se présentera de reconstruire sur du solide avec la bourgeoisie d'affaires locale ou avec celle expatriée chez nous et autour.
A défaut, la vague migratoire nous submergera et nos politiciens de pissotière retourneront sept fois dans la bouche la déclaration qui va bien au milieu des ruines, avant d'embarquer sur le Massilia !

Quant à combattre l'islamisme, entrer carrément dans le vif du sujet sinon quoi d'autre ?
En attendant l'ouverture des hostilités, de tout cœur avec les familles des victimes, et tous nos encouragements aux blessés des attentats islamistes de Barcelone et de Cambrils.

En attendant, on fera son profit du billet de l'Algérien Kamel Daoud publié sur Amazigh24 (maroc) après l'attentat en cliquant ici.


Lundi prochain, le blogue redémarre en écho du camp Maxime Real del Sarte de Roanne sur l'actualité et l'illusion capétiennes. Ce sera un peu dur comme rentrée mais certaines choses doivent être dites. A bientôt donc.


Actualité et illusion capétiennes

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Le Camp 2017 Maxime Real Del Sarte commence aujourd’hui au château d’Ailly (près de Roanne) avec pour thème l’avènement du projet capétien pour la France. Si comme le proclame l’Action française dans son annonce, le projet capétien ordonne la souveraineté et la civilisation françaises pour garantir le bien commun, l’affaire est de grande audace et il faudra un forte jeunesse militante pour le porter ; l’école de pensée de la vieille maison est la seule équipée intellectuellement pour promouvoir ce redressement de plus en plus urgent. S’il s’agit de renouer à l’occasion le fil dynastique coupé par le comte de Chambord, il y a méprise, c’est tout l’objet de cet article de rentrée.

L’éloignement des vacances m’a créé un flash : inutile de creuser, il n'existe pas de rois souterrains, ou bien ils ne remontent jamais en surface. Où que l'on cherche, les vieux rois* n'ont pas d'héritiers, juste des descendants, parfois empêtrés dans des manteaux trop grands. On ne naît pas "roi de France", on ne le devient pas par acclamations ni par la désignation d’un aréopage d’historiens complaisants, seule l'onction crée le roi Très-Chrétien en France. C'est carrément spécial, même un agnostique endurci comprend cela. La multitude devait assimiler la verticalité céleste du pouvoir et craindre son roi autant que son Dieu. Douter de l’Un entamait l’autre. On ne devine à ce jour aucun prétendant en capacité de ramasser l’étendard, surtout que nul ne saurait où aller le prendre. L'embourgeoisement des maisons princières a consommé leur antique grandeur, le de jure est une falsification de partisans. Quand « Le Mort saisit le Vif » si la main du mort ne trouve que le vide, on entre au néant et les compteurs sont réinitialisés**. Les rivages du renouveau sont en vue.

Les vieux rois sont morts d’être devenus des hommes. La tradition franque les avaient élevés au rang de demi-dieux (Ases) qui se laissèrent pousser les cheveux comme le leur avaient appris les moines à la lecture de l'ancien testament. Sous la guenille mortelle de la brute résidait le corps astral de leur éternité. Pure magie, mais de haut niveau ! Plus de mille ans passèrent, les rois finirent d’eux-mêmes par douter et disparurent, emportant l'éternité avec eux ; il nous en reste leurs chroniques et des souvenirs reconstruits.

Louis XV par Welper (ca.1770)
Le dernier grand roi de tradition chez les aînés de France fut le Bien Aimé. Il se maintint au-dessus des lois morales et politiques de son siècle, absolument. Sur le tard malgré tout, il avait saisi l’impérieuse nécessité de réformes profondes comme en réclamaient tous les économistes depuis Vauban. Sa mort ouvrit l'époque des hésitations d'une race affaiblie conduite au dais par les lois fondamentales d’un royaume finalement anachronique. La nation et le roi allaient divorcer (dès avant la Révolution), l'un ne comprenant pas l'autre et l'autre ne reconnaissant plus l'un comme son tout. La suite ne fut que soubresauts d'un modèle à l’agonie qui implosa en 1873 pour disparaître à jamais. Le projet capétien s'est terminé inachevé par construction interne. Aucune rupture de paradigme n’a permis d’exposer l’offre politique monarchiste depuis lors. Ses propres lois l’ont tué. Le projet dans ses objectifs reste une ambition louable qui ne peut être portée par ceux qui s’en réclament propriétaires sans autres titres que de naissance, pour lesquels nous avons déjà payé cher.

Nous parlons de familles déposées (certaines plusieurs fois) dans l'incapacité de se rétablir par elles-mêmes et - c'est un secret - n'y tenant pas plus que ça dès qu'on leur parle de s'y mettre pour de vrai. Les descendants acceptent la coagulation de supporters autour des aînés de branche qui agrègent une cour avide d'honneurs que le régime en place ne leur donnera pas. On fait des comtes, on nourrit l'audience de proclamations avantageuses du prince en charge – le rappel de sa légitimité dynastique est incontournable dans chaque texte même le plus anodin. Mais reclus pour l'été, loin du tapage, le royaliste de toujours mesure l'étendue de la supercherie mondaine ; ces personnalités, même sympathiques, n'ont pas la carrure requise ni les espérances financières qui la suppléeraient pour faire aboutir un projet de ré-instauration de la monarchie. C'est donc perdre son temps avec eux, flouer les lecteurs pour notre part, tromper son monde pour ceux qui appellent des cotisations dans ce seul but.

On peut les comprendre aussi, nos princes. Leurs mœurs plébéiennes et le modeste cursus de chacun – à la notable exception du feu prince Alphonse d’Espagne (1936-1989) – leur laissent deviner que la presse opposée au projet monarchique ne mettrait pas trois jours à les abattre s'ils manifestaient publiquement une volonté de reconquête du pouvoir. Ne leur donnons pas de gages en y abondant ! C’est mort de chez mort ! On peut reprendre tout de zéro, mais il reste les objectifs « capétiens » qui ont, eux, survécu aux rois. Ainsi les participants au camp pourront suivre (clic) des lectures sur la philosophie post-moderne (Bousquet), la culture française (Stalker), la vraie place de la France dans le monde (Saint-Prot), une nouvelle politique française en Afrique (Lugan), la guerre économique qui ne dit pas son nom (Harbulot), le coup d'état des juges (Meuse) et le populisme et ses dérives par le président du comité directeur de l'Action française, Stéphane Blanchonnet ...

(Table de Winchester)

Dorénavant le blogue Royal-Artillerie parlera de cent choses, des objectifs capétiens et des rois, et plus rarement des « princes en attente ». Il est temps de mettre les pendules à l'heure de l'avenir, ils n’y sont pas inscrits, ça m’a sauté aux yeux à l’insu de mon plein gré. Vienne un jour le roi nouveau !


(*) Aussi étonnant que cela paraisse, l'expression est de Nicolas Sarkozy qui chercha un moment à se mettre en perspective comme plus tard s'y essaiera Emmanuel Macron.

(**) C’est la thèse interruptive de Sixte-Henri de Bourbon Parme exposée ici.

Faut-il croire aux Lumières de l'islam ?

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Amis lecteurs, il est difficile de terminer ce mois d'août sans évoquer l'empreinte islamique en Europe occidentale. Les opérations de terrorisme ont déclenché une foule d'analyses, commentaires, proclamations courageuses ou hypocrites. N'allons pas nous y frotter, d'autant que nous surprendrions certains qui n'ont pas fait les troupes de marine.
C'est l'occasion d'actualiser un long article paru il y a douze ans sur Steppique Hebdo et centré autour de Tariq Ramadan. Il n'y a rien à retirer aujourd'hui au texte de 2005, mais l'on peut constater aussi que le Frère-philosophe n'a pas progressé sur sa zone d'effort, la France, à tel point que ça énerve beaucoup Hani Ramadan qui se refait la cerise sur l'islamophobie. En fait on est passé du voile au hijab ! Comment dès lors rendre l'islam sympathique, préalable indispensable à la subversion, quand dans la rue les couteaux hurlent Allahou akbar et que foncent les voitures sur la foule ?

Ramadan cherche depuis quinze ans à revêtir la toge du réformateur, le chef de file de la cohorte des Lumières de l'islam contemporain ainsi que les convoquent à l'indispensable aggiornamento les collaborateurs français et autres idiots utiles de la bobosphère. Il a demandé sa naturalisation au projet peut-être de s'inscrire au Collège de France. Trêve d'ironie, voici quelques sourates édifiantes choisies au hasard parmi celles que monsieur Ramadan veut discuter avec ses coreligionnaires et avec nous par la même occasion.


Sourate 2, v. 223 : "Vos femmes sont un champ de labour pour vous. Venez-y comme vous voulez."

Sourate 2, v. 282 : "Faites-en témoigner par deux témoins d'entre vos hommes; et à défaut de deux hommes, un homme et deux femmes d'entre ceux que vous agréez comme témoins, en sorte que si l'une d'elles s'égare, l'autre puisse lui rappeler".

Sourate 4, v. 3 : "Il est permis d'épouser deux, trois ou quatre, parmi les femmes qui vous plaisent, mais, si vous craignez de n'être pas justes avec celles-ci, alors une seule, ou des esclaves que vous possédez. Cela afin de ne pas aggraver votre charge de famille."

Sourate 4, v. 11 : "Voici ce qu'Allah vous enjoint au sujet de vos enfants : au fils, une part équivalente à celle de deux filles… Ceci est un ordre obligatoire de la part d'Allah, car Allah est, certes, Omniscient et Sage".

Sourate 4, v. 15 : "Celles de vos femmes qui forniquent, faites témoigner à leur encontre quatre d'entre vous. S'ils témoignent, alors confinez ces femmes dans vos maisons jusqu'à ce que la mort les rappelle ou qu'Allah décrète un autre ordre à leur égard".

Sourate 4, v. 34 : "Les hommes ont autorité sur les femmes, en raison des faveurs qu'Allah accorde à ceux-là sur celles-ci, et aussi à cause des dépenses qu'ils font de leurs bien. Les femmes vertueuses sont obéissantes, et protègent ce qui doit être protégé, pendant l'absence de leurs époux, avec la protection d'Allah. Et quant à celles dont vous craignez la désobéissance, exhortez-les, éloignez-vous d'elles dans leurs lits et frappez-les. Si elles arrivent à vous obéir, alors ne cherchez plus de voie contre elles, car Allah est certes, Haut et Grand !"

Sourate 4, v. 38 : "Les hommes sont supérieurs aux femmes par le fait qu’Allah en a élevé plusieurs au dessus des autres".

Sourate 4, v. 43 : "Ô vous qui croyez, si vous êtes malade ou en voyage, si vous avez été en contact avec vos excréments ou que vous ayez touché une femme et que vous n'ayez pas d'eau, recourez à du sable avant de prier".


Le sémillant philosophe se fend d’une proclamation d’incertitude quant au châtiment des pécheurs dans les sociétés islamiques contemporaines. Il était temps qu’une autorité aussi reconnue que Nicolas Sarkozy mette la lapidation des femmes sur la table, à défaut d’y déposer une femme lapidée, outrecuidance interdite en convivialité mais plus parlante. Ramadan utilise dans ce texte fondateur (c’est du moins le destin qu’il lui souhaite) le mot de « contorsions ». On verra vite qu’il est docteur es contorsions.

La rédaction vous offre, malgré la hausse du papier qui détruit la presse libre, l’intégralité de la livraison du prophète suisse, parce qu'elle mérite qu'on s'y attarde avant de réviser la loi de 1905 et faire droit aux revendications communautaires.


L'Appel de Genève

(a) Introduction


De façon régulière les sociétés majoritairement musulmanes et les musulmans du monde sont confrontés à la question de l’application des peines liées au code pénal islamique. Que l’on se réfère à la notion de la « sharî’a » ou, de façon plus restrictive, à celle des « hudûd »[1], les termes du débat sont aujourd’hui déterminés par une question centrale dans la discussion entre les ulamâ’ et/ou entre les musulmans : qu’est-ce qu’être fidèle au message de l’islam à l’époque contemporaine ? Au-delà de ce qui est exigé de chacun, dans sa vie privée, qu’est-ce qui est requis pour une société qui se définirait comme « islamique »* ?
(*) TR est donc bien sur un objectif de changement de paradigme et non pas sur celui de l'intégration

On sait qu’il existe plusieurs courants de pensée dans le monde islamique et que les désaccords sont nombreux, profonds et récurrents. D’aucuns, une minorité, exigent l’application immédiate, et à la lettre, des hudûd car selon eux cette application est le préalable indispensable pour qu’une « société majoritairement musulmane » soit vraiment considérée comme « islamique ». D’autres, partant du fait objectif que les hudûd se trouvent effectivement dans les textes de référence (le Coran et la Sunna[2]), considèrent que l’application des hudûd est conditionnée par l’état de la société qui doit être juste et, pour certains, « idéale » et donc que la priorité est la promotion de la justice sociale, de la lutte contre la pauvreté et l’analphabétisme etc. D’autres enfin, eux aussi minoritaires, tiennent pour absolument caducs les textes relatifs aux hudûd et estiment que ces références ne doivent plus avoir leur place dans les sociétés musulmanes contemporaines.

On le voit, les avis sont divergents et les positions souvent tranchées sans que nous puissions dire que les arguments respectifs, sur ce sujet précis, soient vraiment explicites et explicités. A l’heure où nous écrivons ces lignes, alors que le débat de fond à l’intérieur des sociétés musulmanes est quasiment absent et que les positions demeurent très vagues, voire souvent nébuleuses, des femmes et des hommes subissent l’application de ces peines vis-à-vis desquelles il n’y a pas de consensus parmi les musulmans.

Pour les musulmans, l’islam est un message d’égalité et de justice. C’est par fidélité à ce message que nous ressentons l’impossibilité de rester silencieux devant une application aussi injuste de nos références religieuses. C’est aussi pourquoi la parole et le débat doivent se libérer et ne pas se satisfaire de réponses générales, gênées, et parfois alambiquées. Ces silences et ces contorsions intellectuelles sont peu dignes de la clarté du message de justice de l’islam.

Au nom des sources scripturaires musulmanes, au nom de l’enseignement islamique et au nom, enfin, de la conscience musulmane contemporaine ; il y a des choses à dire, il y a des décisions à prendre.


(b) Ce que dit la majorité des ulamâ’

Tous les ulamâ’ (savants) du monde musulman, d’hier et d’aujourd’hui, et dans tous les courants de pensée, reconnaissent qu’il existe des textes scripturaires qui font mention des châtiments corporels (Coran et Sunna), de la lapidation des femmes et des hommes adultères (Sunna) et de la peine capitale (Coran et Sunna). Il s’agit là du contenu objectif des textes que les ulamâ’ n’ont jamais discutée.

Les divergences entre les ulamâ’ et les divers courants de pensée (littéraliste, réformiste, rationaliste, etc.) tiennent essentiellement à l’interprétation d’un certain nombre de ces textes et/ou aux conditions de l’application des peines relatifs au code pénal islamique (nature des infractions commises, témoignages, contextes sociaux et politiques, etc.) ou, enfin, plus globalement et plus fondamentalement à leur degré de pertinence à l’époque contemporaine.

La majorité des ulamâ’, à travers l’histoire et jusqu’à aujourd’hui, est d’avis que ces peines sont bel et bien islamiques mais que « les conditions exigées » pour leur application sont quasiment impossible à réunir (notamment en ce qui concerne la lapidation) : elles sont donc « presque jamais applicables ». Les hudûd auraient surtout « une vocation dissuasive » dont l’objectif serait d’établir la gravité, dans la conscience des croyants, des actions entraînant de tels châtiments.

Qui lit les livres des ulamâ’, qui écoute leurs conférences et leurs sermons, qui voyage à l’intérieur du monde islamique ou côtoie les communautés musulmanes d’Occident entendra forcément, et invariablement, cette formule de la part des autorités religieuses : « ... presque jamais applicable ». Elle permet à la majorité des ulamâ’ et des musulmans d’échapper au cœur de la question sans donner l’impression d’être infidèle aux sources scripturaires islamiques. L’autre attitude étant celle d’éviter la question et/ou de garder le silence.


(c) Ce qui se passe sur le terrain

On aurait aimé que cette formule « presque jamais » soit comprise comme une garantie pour protéger les femmes et les hommes vis-à-vis de traitements répressifs et injustes ; on aurait souhaité que les conditions stipulées soient entendues comme une invitation à promouvoir l’égalité devant la loi et la justice entre les êtres humains par les gouvernements et les législateurs qui se réclament de l’islam. Or, il n’en est rien.

En effet, derrière un discours islamique qui minimise les faits et arrondit les angles, à l’ombre de ce « presque jamais », des femmes et des hommes sont châtiés, frappés, lapidés et exécutés au nom de l’application des hudûd et ce sans que la conscience des musulmans du monde entier ne s’émeuve outre-mesure. On fait comme si l’on ne savait pas, comme s’il s’agissait de trahisons mineures aux enseignements islamiques. Or, comble d’une injustice aggravée, ces peines ne s’appliquent qu’aux femmes et aux pauvres, doublement victimes, jamais aux riches, aux gouvernants ou aux oppresseurs. En sus, des centaines de prisonniers n’ont droit à aucune défense digne de ce nom : des sentences de mort sont décidées et exécutées à l’encontre de femmes, d’hommes, voire de mineurs (opposants politiques, trafiquants, délinquants, etc.) sans que les accusés n’aient pu avoir le moindre contact avec un avocat. Après avoir accepté le flou dans nos rapports aux sources scripturaires, nous démissionnons devant la trahison du message de justice de l’islam.

La communauté internationale a également une responsabilité majeure et manifeste devant le traitement de la question des hudûd dans le monde musulman. La dénonciation est sélective et opère selon le calcul et la protection des intérêts géostratégiques et économiques : un pays pauvre, d’Afrique ou d’Asie, essayant d’appliquer les hudûd ou la sharî’a fera face à des campagnes internationales de mobilisation comme nous avons pu le voir récemment. Il n’en est pas de même pour les pays riches, les pétromonarchies et/ou les pays considérés comme « alliés » que l’on dénonce timidement, ou pas du tout, malgré une application constante et connue de ces peines à l’encontre des segments les plus pauvres ou les plus fragilisés de leur société. L’intensité des dénonciations est inversement proportionnelle aux intérêts en jeu. Une injustice de plus.


(d) La passion des peuples, la crainte des ulamâ’

Pour qui voyage dans le monde islamique et côtoie un tant soit peu les musulmans, un constat s’impose : partout les populations manifestent un attachement à l’islam et à ses enseignements. Cette réalité, en soi intéressante, peut se révéler troublante, et carrément dangereuse, quand la nature de cet attachement est quasiment passionné, sans grande connaissance ni compréhension des textes, avec peu ou pas de distance critique quant aux différentes interprétations des savants, à la nécessaire contextualisation, à la nature des conditions requises, voire à la protection des droits des individus et à la promotion de la justice.


Sur la question des hudûd, on voit parfois des engouements populaires espérant ou exigeant leur application littérale et immédiate parce que cette dernière garantirait le caractère désormais « islamique » de la société. En effet, il n’est pas rare d’entendre des musulmanes et des musulmans du peuple (éduqués ou pas, et le plus souvent démunis) appeler à une application formaliste et stricte du code pénal (dans leur esprit, la sharî’a) dont ils seront eux-mêmes souvent les premières victimes. Lorsque l’on étudie ce phénomène, on comprend que deux types de raisonnement motivent généralement ces revendications :



1. L’application littérale et immédiate des hudûd rend légalement et socialement visible la référence à l’islam. La législation, par sa rigueur, donne le sentiment d’une fidélité à l’injonction coranique qui exige de respecter rigoureusement le texte. Au niveau populaire, on a pu voir dans les pays africains, arabes, asiatiques voire occidentaux, que c’est la dureté et l’intransigeance même de l’application qui lui octroie une dimension islamique dans la psyché populaire.
2. Les critiques et les condamnations de l’Occident alimentent en retour le sentiment populaire de fidélité à l’enseignement islamique selon un raisonnement antithétique, simple et simpliste : l’opposition farouche de l’Occident est une preuve suffisante de caractère authentiquement islamique de l’application littérale des hudûd. Certains s’en persuaderont en affirmant que l’Occident a depuis longtemps perdu ses références morales et est devenu tellement permissif que la dureté du code pénal islamique, qui sanctionne les comportements jugés immoraux, est par antithèse la seule vraie alternative « à la décadence occidentale ».

Ces raisonnements formalistes et binaires sont fondamentalement dangereux car ils revendiquent et octroient une qualité islamique à une législation non en ce qu’elle promeut, protège et applique la justice mais parce qu’elle sanctionne durement, et visiblement, certains comportement en contraste et en opposition avec les lois occidentales perçues comme moralement permissives et sans aucune référence à la religion[3]. On voit aujourd’hui que des communautés ou des peuples musulmans se satisfont parfois de ces types de légitimation pour soutenir un gouvernement ou un parti qui appelle à une application de la sharî’a comprise comme une application littérale et immédiate des châtiments corporels, de la lapidation et de la peine de mort.

Nous pouvons observer une sorte de passion populaire dont la caractéristique première est la volonté de répondre à divers types de frustrations et d’humiliations par une affirmation identitaire qui se perçoit comme islamique (et anti-occidentale) mais qui n’est pas fondée sur la compréhension des objectifs des enseignements islamiques (al-maqâsid) ni des différentes interprétations et des conditions relatives à l’application des hudûd.

Face à cette passion, beaucoup de ulamâ’ restent prudents de peur de perdre leur crédibilité auprès des masses. On observe une sorte de pression psychologique exercée par le sentiment populaire sur l’élaboration juridique des ulamâ’ qui devraient normalement être indépendants afin d’éduquer les populations et proposer des alternatives. Or, c’est le phénomène inverse qui s’observe aujourd’hui : la majorité des ulamâ’ craint de confronter les revendications populaires parfois simplistes, peu savantes, passionnées et binaires de peur de perdre leur statut et d’être considérés comme trop compromis, pas assez stricts, trop occidentalisés, pas assez islamiques.

Les ulamâ’, qui devraient être les garants d’une lecture profonde des textes, d’une fidélité aux objectifs de justice et d’égalité et d’une analyse critique des conditions et des contextes sociaux, se voient entraîner à accepter soit le formalisme (application immédiate non contextualisée), soit le raisonnement binaire (moins d’Occident, c’est plus d’islam), soit enfin ils se cachent derrière des formules qui les protègent sans apporter de solutions aux injustices quotidiennes que subissent les femmes et les pauvres (« ce n’est presque jamais applicable »).


(e) Un statu quo impossible : notre responsabilité

Le monde islamique traverse une crise très profonde dont les causes et les aspects sont multiples et parfois contradictoires. Les systèmes politiques du monde arabe sont le plus souvent verrouillés, la référence à l’islam est le plus fréquemment instrumentalisée et les opinions publiques sont soit muselées soit aveuglément passionnées (au point d’adhérer, voire même de revendiquer, l’application la plus répressive et la moins juste de la « sharî’a islamique » et des hudûd.

Dans le domaine plus circonscrit de la question religieuse, nous pouvons observer une crise de l’autorité accompagnée d’une absence de débat interne entre les ulamâ’ des différentes écoles de droit (et de pensée) et à l’intérieur des sociétés et des communautés musulmanes. Il en résulte une diversité d’opinions qui, si elle est en soi acceptée en islam, tourne aujourd’hui au désordre le plus général faisant coexister les avis juridiques islamiques les plus opposés et les plus contradictoires dont chacun revendique son « caractère islamique » à l’exclusion de tout autre. Devant ce chaos juridique, les populations et les musulmans ordinaires finissent par être plus motivés par des « impressions de fidélité » que par des opinions fondées sur le savoir et la compréhension des principes et des règles islamiques (ahkâm).

Il faut regarder la réalité en face. La quadruple crise des systèmes politiques fermés et répressifs, de l’autorité religieuse éclatée et aux exigences contradictoires et des populations qui n’ont pas accès à l’instruction et sont emportées par une fidélité aux enseignements de l’islam plus passionnée que réfléchie, ne peut légitimer notre silence gêné, complice et coupable lorsque des femmes et des hommes sont châtiés, lapidés ou exécutés au nom d’une application formaliste et instrumentalisée des sources scripturaires de l’islam.

Il en va de la responsabilité des musulmans du monde entier. C’est à eux de relever le défi de la fidélité au message de l’islam à l’époque contemporaine ; c’est à eux d’en dénoncer les déficits et les trahisons où qu’ils aient lieu et par quelque autorité ou individu musulmans que ce soit. Une tradition prophétique rapporte : « Aide ton frère, qu’il soit injuste ou victime d’une injustice. » Un des Compagnons demanda : « Envoyé de Dieu, je comprends comment aider quelqu’un qui est victime d’une injustice, mais comment l’aiderais-je si c’est lui qui est injuste ? » Le Prophète (PBL) répondit : « Empêche-le d’être injuste, c’est ainsi que tu l’aideras. »[4]

C’est ainsi la responsabilité de chaque ‘âlim (savant), de chaque conscience, de chaque femme et de chaque homme, où qu’elle ou il se trouve. Les musulmans occidentaux se cachent parfois derrière l’argument que l’application de la sharî’a ou des hudûd ne les concerne pas car ils n’y sont pas obligés « en situation de minorité »[5]. Ils gardent donc sur la question un silence gêné et souvent lourd. Ou alors ils expriment une condamnation à distance sans chercher à faire évoluer les choses et les mentalités. Or, ces musulmanes et ces musulmans, qui vivent dans des espaces de liberté politique, qui ont la possibilité d’accéder à l’éducation et au savoir, ont - au nom même des enseignements islamiques - une responsabilité majeure pour tenter de réformer la situation, ouvrir un débat de fond, condamner et faire cesser les injustices perpétrées en leur nom.


(f) Un appel, des questions

Compte-tenu de toutes ces considérations, nous lançons aujourd’hui un Appel international à un moratoire immédiat sur les châtiments corporels, la lapidation et la peine de mort dans tous les pays majoritairement musulmans.

Considérant que les avis des savants ne sont ni explicites ni unanimes (voire même sans claire majorité) quant à la compréhension des textes et à l’application des hudûd et que, de surcroît, les systèmes politiques et l’état des sociétés majoritairement musulmanes ne garantissent pas un traitement juste et égalitaire des individus devant la loi ; il est de notre responsabilité morale et religieuse de demander à ce que l’on mette un terme immédiat à l’application des hudûd que l’on assimile faussement à la « sharî’a islamique ».


Cet appel se double d’une série de questions fondamentales adressées à l’ensemble des autorités religieuses islamiques du monde et ce quelles que soient leur tradition (sunnî ou shî’î), leur école de droit (hanâfî, mâlikî, ja’farî, etc.) ou leur courant de pensée (littéraliste, salafî`, réformiste, etc.) :


1. Quels sont les textes (et quels sont leur degré respectif d’authenticité reconnue), qui font référence aux châtiments corporels, à la lapidation et à la peine de mort dans le corpus des sources scripturaires islamiques circonscrites à ce que les spécialistes appellent les hudûd ? Quelles sont les marges d’interprétations possibles et sur quels domaines se sont exprimés les points de divergences (al-ikhtilâf) dans l’histoire du droit islamique et jusqu’à l’époque contemporaine ?

2. Quelles sont les conditions (shurût) stipulées pour chacune des peines par les sources elles-mêmes, le consensus des savants (al-ijmâ’) ou par des savants isolés à travers l’histoire du droit et de la jurisprudence islamiques (fiqh) ? Quelles ont été les divergences quant à la stipulation de ces conditions et quel type de « circonstances atténuantes » ont été parfois élaborées par telle ou telle autorité religieuse à travers l’histoire ou dans les différentes écoles juridiques ?
3. Le contexte socio-politique (al-wâqi’) a toujours été considéré par les ulamâ’ comme une des conditions de l’application des hudûd mais son importance est telle que cette question exige un traitement particulier (et la participation aux débats des intellectuels, notamment ceux qui sont spécialisés dans les sciences humaines). Dans quel contexte est-il aujourd’hui possible de penser appliquer les hudûd ? Quelles seraient les conditions requises en matière de système politique et d’application de la législation générale : liberté d’expression, égalité devant la loi, éducation populaire, état de la pauvreté et de l’exclusion sociale, etc. ? Quels sont, dans ce domaine, les points de divergences entre les écoles de droit et les ulamâ’ et sur quoi reposent ces désaccords.


L’étude des ces questions doit être de nature à clarifier les termes du débat en ce qui concerne les latitudes interprétatives offertes par les textes en même temps qu’une prise en compte déterminante de l’état des sociétés contemporaines et de leur évolution. Cette réflexion intracommunautaire exige de fait une double intelligence des textes et des contextes dans un souci de fidélité aux objectifs du message de l’islam : sur le fond, elle doit nous permettre de répondre à la question de savoir ce qui est applicable (et selon quelles modalités) et ce qui ne l’est plus (compte tenu des conditions requises impossibles à réunir et de l’évolution des sociétés s’éloignant immanquablement de l’idéal requis).


Cette démarche, de l’intérieur, exige de la rigueur, du temps et la mise sur pied d’espaces de dialogue et de débats nationaux et internationaux entre les ulamâ’, les intellectuels musulmans et à l’intérieur des communautés islamiques puisqu’il ne s’agit pas seulement de rapport aux textes mais également aux contextes. Dans l’intervalle, il ne peut être question d’appliquer des peines qui ne pourront qu’entériner des approximations légales et des injustices tel que c’est déjà le cas aujourd’hui[6]. Un moratoire s’impose donc pour permettre un débat fondamental qui se déroule dans la sérénité et sans jamais servir de caution à l’instrumentalisation de l’islam.

Il faut que cessent immédiatement toutes les injustices légalisées faites au nom de l’islam.


(f) Entre la lettre et les objectifs : la fidélité

D’aucuns comprennent, et comprendront, cet appel comme une incitation à ne pas respecter les sources scripturaires de l’islam. Demander un moratoire serait aller contre les textes explicites du Coran et de la Sunna. Or,il s’agit exactement du contraire : tous les textes qui réfèrent au domaine du droit exigent d’être lus en fonction des finalités qui les justifient (al-maqâsid). Ainsi parmi les finalités essentielles et supérieures, on trouve stipulées la protection de l’intégrité de la personne (an-nafs) et la promotion de la justice (al-‘adl). Or, une application littérale des hudûd, non contextualisée et sans le respect des strictes et multiples conditions énoncées, et qui se présenteraient comme une fidélité formelle aux enseignements de l’islam, peut en être, dans les faits, une trahison puisqu’elle peut produire, selon le contexte, de l’injustice caractérisée.

Le calife ‘Umar ibn al-Khattab a bien établi un moratoire lorsqu’il a décidé de suspendre l’application de la peine touchant les voleurs pendant l’année de la famine. Le texte coranique est pourtant des plus explicites mais l’état de la société rendait son application littérale injuste : on aurait châtié de pauvres gens dont le vol potentiel aurait eu pour seul objectif de chercher à survivre en situation de pauvreté absolue. Au nom donc de la finalité de justice exigé par le message global de l’islam, ‘Umar ibn al-Khattab a décidé de suspendre l’application d’un texte : la fidélité à la littéralité de ce dernier aurait signifié l’infidélité et la trahison de cette valeur supérieure de l’islam qu’est la justice. C’est au nom de l’islam et dans la bonne intelligence des textes qu’il a suspendu l’application d’un de ces textes. Le moratoire trouve ici un précédent historique de première importance.

La réflexion et les réformes nécessaires dans les sociétés majoritairement musulmanes ne pourront venir que de l’intérieur. C’est aux musulmanes et aux musulmans de prendre leurs responsabilités et de mettre en branle ce mouvement qui ouvre au débat et au dialogue intracommunautaire tout en refusant que des injustices continuent à être légalisées et appliquées au nom de l’islam, c’est-à-dire en leur nom. Une dynamique endogène est impérative**.
(**) La Réforme exclurait donc la participation des chercheurs (savants) non musulmans qui sont les plus en pointe sur l'aggiornamento de l'islam d'occident avec en ligne de mire la protection de la laïcité sociale, mais la proposition sélective braquerait l'université française, d'où la remarque ci-dessous.

Cela ne veut pas dire que les questions posées par des intellectuels ou des citoyens non musulmans doivent être disqualifiées, au contraire. Toutes les parties doivent apprendre à se décentrer et se mettre à l’écoute de l’autre, de ses points de références, de sa logique et de ses espérances. Pour les musulmans toutes les interrogations sont les bienvenues, de la part de leurs coreligionnaires ou des femmes et des hommes qui ne partagent pas leurs convictions : il leur appartient ensuite d’en faire le ferment et le dynamisme de leur pensée qui, de l’intérieur, sera la mieux à même d’être fidèle à l’exigence de justice de l’islam en tenant compte des exigences de l’époque contemporaine.


(g) Conclusion

Cet appel à un moratoire immédiat sur les châtiments corporels, la lapidation et la peine de mort est exigeant à plus d’un titre. Nous en appelons à la prise de conscience de chacun pour qu’elle/il se sente concerné par l’instrumentalisation de l’islam et le traitement dégradant auquel sont soumis des femmes et des hommes dans certaines sociétés majoritairement islamiques au cœur d’un silence complice et d’un désordre généralisé quant aux avis juridiques en la matière. Cette prise de conscience implique en aval :

- Une mobilisation des musulmans ordinaires à travers le monde appelant les gouvernements à décider un moratoire immédiat sur l’application des hudûd et à l’ouverture d’un vaste débat intracommunautaire (critique, raisonnable et argumenté) entre les ulamâ’, les intellectuels, les leaders et les populations.

- L’interpellation des ulamâ’ pour qu’ils osent enfin dénoncer les injustices et les instrumentalisation de l’islam dans le domaine des hudûd et qu’ils appellent, au nom même des textes islamiques et à leur fidélité, à un moratoire immédiat suivant ainsi l’exemple de ‘Umar ibn al-Khattab.

- Promouvoir l’éducation des populations musulmanes pour qu’elles dépassent les mirages du formalisme et des apparences. L’application de mesures répressives et des châtiments ne rend pas une société plus fidèle aux enseignements islamiques : c’est bien plutôt sa capacité à promouvoir la justice sociale et la protection de l’intégrité de chaque individu, femme ou homme, pauvre ou riche, qui détermine sa fidélité authentique. La norme en islam, ce sont les droits que l’on protège et non les peines que l’on inflige (qui ne peuvent être que l’exception fortement conditionnée).

- Ce mouvement de réforme de l’intérieur, par les musulmans et au nom même du message et des textes de référence de l’islam, ne devrait jamais faire l’économie d’être à l’écoute du monde environnant et des interrogations que l’islam suscite dans l’esprit des non musulmans : non pas pour se plier aux réponses de « l’autre » ou de « l’Occident » mais pour chercher, dans son miroir, à rester, mieux et plus constructivement, fidèle à soi.


Nous appelons toutes celles et tous ceux qui adhérent aux termes de cet appel à se joindre à nous et de faire entendre leur voix pour que cesse immédiatement l’application des hudûd dans le monde musulman et qu’un débat de fond s’instaure sur la question. C’est au nom de l’islam, de ses textes et de son message de justice que nous ne pouvons plus accepter que des femmes et des hommes subissent des châtiments et la mort dans un silence gêné, complice et finalement lâche.

Il est urgent que les musulmanes et les musulmans du monde refusent les légitimations formalistes des enseignements de leur religion et se réconcilient avec la profondeur d’un message qui invite à la spiritualité et exige l’éducation, la justice et le respect du pluralisme. Les sociétés ne se réformeront pas par des mesures répressives et des châtiments mais par l’engagement de chacun à établir l’Etat de droit, la société civile, le respect de la volonté populaire et une législation juste garantissant l’égalité des femmes et des hommes, des pauvres et des riches, devant la loi. Il est urgent de mettre en branle un mouvement de démocratisation qui fasse passer les populations de l’obsession de ce que sanctionne la loi à la revendication de ce qu’elle devrait protéger : leur conscience, leur intégrité, leur liberté et leurs droits.

A Genève, le 18 mars 2005
Tariq Ramadan



Notes : [1] Concept qui signifie littéralement « les limites ». Dans le langage spécialisé des juristes musulmans (fuqahâ’), le terme renvoie à l’ensemble des peines qui relèvent de l’application du code pénal islamique.
[2] Traditions prophétiques : textes qui rapportent ce que le Prophète de l’islam (BSL) a dit, fait ou approuvé durant sa vie.
[3] Dans les pays musulmans eux-mêmes, les lois que l’on perçoit comme « empruntées de l’Occident » sont souvent interprétées comme des instruments utilisés par les gouvernements dictatoriaux pour tromper et, en fait, légitimer leur caractère autocratique et, plus sournoisement, pour promouvoir l’occidentalisation culturelle et morale de la société.
[4] Hadîth rapporté par al-Bukhârî et Muslim.
[5] L’argument est faible et dangereux car il cautionne implicitement l’application des hudûd dans le contexte actuelle des sociétés « en terre d’islam »
[6] Nos doutes, en toutes circonstances, doivent bénéficier à l’accusé selon une règle universelle du droit (constitutive, dès l’origine et sur la base des sources scripturaires, de la tradition juridique islamique)


Synthèse brève du piéton du roi :

A la fin de cette lecture, beaucoup d'entre-vous sont perturbés. Est-ce la voie pacifique pour intégrer un islam rénové en Europe ? Faut-il discuter sur ces bases avec les musulmans de bonne volonté ? Faut-il comprendre que "Paris vaut bien une messe" et que l'Europe en voie d'islamisation exige l'aggiornamento de la doctrine prophétique pour y réussir la conversion du plus grand nombre. La normalisation de la condition féminine est incontournable. C'est plus que transparent. C'est habile. Ramadan ne parle d'ailleurs que de la révision des codes sociétaux. Mais douze ans après, l'appel solennel au moratoire sur les lapidations, mutilations et décapitations n'a pas été entendu dans la oumma. Au lieu d'adopter la séquence transformiste qui donnera l'illusion d'une intégration réussie dans nos sociétés, les couteaux sont sortis des cuisines où l'on n'utilise plus que des bouteilles de butane pour frire ! Les activistes islamiques ont au contraire durci leur approche de la conversion des infidèles, à défaut pensent s'en passer en les expédiant en enfer. Tariq Ramadan et les modernes sont en échec sur toute la ligne. La voie pacifique est bouchée, le général égyptien Abdel Fattah al-Sissi qui est au cœur de l'orage, a choisi l'affrontement ouvert.

Comme tout monothéisme l'islam est fondamentalement hégémonique et son aggiornamento ne gommera pas son essence profonde. Libre d'inonder le territoire, il s'appropriera la société aux prétextes moraux d'un retour à la pudeur et au respect d'une nature créée. Les arguments libertaires ne tiendront pas longtemps surtout quand ils sont portés par des pourrisseurs de l'âme humaine, le dévergondage occidental autorisera le réarmement moral, et l'islam pourrait bien s'engouffrer dans la brèche. La France laïque est la principale terre de mission, placée par la géographie au cœur du continent, bénéficiant d'une image "droits" dans le monde entier, et subissant le désintérêt républicain pour les spiritualités. Sa conversion (hypothétique) serait un coup de tonnerre sur la planète et favoriserait celle de tous les autres.

Tariq Ramadan, apôtre du double langage, aurait pu nous subvertir par l'intelligence - car il est très intelligent - si n'avait paru Soumission de Michel Houellebecq, construction romanesque qui a défloré la démarche subtile que vous avez sans doute comprise à la fin de votre effort de lecture. Merci.



Codex#04 - dossier AF

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La revue CODEX parle de l'Action française (AF) dans son opus #04 (clic). Ceux qui connaissent l'AF de l'intérieur n' y apprendront rien, les autres en sauront presque tout, ce qui peut signifier que le défi a été relevé. L'organisation du dossier de 53 pages est très réussie, pédagogique. Les contributeurs à cet exploit sont, outre les maquettistes maison, Jacques Prévotat, Olivier Dard, Jean-Yves Riou (directeur de la publication), Priscille de Lassus (rédactrice en chef), Christian Sorrel, Florian Michel, Antoinette Castelnuovo et François Huguenin. C'est bien le dernier qui agace. Après son pavé de sept cents pages chez Perrin (L'Action française - Synthèses historiques 2011), Huguenin se garde bien de contredire son assertion première, l'AF est morte même si je suis presque d'accord que l'héritage a été stérilisé par les caricatures de maurassiens qui ont présidé aux différents journaux des années 1960 à 1990. L'AF serait donc morte mais le Maître ne le serait pas du tout, même si l'édition renâcle à publier ses textes. Il faut dire que la rhétorique maurassienne est difficile à assimiler pour le grand public d'aujourd'hui qui achèterait les bouquins.

L'Action française n'est pas morte aussi longtemps que des esprits critiques s'en revendiqueront. Entendons que toute l'AF ne réside pas dans les structures déclarées en préfecture, il y a des maurassiens partout, jusque récemment à la Maison Blanche¹. Disons aussi qu'on ne peut la résumer comme le font certains bien imprudemment aux Camelots du roi et à la vente à la criée du journal. Colloques et conférences se succèdent à Paris et dans les trois métropoles provinciales où des équipes restent actives (Lyon, Bordeaux, Marseille). Le niveau des intervenants ne permet cependant pas d'emplir des amphithéâtres, peut-être parce que le projet déroulé ne se démarque pas assez clairement du projet frontiste. L'AF s'est embourbée dans la même ornière que le Front national : le souverainisme obtus ; elle a l'avantage de disposer des ressources intellectuelles pour s'en arracher, ce qui fait défaut au parti Le Pen ou à Dupont-Aignan.
(1) Steve Bannon est maurassien et raspalien, mais pas un "saint".

Répétons ici que l'objectif réel du changement de paradigme devrait être l'optimisation à outrance de nos dépendances et non pas de les rompre, ce qui est impossible et stupide à soutenir. Recentrons-nous sur la monarchie sociale et fédérative comme la présente, par exemple, Jean-Philippe Chauvin dans son blogue Nouvelle Chouannerie. Défendons la priorité budgétaire du régalien et la désétatisation du sociétal. On ne peut que souhaiter une édition didactique en visuels de ce projet monarchique porté par le Groupe Action Royaliste, et de trouver les moyens nécessaires à une large diffusion...
Ce qui manque au royalisme français c'est une offre politique claire, lisible, compréhensible, propagée sur tous les segments de l'opinion. S'en remettre au roi n'y suffira pas !


Ce numéro de CODEX contient une perle rare : l'exposé des travaux de Michel Pastoureau, rare spécialiste de l'histoire des couleurs. Dès l'entame le lecteur est capturé par la dérive des couleurs depuis l'Antiquité, et pour une fois on découvre quelque chose d'inédit. L'autre sujet passionnant est l'histoire des Juifs de la papauté d'Avignon. Le prochain numéro (#05) est consacré à Luther et sa Réforme. Abonnez-vous au quatre numéros annuels, 60 euros pour 720 pages, papier glacé, quadrichromie, vous ne le regretterez pas, sinon allez au point-presse près de chez vous (clac).


Une simple remarque aux chapelles

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Que les chapelains se rassurent, nous ne parlerons pas d'argent. Ouf ! Nous allons parler de communication. Ah, quand même ! Ben oui, aux jours d'aujourd'hui il ne sert à rien d'avoir raison tout seul dans son galetat et de l'écrire dans son carnet intime pour que change le monde. Internet a propulsé les idées de tout un chacun sur la planète par le vecteur des blogues, les groupements d'intérêts ou d'opinion en font autant par le moyen de sites en ligne, Partout on diffuse beaucoup, ce qui ne veut pas dire que l'on communique si bien que ça. Les supports internétiques royalistes sont moches, souvent empoussiérés, à l'exception de... il y a si peu d'exceptions. Chaque taulier se contente de mettre en ligne comme on étendrait du linge sur la corde du jardin pour croire sa mission de propagande accomplie. En fait nul ne percute vraiment l'Opinion. Prenons l'exemple du camp Maxime Real del Sarte de l'Action française où se pressent chaque année des contributeurs de qualité pour apporter la bonne parole aux militants royalistes.

Il n'y a pas de vrai plan de communication au sein du CRAF organisateur. Lors de la préparation de l'édition 2017, le site officiel ne donnait pas accès facilement aux éléments basiques (dates, prix, programme) et il valait mieux passer par les algorithmes de Google pour faire monter la page pertinente à l'écran, ce qui est très décevant quant aux capacités de communication. Pendant le camp, il y eut quelques efforts méritoires d'Antoine Berth sur Twitter pour relayer les conférences, mais le réseau n'est pas un support d'affichage, juste un tapis roulant d'informations et réactions. La vie du tweet est très courte.

La semaine qui suit le camp d'Ailly aurait pu être consacrée à la mise en page et diffusion des interventions magistrales, en privilégiant l'écrit qui est beaucoup plus maniable que la vidéo amateur. A part trois brèves qui publient trois questions (factices) à trois intervenants, le site du CRAF ne donne rien de plus à lire de ce camp d'été (pour l'instant). En plus l'accès aux questions n'est pas direct, il faut deviner que dans la barre de navigation c'est l'onglet "Vie du mouvement" qui est la porte d'entrée vers un autre onglet de rang 2. Vous l'avez ici directement par la vignette noire "Questions" ci-contre. On est au niveau du blog rose de Skyrock ! Donc après le CMRDS, on ne communique pas, on digère ! A croire que (censuré)...
Passons au matériau.

Depuis sa création ou pas loin, le blogue Royal-Artillerie a promu chaque année le camp Maxime Real del Sarte. Pour ce faire, le blogue utilise le flyer du CRAF s'il existe, sinon il doit créer des images plus ou moins suggestives suscitant des clics vers la page ad hoc de l'Action française ; certaines années, le Piéton s'est fendu en plus d'un ou deux billets. A noter en passant qu'il n'y a jamais eu de remerciement d'aucune sorte de la vieille maison, même sous une forme cavalière du style "salut! sympa!" à l'exception d'un eurosceptique désabusé qui fit rebond de Maurras à moto, l'an dernier. Le Piéton ne recherchait pas non plus de reconnaissance.

S'il y avait une équipe de communication active dans cette chapelle - et c'est vrai pour toutes -, elle fabriquerait des fenêtres d'accès intégrables sur les blogues amis, royalistes ou pas. Seraient bienvenus au minimum une bannière (avec deux dimensions pour coller en tête ou en pied de site), deux ou trois vignettes attrayantes avec des tailles de caractères permettant les compressions, pour intégrer dans les sidebars de blogues. Plus compliqué serait une vidéo de présentation (sans speaker playmobil, de grâce, c'est démodé).

Pour bien montrer de quoi on cause, voici quelques vignettes simples de filles crées par Royal-Artillerie à cette occasion - une équipe affûtée aurait fait mieux sans forcer. Il y en eut aussi mais plus funèbres, pour la retraite au flambeau de Louis XVI ; même problématique. On va malgré tout commencer la liste par un flyer CRAF très réussi pour 2016 :

Affiche_CMRDS2016



fille canon





Les sites d'Action française ne sont pas les seuls à pâtir d'amateurisme dans le domaine de la propagande, le parti de l'Alliance royale, la réunion des cercles légitimistes, les fédérations provinciales de toute obédience, le mouvement bourbonien, les "groupements individuels" aussi, sont complètement dépassés sur ce plan ! Mention rectificative pour le Groupe Action royaliste* qui est dans un réel effort d'affichage de ses activités et pour le site La Couronne** qui promeut la maison d'Orléans avec talent ; et dans un autre genre, le Conseil en l'espérance du roi*** qui publie quotidiennement à gros débit sur une maquette mono-couloir qui malheureusement bride sa diffusion.

Quand donc les chapelles royalistes découvriront-elles la communication professionnelle destinée au plus grand nombre ? C'est ici que le principe adjudanesque prend toute sa vertu s'il est médité par des gens qualifiés qui privilégieront le choc du discours iconographique à l'inondation tiède des avis de supériorité, en gardant à l'esprit le souci d'atteindre le plus grand nombre directement et indirectement par les relais d'informations extérieurs au microcosme :


En faire peu !

Le bien faire !

Le faire valoir !


* GAR
** La Couronne
*** CER

Rohingya, chiens perdus sans collier (Cesbron)

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Le monde attend le prix Nobel de la paix Aung San Suu Kyi sur l'affaire des Rohingya. Enfin, pas tout le monde ! Les Etats voisins de la Birmanie n'attendent rien d'autre que le naufrage général des barques pour noyer le poisson parce qu'ils ont tous des minorités remuantes auxquelles ils ne veulent montrer aucun exemple de mansuétude. Alors coulerait-on deux cent mille boat peoples que les yeux du sous-continent indien resteraient secs. A preuve les reportages "touchants" d'agences de presse étrangèreà la zone n'y émeuvent personne. Pourquoi ? Rapport à la vie, à la mort. L'Occident ayant échappé à l'eschatologie individuelle a sacralisé la vie qui est sa propre fin, exception faite de la métempsychose hollywoodienne et du transhumanisme de la Silicon Valley. L'Orient considère la vie comme un passage entre deux états, l'éternité étant la règle dans le malheur comme dans le bonheur. Les Rohingya ont de grandes difficultés dans ce passage, mais tout naufrage dans ce monde est un seuil. C'est triste ! Et ça s'arrête là. Ceci dit pour l'absence d'émoi de l'opinion. Mais il y a autre chose de plus reconnaissable par les analystes occidentés : la géopolitique du sous-continent et l'irrédentisme musulman. Tout le sous-continent est en proie à la déstabilisation islamique ; même les Hui chinois déclenchent maintenant des émeutes pour pousser leur avantage démographique local et exiger la charia dans certaines villes comme Tangshan (Hebei) la semaine dernière ou Shanghaï l'an dernier. Du jamais vu, même au Xinjiang où les Ouighours sont nombreux.

Le pouvoir birman a parfaitement localisé le furoncle capable de détacher un jour la province d'Arakan (Rakhine en birman), qui depuis le début est mal attachée au pays. L'Etat de Rakhine (Arakan) est dans une position malgré tout stratégique sur le Golfe du Bengale, c'est une porte d'entrée du Yunnan chinois (à travers le Triangle d'Or) et il y a du gaz dans la mer. La bande côtière est coupé du reste de la Birmanie par les montagnes d'Arakan (3000m) et aurait vocation naturelle à s'en séparer. Que l'ethnie rohingya puisse être le ferment d'une sécession ne fait aucun doute à Rangoun, d'autant plus que la pratique rigoriste d'un islam salafiste est la marque de fabrique de cette communauté depuis qu'elle s'est coupée du Bangladesh. Les précédents du Front Moro islamique de libération (MILF) à Mindanao (Philippines) comme l'Organisation pattanie unie de libération (PULO) au sud de la Thaïlande sans parler des guérillas d'Aceh (Sumatra), servent d'avertissement. Par chance l'Etat de Chin qui domine l'Arakan n'est pas musulman mais animiste et chrétien. Pour comprendre le dilemme birman il faut une carte ethnique sur laquelle, dit en passant, les Rohingya n'apparaissent pas puisque ils sont décrétés immigrés clandestins par Rangoun :


Chaque nationalité a sa religion. Au résultat : 89% de bouddhistes (petit véhicule), 3% de baptistes, 1% de catholiques, 4% de musulmans, 1% d'animistes et 2% du reste. Les groupes ethniques se divisant entre Birmans 68%, Shan 9%, Karen 7%, Rakhine 4%, Chinois 3%, Indiens 2%, Mon-Khmer 2%, autres 5%. Le pouvoir central militaire a déjà eu des problèmes avec les Karen et les Shan qui ont été matés dans une sauvagerie à peine croyable. Le pays est partout difficile d'accès où les chefs locaux s'érigent facilement en tyrans et veulent faire de l'argent à partir de tout y compris les êtres humains ! Le contrôle des guérillas locales s'opère le plus souvent par la terreur appliquée par la soldatesque aux populations civiles sensées être l'eau qui fait vivre le poisson rouge ou vert.

Aung San Suu Kyi connaît tout ça sur le bout des doigts ; elle est la fille d'Aung San, le père de l'indépendance birmane arrachée aux Anglais, et les Rohingya furent ses ennemis, supplétifs de l'Armée des Indes dans l'espoir d'un découpage à leur profit. Dans la mesure où le Bangladesh ne reconnaît pas cette ethnie comme sienne (ils ne parlent pas le bangla) il ne veut pas que l'on débonde les camps de concentration sur son territoire déjà écrasé par une démographie intenable (la Première ministre bangladaise a été très claire : que l'ONU se démerde !), la seule solution serait de déporter les Rohingya sur une île assez grande pour les accueillir tous. Cette île n'existe pas dans ces conditions mais on en parle depuis des années : il s'agirait de les déporter "temporairement" sur l'île de Thengar Char dans la baie du Bengale, l'humanitaire et les infrastructures étant assurés par les agences onusiennes... quand on en aura chassé les pirates fermement établis. On imagine bien que l'île n'est pas un cadeau de Dacca (clic), marée et mousson la noient régulièrement. Néanmoins l'idée fait son chemin, l'Indonésie projette à son tour de vider ses camps de regroupement rohingya sur une île déserte de l'immense archipel sous les mêmes conditions vis à vis de l'ONU.

L'Arakan est un abcès de fixation de l'irrédentisme musulman à connotation salafiste. Ils sont plusieurs sur les côtes de l'Océan indien à brûler le carburant idéologique fourni par al-Qaïda et le Groupe Etat islamique. Toute communauté musulmane structurée est suspecte. Celles qui disposent d'un ancrage territorial indiscutable peuvent trouver des accommodements avec les pouvoirs locaux pour autant qu'elles cessent de vouloir régenter l'espace public à leur profit. Le cas particulier des Rohingya apatrides vient de ce qu'ils n'appartiennent à personne. Où qu'ils aillent, leurs voisins les détestent. Un territoire vierge à mettre en valeur semble être la seule solution pérenne. On devrait trouver quelque terre promise parmi les îles de la Sonde. Aung San Suu Kyi est de mon avis et elle ne les gardera pas, quitte à rendre le Prix.

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911 - in memoriam mori

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Le direct de RFI, je m'en souviendrai toute ma vie, je ne comprenais rien !

Les confédérés de Visegrád

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"Ils ne nous briseront pas !"
Le retour de la guerre de Sécession à l'avant-scène et l'hystérie des élites américaines diplômées en veulerie, affairées à transformer une victoire vieille de cent cinquante ans en repentance universelle, me font bizarrement penser au groupe de Visegrád* qui se démène comme un beau diable pour ne pas être phagocyté par les gnomes de Bruxelles. Quatre anciens pays du glacis soviétique, Pologne, Tchéquie, Slovaquie et Hongrie, renforcés bientôt peut-être de l'Autriche, refusent les diktats de Bruxelles sur leurs sociétés, dont l'objectif est clairement d'aboutir à un état d'union contre une union d'Etats. Et comme ce fut le cas jadis de l'Union gouvernée par la Banque et la Forge du Nord, il faut bien un leader à toute fédération contrairement à la confédération : le candidat allemand semble avoir déjà gagné, surtout depuis le départ de la Grande-Bretagne. Les Visegrád ne l'acceptent pas.

Les similitudes sont grandes entre la sécession sudiste américaine et le cabrage euroriental, à l'exception du système de production. Il y est question de lois "nationales" mais surtout de modes de vie spécifiques à peine libérés du joug russe, et déjà menacés par la décomposition sociétaliste. De valeurs naturelles et traditionnelles aussi ! Nous pouvons comprendre que dans l'esprit de ces peuples, quarante ans d'abrutissement communiste ne puissent en aucun cas déboucher sur une mise au pas de ces pays par la ploutocratie occidentale à l'effigie hideuse d'un George Soros, qui mettrait en péril ce que l'on appelle tout simplement les libertés.

Pour nous Français, outre l'écho souverainiste qu'il produit dans un large secteur de l'opinion métropolitaine, nous avons des affinités intellectuelles avec ces pays, affinités que nous n'avons pas su transformer en coopération dans les champs diplomatiques et économiques (en 1989 on était hélas sous Mitterrand, puis Chirac, autant dire morts). Ce groupe de Visegrád est intéressant au premier titre de son équivalence en poids. Le territoire est similaire à celui de la métropole (534000 contre 551000km² chez nous) et la population est aussi semblable en effectifs (64 millions). La différence réside dans le produit intérieur brut : 876 milliards de dollars contre 2490 en France, mais leur marge de progression est plus forte de par la proximité d'un champ de développement illimité à l'Est : Visegrád est mitoyen de la Russie (Kaliningrad), de la Biélorussie, de l'Ukraine mais aussi de la Roumanie. A noter que le renfort hypothétique de l'Autriche apporterait un PIB de 400 milliards de haute qualité.

Si on va au fond des choses, on voit que ce groupe conteste la suprématie politique allemande tout en bénéficiant de la sous-traitance de l'industrie allemande. L'affaire est de longue mèche et remonte jusqu'à la constitution de la Prusse en Royaume. La Prusse et l'Autriche-Hongrie, puis l'Allemagne impériale après 1870, ont modelé toute la Mitteleuropa sur deux siècles et le légataire universel qu'est la RFA continue aujourd'hui le projet. Le développement des quatre Etats rétifs se fait à partir des territoires allemands, les capitaux de développement s'ils sont européens, accompagnent le plus souvent des investissements allemands. Les flux et fuseaux sont est-ouest. La revendication des Visegrád est d'y substituer fuseaux et flux nord-sud depuis la Baltique méridionale jusqu'à l'Adriatique, en irriguant les Balkans slaves. On pourrait faire un titre avec l'Union danubienne. A noter que de la France il n'est jamais question là-bas sauf pour s'en agacer quand la reine des gitans vient y donner des leçons.

Les choses ne dégénéreront pas comme en 1861 aux Etats-Unis, mais la pression visant à casser cette résistance, bien ingrate selon les pays fondateurs, va augmenter depuis que le président Macron a décidé de renforcer la main-mise de la chancelière Merkel sur sa zone d'intérêts dans l'espoir un peu fou qu'elle prenne nos bons du Trésor. Les Visegrád n'ont pas les capacités économiques et financières pour s'engager dans une sécession à l'anglaise. Imaginer seulement la facture qui serait présentée à chacun par l'Union européenne quand on connaît celle envoyée à Theresa May (entre 60 et 100 milliards d'euros). En revanche, c'est toute la politique de collaboration-endiguement de l'Union européenne vis à vis du nouveau bloc russe qui est mise en péril car les quatre pays sont eux, comme les trois baltes, au front et pèsent lourd dans la question ukrainienne ! Certains autres pays non contigus comme le Danemark ou les Pays-Bas suivent de près l'évolution de la Commission européenne face à ce cabrage qui ressemble au leur.


Les réticences peuvent néanmoins être contournées par l'atlantisation de la dispute. Les quatre pays sont pro-OTAN sans état d'âme car ils n'ont strictement aucune confiance dans une défense européenne, dirigée qui pis est par la France et l'Allemagne (Munich et les Sudètes ne sont pas si loin dans l'esprit des Européens de l'Est). C'est plutôt donc dans le cadre atlantique que les apaisements devraient être recherchés si les gouvernements polonais et hongrois voulaient bien mettre un peu d'eau dans leur vin. Cette voie de négociation ferait certes rentrer les Américains dans le schmilblick en même temps qu'on parle beaucoup de transport de gaz, mais le Département d'Etat ne semble pas en capacité de mener l'affaire seul pour l'instant, avec à sa tête l'ancien boss d'Exxon, excédé de se faire braquer chaque jour par la représentante américaine à l'ONU, et à la Maison Blanche, un président qui construit sa stratégie internationale entre ce qu'il voit sur CNN à la télé et ce qu'il tape sur son smartphone immédiatement après.

Le groupe de Visegrád pose la bonne question, celle qui aurait dû être tranchée il y a cinquante ans : confédération ou fédération ? Consulter tous les peuples européens ne serait pas un luxe ni temps perdu. Les pays choisissant la fédération en formeraient une entre eux et ils entreraient groupés dans la confédération qui satisferait les autres. Pour éviter des chamailleries ultérieures on pourrait oublier la règle simpliste de la majorité absolue et choisir des scrutins à quorum et majorité renforcée, et tous voter le même jour. Débloquer l'Europe comme le demandent beaucoup de tribuns politiques devrait commencer par là !



La Tour Salomon du château fort de Visegrád

(*) Le traité de Visegrád fut signé en 1991 entre trois pays de l'Est libérés, Pologne, Tchécoslovaquie et Hongrie pour favoriser mutuellement leur intégration dans la Communauté européenne, en souvenir de l'alliance de 1335 entre les rois de Bohême, de Pologne et de Hongrie contre les Habsbourg.

Bataille de Sidi Brahim

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Passation du drapeau à Vincennes

« La bataille de Sidi Brahim s'est déroulée du 23 au 26 septembre 1845 entre les troupes françaises et Abd El Kader. Elle dura trois jours et trois nuits.

Les Français, commandés par le lieutenant-Colonel Montagnac, avaient engagé à la légère le 8e bataillon de chasseurs à pied et le deuxième escadron du 2e régiment de hussards contre les troupes d'Abd El-Kader.

Imprévue, la rencontre tourna mal pour les troupes françaises. Après un premier combat, elles furent réduites de 450 à 82 chasseurs et hussards face à 10.000 combattants de l’émir. Acculés, les chasseurs de la compagnie de carabiniers se réfugièrent dans un marabout d'où ils repoussèrent tous les assauts.

Après plusieurs jours de siège, les hommes, sans eau, sans vivres, à court de munitions, en furent réduits à couper leurs balles en morceaux pour continuer à tirer.

L'émir Abd El Kader fit couper la tête du capitaine Dutertre, fait prisonnier et amené devant le marabout, pour exiger la reddition des chasseurs. Malgré tout, Dutertre, avait eu le temps d'exhorter les survivants à se battre jusqu'à la mort. Lorsque l'émir demanda au clairon français, Guillaume Rolland, de sonner la retraite, celui-ci n'en fit rien et sonna la charge. Lors d'une de ces demandes de reddition, un chasseur répondit « merde » à l'émir. Les survivants, n'ayant plus de munitions, chargèrent à la baïonnette. Ils percèrent les lignes ennemies et, sur les 80 survivants, 16 purent rejoindre les lignes françaises (5 moururent quelques jours plus tard). Seuls 11 chasseurs sortirent vivants* de la bataille. Le caïd de Nedroma, Nekkach, recueillit une partie au moins des survivants et refusa d'ouvrir les portes de sa ville aux troupes de l’émir.»
(©Armée de Terre)
(*) un survivant racontera le combat des chasseurs au marabout de Sidi Brahim dans l'Écho d'Oran du 4 octobre 1845
« Faire Sidi-Brahim » est devenu un ordre d'assaut désespéré chez les Chasseurs ; il s'est conclu aussi par la victoire comme celle du 7è BCA dans les Vosges en 1915 sur l'Hilsenfirst (clic).

Comme nous le signale le blogue La Couronne, se tiendra demain samedi au château de Vincennes la Fête des Chasseurs dite de Sidi-Brahim, en présence d'Henri d'Orléans, invité de marque pour commémorer la création en 1838 du premier Bataillon de Chasseurs à Pied par le duc d'Orléans, fils du roi des Français, au fort de Vincennes. La famille d'Orléans fut et demeure proche des Chasseurs depuis sa création. Le sous-lieutenant François d'Orléans fut tué en Kabylie au 7è BCA en 1960, ce bataillon est parrainé par Marie d'Orléans et de Liechtenstein ; Jean d'Orléans parraine quant à lui le 4è Régiment de Chasseurs de la 27è Brigade d'infanterie de montagne.

De nombreuses unités seront représentées à Vincennes et comme chaque année le drapeau des chasseurs sera transmis à une unité méritante (puisque les chasseurs n'ont qu'un seul drapeau de corps, les bataillons ayant leur propre fanion). Cette journée est l'occasion de relire la lettre du maréchal Lyautey qui en 1931 exaltait l'esprit chasseur depuis son château de Thorey (Meurthe & Moselle).
L'esprit Chasseur ? Mais c'est justement ce qu'en d'autres termes j'ai toujours prôné.
C'est d'abord l'esprit d'équipe, de "mon équipe"
C'est la rapidité dans l'exécution des ordres de la part de gens qui "pigent" et qui "galopent" -
C'est l'allant, c'est l'allure, c'est le "chic" -
C'est pour les chefs le sens social dans le Commandement, c'est l'accueil aimable.
C'est servir avec le sourire - la discipline qui vient du cœur -
C'est le dévouement absolu qui sait aller lorsqu'il le faut, jusqu'au sacrifice Total -
Lyautey




Les diagonales de Xi

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Il y a trente ans pile, le 18 septembre 1987 au soir, les négociateurs américains et soviétiques tombaient d'accord sur le principe d'élimination des armes atomiques intermédiaires dans le cadre plus général et fumeux d'un désarmement nucléaire. Cet accord sera formalisé dans le Traité de Washington du 8 décembre 1987. L'escalade technique était montée si haut que le budget soviétique ne pouvait plus suivre, sous peine de ramener le reste du pays à l'époque de Tamerlan ! En France ce traité a obligé à ferrailler les lanceurs Pluton équipés de bombes à neutrons. Contraintes et circonstances avaient conduit deux empires à la raison, la guerre froide allait se terminer ! On ne sait aujourd'hui quel levier pourrait convaincre le président Kim Jong-un de cesser le développement d'un arsenal nucléaire. Il est prêt à faire manger de l'herbe à son peuple complètement décervelé pour asseoir le pouvoir de sa famille dans le siècle. Si on demande à un Coréen de la diaspora ce que veut le dictateur-fou, on s'entend dire que (1) il n'est pas fou et (2) qu'il veut une démilitarisation de la péninsule coréenne, la Corée du Nord gardant sa bombe en garantie. Impossible n'est pas non plus coréen. Peut-il aboutir ? Sans doute pas comme il s'y prend.



Il y a quatre acteurs sur zone, outre le "fou" : la Chine tout d'abord, marraine de toujours des Coréens qui lui reconnaissent au sud comme au nord une primauté morale venue du fond des âges ; le Japon ensuite qui mit Corée et Mandchourie en esclavage et se méfie aujourd'hui de tous, mais moins que d'une coalition de rencontre entre les deux Corées et la Chine populaire ; la Russie dont la péninsule de Vladivostok est très proche de la zone atomique de Chongjin ; la Corée du sud enfin, miracle réel et fragile d'un pays reparti de rien, sans autre rente que le courage et le génie de son peuple exposé aux foucades des Kims.

Tout conflit ravagerait la péninsule coréenne, le Jilin et le Liaoning chinois (partie orientale de l'ex-Mandchourie) et la région sibérienne de Vladivostok. Le Japon bénéficiant de la coupure de la mer éponyme aurait bien du mal à se préserver, surtout avec les bases américaines sur son sol. C'est donc bien la Chine qui est la plus mouillée et tout le monde cherche à la comprendre. Ce que disent les responsables chinois n'a que peu de valeur. Ce qu'ils pensent est difficile à percer, car ils sont formatés sur une prospective à quarante ans ! Peut-on se projeter pour eux ? La presse mainstream rechigne à réfléchir, pas nous :)

Le projet réside tout entier dans le China Dream auquel le Piéton du roi se réfère toujours et qu'il résume à nouveau pour ses lecteurs récents :
- Revenir sur toutes les marches de l'Empire du Milieu en mobilisant partout le génie et le labeur chinois ;
- Dominer sans partage ni contestations dangereuses de la Selenge mongole aux Spratleys (nord-sud) et du K2 jusqu'à l'Amour (ouest-est) ;
- Contenir les empires voisins dans leurs frontières naturelles, l'Inde sur le piémont himalayen, la Russie blanche dans la steppe stérile au-delà des Mongols, le Japon vieillissant dans son archipel ;
- Acheter la neutralité bienveillante des nations de la péninsule indochinoise par des échanges économiques fructueux et des soutiens à contre-emploi (en Birmanie et au Cambodge);
- Tenir la mer (carence fatale des Mandchous steppiques).

La Corée du Nord est actuellement une épine douloureuse dans le projet. Quoiqu'il se passe en pire, la Chine dérouille : l'effondrement nord-coréen inonderait le Jilin d'une population nombreuse, misérable et arriérée ; un conflit atomique contaminerait durablement des métropoles importantes comme Jilin, Changchun, Shenyang ou stratégique comme Dalian ; les hasards de la guerre feraient monter les Américains jusque vers les montagnes coréennes pour les "nettoyer". Ils s'y installeraient au prétexte du contrôle comme ils l'ont fait au Kosovo avec le camp Bondsteel.


Par inclination naturelle les Chinois veulent gérer ce challenge sur quarante ans et jusque là feront tout le possible pour que la situation ne dégénère pas, en lâchant parfois du lest aux Américains et en reprenant de la corde à d'autres moments. Sans doute comptent-ils sur la corruption des mentalités nord-coréennes inexorablement confrontées au monde extérieur et sur la corruption tout court des généraux le moment venu, comme les Américains le firent de ceux de Saddam Hussein. Le dictateur peut aussi muter en quelque chose de plus humain avec l'âge ou mourir du diabète. Accessoirement, le Japon, éternel coupable, est nié carrément dans la partie de cartes. La Russie est entendue mais pas écoutée. Retranché dans sa "popularité" inoxydable, Kim Jong-un, qui a quand même fait des études en Suisse, a parfaitement compris que sa disparition serait une bénédiction, non pas tant pour Washington que pour Pékin. Il s'en méfie terriblement, jusqu'à faire occire son oncle et son frère desquels il douta un instant ! Mais si le prix des sicaires monte, les candidats à la fortune seront plus nombreux.

L'Occident a vécu quarante-quatre ans de guerre froide avec des pics d'anxiété très dangereux (Berlin, Cuba, SS20/Pershing). La Chine va devoir apprendre à en faire autant en convoquant une sagesse confucéenne dont elle se moquait jusqu'à récemment. Des analyses (cf. Chinascope) tendent à montrer que sur cette zone d'intérêts elle concentre pour le moment son action diplomatique et économique sur la Corée... du Sud qu'elle entend peut-être agréger à son projet de long terme en contournant le cousin ingérable. L'Empire des Grands Tsings s'acheva en 1912. Xi Jinping le ressuscite à sa façon dans toute sa puissance. Impressionnant quand même !

Juste au nord de l'île de Haïnan, on devine l'enclave française à bail emphytéotique de Kouang Tchéou Wan

Quant à la Russie, Poutine voudrait qu'on arrête de crier et qu'on s'assoie autour d'une table avec deux cubi de vodka ! Il mesure quand même le défaut de poids de la Russie en Extrême-orient face aux deux monstres Chine et Japon.
Quelqu'un a parlé de Donald Trump ? Personne. Nikki Haley* a pris les choses en main. Ah, les femmes !

(*) Ambassadrice américaine à l'ONU

Viva, viva la revolución !

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Maître Le Chon
Quand j'écoute les divagations simplistes des porte-voix de La France Insoumise sous virements mensuels, je me dis que quand ces gens accèdent, la démocratie n'est que le gouvernement des idiots par les malins. Du moins à l'étage régalien de nos sociétés complexes ! L'époque moderne a fait faire un bon en arrière considérable à la démocratie avec le concours zélé et parfois sanglant des intéressés. Alors que les temps anciens réglaient les espaces de proximité par les débats et les décisions majoritaires - Royal-Artillerie s'en est fait l'écho dans ses billets sur la baronnie d'Hierle (même libellé) - la réorganisation a supprimé cet étage démocratique au bénéfice prétendu de l'efficacité en déportant débats et décisions au plan national, à un niveau que le vulgum pecus ne peut atteindre et comprendre. Ainsi, privé de son mot à dire au plan communal, on l'invite à jouer au sweepstake national comme aux courses. C'est tragique pour la vie de nos sociétés, et risible de savoir qu'elles comptent une majorité de cons.

Comme le rappelle le GAR dans un article récent sur la démocratie médiévale (clic), Dans les solides communautés du Midi, riches de leurs traditions médiévales, on se réunissait à la maison de ville, sous la présidence des consuls. Ailleurs, la séance se tenait à « la porte et principale entrée » de l’église et l’on peut encore voir, dans certains villages, le porche garni de bancs de pierre qui servaient à cet usage…L’assemblée jouissait d’une très large liberté, même lorsqu’elle était présidée par les officiers seigneuriaux. C’est elle qui prenait toutes les décisions importantes pour la vie de la communauté, qui élisait ses représentants et ses agents…De même, l’assemblée était consultée sur toutes les affaires concernant la communauté : érection d’une justice seigneuriale nouvelle, transfert du revenu de la cure, création d’un marché, rédaction des coutumes. » On y discutait de tout, impôts, exemptions, droits et privilèges communautaires (en fait tous possédaient des privilèges dans l’ancienne France), choix du maître d’école, aménagement et constructions… Les pauvres avaient des droits : glanage et usage des chaumes après les récoltes, utiliser les biens communaux, etc… On partageait les tâches de la vie communautaire pour le bonheur de tous. De nos jours, les administrés sont convoqués une fois tous les six ans sur un programme purement électoral et n'ont aucun moyen non violent de s'opposer à la politique et aux caprices du charmant candidat qu'ils se sont choisi et qui a muté en petit satrape. Cette amère réflexion ne s'applique pas aux villages où l'on tient encore des fourches dans les remises.

Ainsi endette-t-on jusqu'au cou des communes pour la "gloire" bétonnière des édiles, ces grands développeurs sans qui la France manquerait de rond-points, les dits-connards payant souvent dans les conurbations leur taxe foncière et d'habitation ailleurs que dans la commune qu'ils administrent. Trop de proximité nuit à la sécurité du sommeil. Enfin chacun de nous a son propre exemple sous les yeux. Ma commune surendettée par des décennies de corruption se lance dans des travaux d'embellissements après consultation de trois pelés un tondu, sans doute exonérés de tout, pour faire des photos dans le journal municipal...

Dans ma région d'origine, au moyen-âge et pratiquement jusqu'à la mise au pas des mairies par Louis XIV, les "consuls" étaient élus pour un an et leurs biens séquestrés pour la durée du mandat en attente du quitus de gestion. Evidemment que ça ne pouvait plaire aux élites instruites qui leur ont succédé ! L'ouverture des emplois aux rusés et malins de la profession politique permit aussi l'accès des caisses aux voleurs. La presse regorge de ces méfaits, mais le citoyen lambda, addict au serrement de mains, en redemande et réélit les pourris à telle enseigne qu'on parle dans les milieux autorisés de blanchiment démocratique. Tu es un fils de pute mais à dix voix près, tu accèdes au procès en canonisation. Fabuleux système, bien adapté à notre époque de benêts et autres électeurs stupides.

C'est bien de révolution qu'il s'agit maintenant. Renverser les pôles ! Rouvrir la démocratie directe des étages de proximité et ôter au peuple incapable par nature le choix des politiques applicables aux ministères régaliens. Entre les deux, agglomérer des instances de compétences à plusieurs niveaux capables d'organiser les pouvoirs publics au bénéfice de tous et non seulement à celui de la caste protégée par les contributions des autres. Les chapitres non régaliens sont bien plus nombreux que les premiers et offriraient de nombreux débouchés à tous ceux qui savent et qui ont la fibre politique. Bien sûr le dispositif verserait au fossé la majeure partie de la classe politique actuelle qui n'a jamais travaillé en vrai, au mieux qui a ramé dans une administration dans des fonctions syndicales s'ils n'étaient pas détachés permanents dans un fromage républicain. Voulez-vous des noms ? Apportez les fléchettes, on lance sur la cible et on est sûr d'en avoir toujours un.

Remettre l'étage régalien entre les mains d'un monarque gouvernant en ses conseils, semblerait logique, si l'on croit du moins à l'avantage d'une professionnalisation des pouvoirs suprêmes ; la séquence des présidents-touristes de la Cinquième République m'y autorise. C'est donc bien une révolution. La question travaille certainement Emmanuel Macron tant le paysage socio-politique du pays est délabré et envahi de faisans !

Réponse à Charles Barbanes

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Le blogue Royal-Artillerie a quelquefois nourri les réflexions de l'honorable webmestre de la CRIL17. Pour cela nous nous sommes senti convoqué par son appel à phosphorer ensemble (brain storming dans le texte) sur l'absence dans l'actualité des descendants de Louis XVI. Son appel est rédigé en ces termes :
Comment serait-il possible qu’il existe aujourd’hui encore, quelque part dans le monde, un Bourbon-Habsbourg, descendant de Louis XVII, exfiltré du Temple après le 3 juillet 1793, qui soit resté inconnu de tous et/ou qui pourrait même ignorer sa propre identité, comme nous avons pu parfois le lire ou l’entendre dire, ici ou là ? C’est la question à laquelle nous nous proposerons d’esquisser d’une réponse, au cours des prochains jours, avec le concours de tous ceux qui souhaiteront nous apporter le concours de leurs réflexions, de quelque nature que ce soit, en utilisant même la méthode américaine de management du brainstorming (source)

Les ruptures de paradigme (ou catastrophes nationales) ont été sévères dans notre pays qui s'est toujours mêlé de ses voisins à temps et contretemps, et ni Louis XVII ni ses descendants éventuels n'ont jamais apparu. Nous pouvons en citer trois ci-dessous. Nous n'avons pas retenu d'autres passages douloureux car ils ne pouvaient pas créer de réelles opportunités : émeutes parisiennes de 1830 et de 1848, guerre atroce de 1914-18 acceptée par la Nation en armes, fin de la deuxième guerre mondiale avec une France supplétive. Restent :

*1814 Campagne de France perdue et occupation de Paris par les cosaques russes, changement brutal de régime politique atténué par le retour des deux frères de Bourbon

*1870 Défaite de Sedan et occupation prussienne, détachement de l'Alsace-Moselle, énorme tribut de guerre imposé par Bismarck, changement de régime après une guerre civile à Paris, démonstration ultérieure de l'inanité des positions royalistes

*1940 Capitulation générale et occupation allemande, effondrement du régime, avachissement du pays soulagé par l'armistice, le déshonneur, pillage sans retenue de l'économie française au bénéfice du III° Reich

*La quatrième est à venir, si nous passons sous la tutelle européenne pour banqueroute.

Aucune de ces tragédies nationales n'a suscité le surgissement d'un recours salvateur en la personne soit du dauphin, soit de son fils ou petit-fils etc. Aujourd'hui nous avons peine à imaginer le choc d'un Louis XVII revenu. Pourquoi cette absence des Descendants du Temple® ? Je reprends mes trois réponses laissées sur la Charte de Fontevrault :
Il n’est que trois motifs à cette absence :
(1) ils n’existent pas ;
(2) ils ne savent pas qu’ils existent ;
(3) ils ont décidé de rester cachés pour une raison que nous ignorons.

Inutile d'épiloguer si le dauphin est mort avant de procréer. Resterait la piste Louvel (clic) de notre ami Pilayrou, mais les coïncidences fortuites sont pour moi trop sollicitées (désolé et on sortirait du sujet du jour).

La deuxième hypothèse conviendrait très bien si le dauphin avait été arraché à la fureur révolutionnaire et expatrié en Amérique à la condition de se taire. Eut-il tenu parole qu'il n'en aurait pas parlé à ses enfants s'il en eut (se souvenant de la terrible phrase du testament de son père : Je recommande à mon fils, s'il avait le malheur de devenir roi...). Il y aurait peut-être encore une descendance inconsciente aux Etats-Unis ou ailleurs.

La troisième assertion relève de la spéculation pure, et nous laissons aux romanciers les hypothèses les plus échevelées, autour de Fersen... par exemple.

Quant aux dauphins qui firent la fortune des imprimeurs, on comprendra facilement qu'il étaient détectés immédiatement par la famille de Bourbon, les trois frères, leurs familles et leur entourage ayant vécu tous ensemble au château de Versailles et pouvant trier facilement le vrai du faux.

En résumé (provisoire, comme tout ce qui touche à l'énigme du Temple), les tenants de la survivance devraient creuser la question d'outremer, en se souvenant qu'il n'était pas si difficile de traverser l'Atlantique à cette époque, les échanges étant nombreux et fréquents. Un coup de lampe gratuit : les îles françaises de la Mer des Caraïbes étaient trop petites pour cacher un dauphin de France, les plantations de la côte étaient infestées de Français des deux camps, mais le Sud-Dakota auquel on accède facilement en remontant le Missouri et où les Indiens comprenaient le français aurait pu convenir.

Trois princes aux Invalides

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Ainsi trois de nos princes sont venus dimanche dernier à la messe commémorant la fondation des Invalides par le roi Louis-le-grand, il y a 302 ans. Sans entrer dans le secret des dieux, on peut raisonnablement avancer que Charles-Emmanuel de Bourbon Parme (en photo ci-contre) a de nouveau négocié cette manifestation commune, ce dont tous les royalistes le remercient, si cela est vrai bien sûr.
Une manifestation commune avait été essayée et réussie en 2014 pour une messe à la mémoire de saint Louis à Notre-Dame de Paris. Soyons fous et proposons une grand messe commune pour le roi Louis XVI à Saint-Denis le 21 janvier prochain, avec tous les princes disponibles et deux compagnies de chevaliers à cape.

Une vidéo a été tournée dimanche à l'Hôtel des Invalides par le site des Rois souterrains, et même si on l'eut préférée plus œcuménique, saluons le travail ; la voici :


Plusieurs sites royalistes ont diffusé une relation de l'événement ou des textes laudatifs ; Royal-Artillerie apporte sa pierre à l'édifice. Pouvons-nous exprimer le simple regret que tous les princes résidant à Paris ou en Île de France auraient dû participer à cette cérémonie parce qu'elle est, outre la piété de circonstance, un élément de communication neutre et très significatif des vertus cachées de l'Ancien régime. Bien sûr, la presse subventionnée ne s'est pas fait l'écho de la cérémonie de cette année, pas plus que les années précédentes, mais peut-être qu'une affluence princière plus étoffée, et c'est vrai aussi des ordres de chevalerie dont la représentation étique à l'Eglise des soldats m'a sauté à l'œil, aurait décidé un journal à sortir un reportage que d'autres auraient recopié...

Henri d'Orléans cerné de képis
Ensemencer l'opinion à l'idée du roi est le préalable à toute forme de démonstration de la pertinence monarchique. L'évoquer, en parler souvent en concentrant l'éclairage sur les actifs de l'Ancien régime c'est nourrir le terreau sur lequel on plantera une offre politique raisonnée. Les descendants de nos rois ont un rôle important dans cette transmission et nous les y attendons sans arrière-pensées, sans préséances, au seul bénéfice du témoignage de qualité. La restauration n'est pas à l'ordre du jour et nos princes ne sont pas préparés au monde quantique qui nous attend, aussi sont-ils libres de participer à ce genre de réunion de famille avec entrain et chaleur.

Oublions donc les sottises de la querelle dynastique, oublions les 800 ans de la victoire de Bouvines boudés par l'un ou l'autre, les voyages cadencés à Reims pour ne s'y pas croiser, oublions les enfantillages, aucun de ceux que nous connaissons ne sera appelé jamais à accéder. Le job au moment est tout dans la communication la plus large afin de promouvoir le concept, et la retenue la plus disciplinée dans leurs mœurs afin de ne pas donner prise aux malveillants et ruiner le travail. C'est déjà beaucoup. Les princes ne peuvent jouir des mêmes droits que le vulgum pecus, à peine de s'y agréger et de disparaître. C'est le fameux Noblesse oblige ! Un jour, plus tard, sur des générations formées sérieusement à l'emploi se lèvera, n'en doutons pas, le soleil d'Austerlitz, car il est là aussi l'Empereur, aux Invalides.



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